Dans les lignes qui suivent une compatriote, A. Z, s’est confiée au Journal Le Quotidien après une mauvaise expérience vécue sur le sol turc quand elle tentait de rejoindre la Tunisie en transitant par Istanbul. Désormais, entre le Burkina Faso et la Tunisie, il n’y a plus de visa. Sur ce trajet qu’elle a emprunté avec la compagnie Turkish Airlines, on lui a exigé le visa tunisien, turc ou de l’espace Schengen, bien que la Turquie ne soit pas dans l’espace Schengen, pour pouvoir transiter par l’aéroport d’Istanbul. Entre les couloirs de l’immigration, de la police et des propositions gagnant-gagnant par sexe interposé, elle a été rapatriée au Burkina Faso. Lisez plutôt !
Le Quotidien : Pouvez-vous nous raconter ce que vous avez vécue sur le sol turque?
A. Z : J’ai pris un vol au départ de Ouagadougou pour Tunis en transitant par Istanbul. Comme il n’y avait pas de disponibilité à Tunis Airlines mon compagnon et moi avons décidé que je prenne TurkishAirlines. Ma destination finale était Tunis. J’avais une lettre d’invitation de l’hôtel qui est en Tunisie. C’est un vol que j’ai déjà fait, mais pas avec Turkish Airlines. Comme il n’y a pas l’Ambassade de Tunisie au Burkina, on avait la possibilité de prendre le visa directement à l’aéroport, ou se rendre à Bamako pour le prendre (ndlr : l’ambassadeur de la Tunisie au Burkina réside à Bamako). Je suis déjà allée en Tunisie, mais j’ai pris le visa directement à l’aéroport. Quand j’ai pris Turkish Airlines, personne ne m’a dit que les policiers avaient le droit d’interdire quelqu’un de rester sur leur territoire en transit. Dès l’aéroport, j’ai appris qu’il n’y a plus de visa entre le Burkina et la Tunisie. Alors, j’ai dit que même si j’ai besoin de visa, j’ai des documents qui les empêcheront de me rapatrier. En plus, je partais juste pour trois jours. A TurkishAirlines, ils m’ont dit que je peux partir. Mais, dès que je suis arrivée à Istanbul, j’ai attendu pendant 4 heures. Au moment de l’embarquement, il y a des gens qui sont passés avec des lettres comme le mien. Ils n’avaient pas de visa original. Ils avaient seulement leurpasseport tout comme moi, mais ils les ont laissés passer. Contrairement à moi, ils parlaient anglais. Arrivé à mon tour, ils disent que je ne peux pas passer. J’ai demandé des explications, ils m’ont dit qu’on ne passe pas sans visa. Sous mes yeux, il y a un vieux qui est venu et ils l’on laissé passer avec une lettre comme la mienne. J’ai expliqué mon problème à cette personne qui s’est proposée de m’aider dans l’interprétation. Après avoir écouté leurs propos, cet homme m’a dit que je ne pouvais pas passer et que je devais retourner chez moi. Je suis allée voir les policiers, mais ils ne m’ont donné aucune information. J’ai vu un autre policier, il me dit que mon vol est déjà parti. Ils ont gardé ma carte de réservation pour le jour prochain et, après m’avoir demandé où est-ce que j’ai reçu mes papiers, ils m’ont dit de venir au bureau d’immigration. Arrivée, ils disent qu’il est impossible pour moi de passer, qu’il faut que je retourne chez moi. Je leur ai expliqué la même chose que j’ai dite aux autres, ils disent non.Je leur donne le numéro de l’Ambassade pour qu’ils puissent appeler, ils refusent. J’ai alors appelé l’Ambassade de Tunis à Bamako, je leur ai expliqué mon cas. La personne qui m’a reçue me dit que les Burkinabé n’ont plus besoin de visa pour aller en Tunisie et m’a demandé de passer le téléphone aux policiers. Quand j’ai voulu le faire, ils ont refusé catégoriquement de prendre le téléphone. J’ai alors passé la nuit à l’aéroport et le lendemain, un agent de TurkishAirlines me dit d’ajouter 240 euros (plus de 150 000FCFA) afin de pouvoir aller à Istanbul avec le second vol. J’ai refusé.Il me propose alors d’avoir des relations sexuelles avec lui afin de pouvoir partir le lendemain avec le vol de 6H. Cela n’était pas vrai parce qu’il n’yavait pas de vol de 6h sur le tableau de bord. Je me suis alors énervée, je lui ai dit que je ne suis pas une prostituée. Il m’a dit ok et il est parti. Je peux le reconnaitre, il travaille dans un bureau de change de Turkish Airlines. Après cela, j’ai vu un homme venu du Nigeria et qui parlait un peu le français, je lui ai expliqué le problème, et il a trouvé cela anormal.Je lui dis alors que je veux retourner au Burkina, il me dit qu’il est impossible, et que je dois faire les 3 jours que je devais faire à Istanbul à l’aéroport. Je lui demande pourquoi cela, il me dit que si je veux rentrer avant les 3 jours, il faut que j’achète un nouveau ticket. Je repars alors dans le bureau où j’avais laissé mes papiers, je dis que je veux repartir au Burkina, il me dit ok et prend mon passeport, ma coupure de bagage, mais me remet seulement mon passeport et ma carte d’embarquement.Je suis alors partie. Arrivée à Ouagadougou, je n’ai pas retrouvé mes bagages. Le lendemain, je pars àTurkishAirlines, je leur explique ce qui m’est arrivée. Ils m’ont promis de chercher à comprendre cela, et m’ont demandé une lettre d’explication. Mon mari a rédigé alors la lettre depuis l’Italie avec les reçus et me les a envoyés. J’ai alors amené la lettre et les reçus au bureau de Turquie Airlines. J’ai appelé aussi l’Ambassade de Tunis, j’ai expliqué le problème, ils me disent qu’il faut quej’aille à l’Ambassade de Turquie pour demander des explications. Arrivée à l’Ambassade, ils m’ont promis alors de m’appeler la semaine prochaine, mais ils ne l’ont pas fait. 10 jours après, je suis allée au bureau de TurkishAirlines, je leur ai dit que je n’ai toujours pas eu de réponse. La dame qui m’avait reçue me dit que ce n’est pas la faute de Turkish Airlines et que les policiers ont le droit de décider de qui peut transiter dans leur pays ou non. Je lui ai suggéré alors de donner cette information aux clients avant qu’ils ne prennent les tickets.
Est-ce que vous vous êtes référée à l’Ambassade de Turquie au Burkina?
Oui. Quand je suis arrivée à l’Ambassade ils m’ont demandé de fournir une lettre d’explication détaillée comme ce fut le cas à Turkish Airlines. 10 jours après le dépôt de la lettre, quand je suis repartie, personne n’avait lu la lettre que j’avais envoyée. Quand je suis arrivée c’est un autre agent que j’ai trouvé sur place. Il lit la lettre et tire sa conclusion en me disant qu’il me faut un visa de transit. Je lui ai expliqué que je ne sortais même pas de l’aéroport et que c’est juste quatre heures que je dois rester à l’aéroport avant de partir. Je lui ai expliqué que ce n’est pas la première fois que je transite et je n’ai jamais pris un visa. Il dit qu’il n’avait pas compris. Il continue la lecture et s’arrête entre temps parce que dans la lettre mon compagnon lui a expliqué qu’aucun policier n’a voulu répondre à l’appel. Il dit que c’est normal qu’on ne nous réponde pas, parce qu’ici aucun policier ne leur répond au téléphone quand ils ont besoin d’aide. Là j’étais sur mes nerfs parce que je suis allée à l’aéroport à plusieurs reprises chercher des Italiens qui ne comprennent pas français mais je trouve souvent les policiers en train de les aider. Donc je lui dis que ce qu’il avance n’est pas vrai. Il me dit qu’il ne va pas m’aider et de prendre mon passeport et de sortir. Je lui ai dit que tôt ou tard il va devoir me répondre. Il me dit d’aller me plaindre là où je veux. J’ai dit qu’ils étaient une bande de racistes. Je suis consciente que c’est une Ambassade et que c’est Turkish Airlines, donc avec un combat judiciaire je n’irai jamais loin. La seule façon pour moi de me faire entendre et que ça n’arrive pas à d’autres personnes c’est la presse. M’engager dans un procès avec Turkish Airlines c’est une perte de temps parce que je ne vais jamais gagner. Il faut que l’Ambassade donne des réponses à mon Etat.
A combien s’élèvent vos dépenses après cet échec ?
Mon hôtel faisait 144 euros par nuit pour une réservation de 4 nuits. L’hôtel m’a remboursé trois nuits en reprogrammation. Il y a également mon billet d’avion qui est aussi une perte totale.
Quand on vous a bloquée à l’aéroport, vous viviez comment ?
Je dormais sur un banc et je m’asseyais sur une chaise. Personne ne se soucie de qui que ce soit. Quand je dormais sur le banc à l’aéroport dans la nuit du 2 juin, je sentais une main me frôler. Quand je me suis levée c’était un des hommes qui nettoient qui, avait commencé à me toucher. Tout ce que je dis ils peuvent vérifier parce qu’il y a des caméras de surveillance dans l’aéroport.
Vous vouliez quitter l’aéroport ?
Je ne voulais pas sortir parce qu’on ne peut même pas sortir sinon il fallait remplir les formalités de police et tout avant. Ce n’est pas comme ici où le monde est ensemble. Chez eux, il y a une salle de transit où j’attendais d’un côté et les autres de l’autre côté. La sortie est loin de nous. A l’Ambassade je lui ai dit que je ne voulais pas sortir. C’est ce qu’il n’arrive pas à comprendre. J’étais en salle de transit et si je voulais sortir je sais par où passer. Je ne fais pas ça parce que je veux soutirer quelque chose où passer au journal mais c’est un manque total de respect aux gens. Je ne suis pas une criminelle. Ils ne m’ont pas prise avec drogue, ni arme ni rien. L’Ambassade du Burkina avec résidence à Bamako dit ne pas comprendre ce comportement. J’ai ma fille à l’école turque depuis 3 ans, Horizon international. C’est choquant de voir que ma fille est dans cette école. Ils nous disent chaque fois que les Turques sont contents d’être ici et arriver chez eux ils nous ignorent complètement. De toutes les façons ma fille ne repart pas cette année dans leur école et qu’ils nous disent plusque la Turquieest un pays tolérant et tout. Elle se croit être dans l’Union européenne. Ici à l’Ambassade on me dit que si j’avais un visa Schengen je pouvais sortir. Ce qu’ils m’ont fait est très mal. Ce qui m’a vraiment étonné c’est que celui qui m’a reçu me dit qu’il n’est pas obligé de m’aider et que dans notre pays aucun politicien les aide s’ils ont des problèmes. Tout ce que je dis j’imagine qu’ils ont des caméras dans l’ambassade aussi et ils peuvent voir et écouter. J’avais juste besoin d’une réponse. Je voulais savoir pourquoi j’ai été fermée à leur aéroport alors que j’étais en transit ? Jusqu’aujourd’hui ni TurkishAirlines ni l’Ambassade n’a répondu à ma question.
L’hôtel dit être prêt à vous rembourser sur reprogrammation. Vous comptez repartir ?
J’ai le reçu de l’hôtel datant du 2 juin au 6 juin. L’hôtel a été compréhensif, il m’a dit qu’il ne peut pas me rembourser la première nuit mais ils ont reporté. C’est pourquoi j’ai pris un nouveau ticket pour le 25 juin pour repartir à Tunis avec TunisieAirlines maintenant. Il n’y avait pas de disponibilité dans cette compagnie à la période que je voulais.
Vous repartez en Tunisie confiante ?
J’ai pris mon billet pour la Tunisie et je dois prendre le visa s’il le faut. Il suffit d’avoir l’argent sur toi et la confirmation de l’hôtel. C’est très simple ce trajet. C’est un trajet que j’ai déjà fait. Avec Air Algérie j’y suis allée mais je n’ai jamais eu de problème en transit. Le problème est que mon homme ne voulait pas que je prenne Air Algérie à cause du Crash que la compagnie a essuyé l’an dernier. Cette année on voulait partir avec la petite en vacance en Turquie donc il m’a dit d’essayer cette compagnie voir. Si ça marchait comme je le voulais on allait partir avec cette compagnie.
Qu’est-ce que vous réclamer ?
Je réclame une réponse à ma question. Qu’ils me disent pourquoi j’ai été bloquée en transit et ils m’ont mise dehors à l’Ambassade. Si ce n’est pas justifié, qu’ils me remboursent mon billet. C’est Turkish Airlines de me rembourser mon billet et à l’Ambassade de m’expliquer pourquoi ils m’ont mise à la porte. L’agent de l’Ambassade m’a dit tout simplement que ce n’est pas son problème et qu’il n’est pas obligé de m’aider et comme je parle beaucoup de sortir. Je suis franchement frustrée.
Interview réalisée et retranscrite par Salifou OUEDRAOGO
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