L’organisation Reporters sans frontières (RSF) a salué, lundi, ‘’la décision historique’’ de la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples (CADHP) qui a ordonné vendredi à l’Etat burkinabè de rouvrir l’enquête sur les meurtres en 1998 du journaliste Norbert Zongo et de ses trois compagnons.
Dans son jugement, la CADHP, dont le siège se trouve à Arusha, en Tanzanie, a ordonné aux autorités burkinabés de reprendre l'enquête et de verser des réparations aux membres des familles des quatre victimes.
‘'Ce jugement marque un tournant important dans l'affaire Zongo qui n'a que trop souffert de l'impunité tolérée par la justice burkinabè pendant toutes ces années'', a déclaré Cléa Kahn-Sriber, responsable du bureau Afrique de Reporter sans frontières.
‘'Il met une pression supplémentaire sur les autorités du pays pour concrétiser les promesses de justice faites lors de la transition de novembre 2014'', après le soulèvement populaire qui a chassé du pouvoir le président Blaise Compaoré, a-t-elle poursuivi, dans un communiqué de RSF reçu à APA.
‘'Les réparations exigées en faveur des familles des victimes soulignent enfin la reconnaissance des souffrances qu'elles ont subies. Nous espérons que les autorités du pays vont saisir cette occasion de réparer cette injustice qui n'a que trop duré'', a-t-elle ajouté.
Le fondateur et directeur de la publication de l'hebdomadaire L'Indépendant, avait été assassiné alors qu'il enquêtait sur l'implication du frère du président de l'époque, François Compaoré, dans la mort en détention de son chauffeur en 2000. L'affaire avait été classée par un non lieu en 2006, une décision qui avait scandalisé la société civile et les défenseurs des droits de l'homme.
La Cour africaine a ordonné aux autorités du Burkina Faso de ‘'reprendre les investigations en vue de rechercher, poursuivre et juger les auteurs des assassinats [du journaliste] Norbert Zongo et de ses trois compagnons''.
Les juges de la Cour ont également ordonné à l'Etat burkinabè de verser des réparations financières à hauteur de 25 millions de francs CFA (environ 38 000 euros) à chacun des conjoints, 15 millions à chacun des enfants et 10 millions à chacun des parents de Zongo et ses compagnons.
En mars 2014, la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples avait déjà rendu un arrêt condamnant les carences de la justice burkinabè dans le traitement de l'affaire Zongo.
A la chute de Blaise Compaoré en novembre dernier, le président de la transition, Michel Kafando, avait fait des promesses sur la lutte contre l'impunité, laissant espérer une réouverture rapide du dossier.
''Si un juge d'instruction a bien été nommé dans l'affaire, aucune suite tangible n'a été notée depuis'', note RSF.
Cette fois-ci, le gouvernement burkinabè a six mois pour remettre un rapport à la Cour sur les progrès accomplis.
Le Burkina Faso occupe la 46e place sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse 2015 établi par Reporters sans frontières.
RE/cat/APA