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Le Pays N° 5324 du 26/3/2013

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Commune rurale de Comin-Yanga : Le maire persona non grata

Publié le mercredi 27 mars 2013   |  Le Pays




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Le maire de la commune rurale de Comin-Yanga, localité située dans la province de Koulpélogo, région du Centre-Sud, est indésirable dans son fief. Léné Louis Darankoum est récusé, selon ses thuriféraires, pour son manque d’initiative pour le développement de la commune, sa gestion opaque des biens publics et sa mauvaise collaboration avec les responsables coutumiers locaux. Tout serait parti le 11 mars dernier, d’un mouvement d’une fraction de la population dirigé contre le bourgmestre qui a tourné à des casses, à des arrestations et à la fermeture de la mairie. Pour un retour au calme, une délégation des ressortissants de cette localité y a effectué une mission de médiation le 24 mars dernier.

Le maire de la commune de Comin-Yanga a maille à partir avec une fraction de la population. Ce climat malsain, longtemps entretenu, a dégénéré le 11 mars dernier où jeunes et vieux de cette agglomération voulaient en découdre avec l’édile qui venait d’être réélu au perchoir communal de cette mairie. Aidés des élèves du lycée départemental de Comin-Yanga, les frondeurs, avec à leur tête le chef du village, ont chassé Léné Darankoum de son bureau. Le maire contesté ayant pris la clé des champs se serait d’abord refugié au commissariat de ladite commune avant de se retrancher dans son village à Gogo, une localité distante de 12 km de la commune. Le bilan de cette sortie s’est soldé par des casses et des destructions de biens privés et publics dont le véhicule (une fourgonnette) du maire qui a été endommagé. Pour éviter le pire et sur ordre du préfet du département dont relève la commune, les clés de la mairie ont été retirées des mains de son occupant et la mairie elle-même mise sous scellés par la police. Deux des manifestants proches du chef du village, présumés cerveaux de la manifestation, ont été arrêtés lors de ces émeutes et n’ont recouvré leur liberté provisoire qu’à la date du 22 mars dernier.

Pourquoi ce mouvement du 11 mars dernier ?

« Le maire, depuis son accession à la tête de la mairie en 2006, n’a rien fait pour le village que de le spolier et le diviser au gré de ses intérêts. Las de la zizania qu’il sème, de l’ humiliation que nous subissons au quotidien et des retards que nous accusons dans le développement de notre commune, nous avons décidé ce jour-là d’aller retirer les clés de la mairie et le remercier pour sa mal gouvernance », argumente le Sanem-Koaga Naaba de Comin-Yanga. Pour le maire désavoué, Léné Darankoum, ses adversaires n’ont rien à lui reprocher, étant donné qu’il a beaucoup fait pour cette commune après dix ans aux commandes : « Le conseil municipal a toujours impliqué les présidents des conseils villageois, les comités CDP de base au niveau des villages dans le processus démocratique et le travail. Pour que les gens puissent contrôler l’action communale, nous avons privilégié la communication entre le conseil et la population. Tous les anciens conseillers qui ont été réélus sont satisfaits du travail que nous avons abattu et j’ai même, là-dessus, eu plusieurs lettres de félicitations ».

Le chef de Comin-Yanga, lui, balaie du revers de la main les propos du nouvel élu local : « Après six ans de mandat, il n’y a aucune réalisation faite par ce maire dans ce village. Il n’a planté aucun arbre. Une ambulance que des amis Allemands nous ont allouée est gérée par Léné Darankoum qui nous la loue à 17 500 F CFA pour chaque évacuation de malade vers un district sanitaire. Aucun bilan financier de gestion ne nous a été fait ».

Le maire qui accuse le Sanem-Koanga de Comin-Yanga d’être l’instigateur de ce qui lui est arrivé, a, quant à lui, les vrais mobiles de son rejet. Ils sont, selon M. Léné, plutôt politiques que monarchiques : « Ils veulent un Salembéré issu de la famille du chef à la tête de la mairie de Comin-Yanga, soutenant qu’ailleurs, les maires viennent des familles royales. D’ailleurs, le chef n’a-t-il pas, lors d’une réunion organisée par le bureau politique provincial, dit qu’il accepterait toute personne à la tête de la mairie sauf l’ancien maire qui est réélu pour un nouveau mandat de cinq ans ? ». Miki Emmanuel Salemberé, issu de la famille du chef, réfute cette allégation : « Quand le maire parle d’un Salemberé que le chef de Comin-Yanga veut mettre à sa place, c’est bien moi. Mais que du potin et de la délation ! J’ai été écarté aux primaires et j’ai respecté le choix de la base pour l’intérêt supérieur de notre commune ».

Léné Darankoum fustige également l’attitude d’un candidat du même parti que lui qui aurait enfreint aux directives du parti CDP, en se présentant contre sa candidature à l’élection du maire le 7 mars dernier, alors qu’il a été proposé par le parti. Gérard Zong-Naaba, puisqu’il s’agit de ce candidat qu’incrimine le maire, faisait partie des cinq autres à avoir été retenu à l’issue des primaires : « Nous n’avons, contrairement à ce que dit le maire élu, reçu aucune consigne en la matière quand nous nous sommes retrouvés dans la salle pour les élections. Si je me suis présenté, c’est parce qu’à la veille des élections, j’ai reçu un coup de fil d’un responsable du bureau politique provincial du Koulpélogo, me demandant de lui donner les noms des membres provisoires de mon équipe municipale. Ce qui, pour moi, sous-entendait que j’étais le candidat désigné par le parti ». Le domaine scolaire du lycée départemental de Comin-Yanga qui aurait été vendu à un opérateur économique de téléphonie mobile fait aussi des gorges chaudes dans cette cité. C’est d’ailleurs ce qui aurait justifié la participation des élèves au mouvement. Pour le maire, le terrain attribué à l’agence de téléphonie mobile ne fait pas partie du domaine scolaire. Ce que ne partage pas Idrissa Kobyagda, surveillant au lycée départemental de Comin-Yanga : « Certes, les élèves ont marché le 11 mars mais je ne saurais vous dire pour quelle cause exactement. Toujours est-il que les choses sont assez claires quand on parle de domaine scolaire. Il y a eu un plan cadastral qui a été fait pour délimiter le domaine scolaire ; et la partie dont il est question relève bien du domaine scolaire. Pour avoir bien avant été interpellé là-dessus par l’administration scolaire, le maire lui-même le sait ».

L’administration communale étant ainsi paralysée, l’établissement des actes administratifs est en souffrance. Comme l’a dit l’autre dans ce village, Comin-Yanga est sous perfusion et la route du développement ne passe plus par cette entité administrative. La voie politique ayant montré ses limites dans le rétablissement de la paix et de l’harmonie sociale dans le village de comin-Yanga, les fils de ce village sont, sur initiative du haut-commissaire de la province de Koulpélogo, partis échanger avec leurs frères du village. Forte de dix personnes et conduite par Gérard Zong-Naaba, la délégation a été accueillie dans la cour royale par le garant de la tradition de Comin-Yanga. Devant un parterre de jeunes et de sages dont le chef et ses ministres, la délégation s’est, par la voix de son président, introduite en ces termes : « Nous avons suivi avec indulgence et réserve, tous les événements regrettables qui ont cours dans notre village. Nous sommes venus pour vous demander de mettre de l’eau dans votre vin au nom de la paix sociale ». La tolérance, la non-violence dans les mouvements de protestation, la culture du civisme, le respect de l’autorité, des biens publics et privés ont été prêchés aux jeunes sortis nombreux pour la circonstance. Les ressortissants de Ouagadougou ont, conformément à l’esprit de leur mission, demandé à la population dissidente d’enterrer la hache de guerre en laissant travailler le maire. Mais la mayonnaise semble n’avoir pas pris, face à une population visiblement remontée contre son maire. « Merci pour la visite et l’esprit qui l’a sous-tendue. Nous accepterons un nouveau maire, quels qu’en soient ses origines et son état physique mais pas Léné Louis que nous ne voulons plus revoir dans la mairie de Comin-Yanga », foi de Sanem-Koaga qui rumine mal le fait que le maire ait prononcé son nom à l’état civil dans une interview qu’il a accordée à notre confrère Sidwaya. « Le fait d’avoir prononcé le nom à l’état civil de notre chef montre le mépris et la haine que Léné a, à l’égard de notre chef ainsi qu’à tous les autres chefs qui lui sont assujettis », a martelé le Naaba Saaga de Kohingtenga. Après plusieurs heures d’horloge de discussions infructueuses, les contestataires sont restés campés sur leur position à savoir que l’administration communale peut reprendre du service mais sans le maire, expulsé. Avant de regagner Ouagadougou, la délégation que le haut-commissaire a reçue à son domicile pour le feed back, a fait le compte rendu de sa mission qu’elle a tout de même jugée utile : « Nos frères disent qu’ils acceptent le pardon et restent accessibles à tout processus de paix mais n’accepteront plus le retour du maire dans la mairie. Nous allons tout de même poursuivre la médiation », a confié Gerard Zong-Naaba au haut-commissaire du Koupélogo qui a remercié la délégation pour sa mobilisation et son engagement à restaurer la quiétude dans son village natal. Emmanuel Bado s’est dit tout de même confiant quant à une sortie de crise honorable dans cette partie de son administration. « La voie politique semble la mieux appropriée pour poursuivre les approches aux fins de ramener la paix au niveau de Comin-Yanga. La crise n’étant pas au sein du conseil municipal de cette commune, le politique peut travailler à restaurer cette paix », a conclu le haut-commissaire mais pas sans auparavant tenter, à son niveau, d’approcher le chef à ce sujet.

Aux dernières nouvelles et selon certaines sources, une quinzaine de manifestants devront répondre de leurs actes devant le procureur le 2 avril prochain suite aux événements du 11 mars. On se rappelle que des affrontements entre deux camps adverses ont causé d’énormes dégâts matériels la mort d’un jeune homme.

Armel ILBOUDO

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