Les députés de la transition ont adopté, le vendredi 26 juin dernier, un nouveau Code minier. Celui-ci prévoit l’instauration de 3 fonds qui permettront, entre autres, de promouvoir le développement local et la préservation de l’environnement. Ces fonds sont répartis comme suit : un fonds minier de développement local, un fonds de réhabilitation, de sécurisation des sites miniers artisanaux et de lutte contre l’usage des produits chimiques prohibés et un fonds de financement de la recherche géologique et minière et de soutien à la formation sur les sciences de la terre. Tous ces fonds seront alimentés par l’Etat et les entreprises minières. La part de l’Etat s’élève à hauteur de 20% des redevances collectées, liées à la valeur des produits extraits et/ou vendus. Quant aux entreprises minières, elles devront reverser 1% de leur chiffre d’affaires mensuel hors taxes ou de la valeur des produits extraits au cours du mois. Ces mesures, de l’avis du ministre des Mines et de l’énergie, Boubacar Ba, permettront de « passer d’un code d’attractivité à un code de développement ». L’on pourrait décrypter les mots du ministre de la manière suivante. Le Code de 2003, c’est-à-dire l’ancien, avait été élaboré dans un contexte où le souci du gouvernement était d’attirer les investisseurs. Maintenant que cet objectif est atteint, il sied de prendre de nouveaux textes de manière à ce que les fruits de l’exploitation
minière ne perdent pas de vue les intérêts des populations des localités qui abritent les sites et ceux du Burkina. Ce changement d’orientation vaut son pesant d’or et mérite donc d’être salué à sa juste valeur. En effet, l’on pouvait faire le constat que presque toutes les populations des zones minières étaient à couteaux tirés avec les entreprises minières. Les raisons avancées pour justifier ce mécontentement général sont liées au fait que leurs intérêts ont été lésés. Et elles n’ont pas tout à fait tort. Car leurs principales richesses que sont leurs terres ont été réattribuées et rendues impropres à l’agriculture du fait des produits chimiques utilisés pour extraire l’or. Et les compensations qu’elles reçoivent en retour sont des broutilles, au regard des préjudices subis et des bénéfices engrangés par les opérateurs miniers. Il en a résulté, de par le passé, des accès de colère qui ont atteint leur paroxysme sous la transition, à la faveur de la libération de la parole. L’on peut donc espérer qu’avec l’adoption du nouveau Code minier, l’on assistera à une cohabitation apaisée et cordiale entre les populations locales et les opérateurs miniers dans l’intérêt des deux partis.
La vigilance citoyenne doit être de mise
Le nouveau Code est d’autant plus à saluer qu’il est le fruit d’une démarche à laquelle ont participé les entrepreneurs du domaine et les collectivités locales. L’on peut donc estimer, comme l’ont d’ailleurs reconnu certains spécialistes du droit minier, que ce nouveau texte constitue un progrès par rapport à l’ancien, en termes d’avantages pour les populations locales et pour le Burkina. Et cela n’aurait pas pu être envisagé sous le
régime de Blaise Compaoré, en raison des accointances supposées ou réelles entre certains bonzes de son système avec bien des entrepreneurs miniers. Chapeau bas donc à la transition pour l’adoption du nouveau Code minier. Mais le plus dur reste sa mise en application. En effet, le plus souvent, en Afrique, ce ne sont pas les textes pertinents qui manquent pour booster le développement. Dans certains pays même, l’on peut dire qu’il y en a une pléthore. Le véritable problème réside dans leur mise en application. A ce niveau, l’on observe beaucoup d’insuffisances savamment entretenues par des individus pour préserver leurs intérêts. De ce point de vue, l’on pourrait s’attendre à ce que les avantages concédés aux populations par le nouveau Code minier, soient détournés de leur destination par des gens qui ne se font aucun scrupule lorsqu’il s’agit de faire main basse sur les ressources publiques. C’est pourquoi les organisations de la société civile, les vraies, doivent mettre un point d’honneur à veiller, comme du lait sur le feu, à l’exécution intégrale de toutes les innovations contenues dans le nouveau Code minier. Elles ne doivent pas, un seul instant, hésiter à alerter l’opinion nationale, à chaque fois qu’elles relèveront des pratiques qui seront en déphasage avec la lettre et l’esprit du nouveau Code minier. Cette vigilance citoyenne doit être de mise pendant et après la transition, de manière à ce que les richesses minières dont le pays regorge, puissent impacter positivement le développement du pays au profit non seulement des générations présentes, mais aussi des générations à venir. C’est seulement à ce prix que l’on peut parler de développement durable.
SIDZABDA