Le président du Faso, Michel Kafando, a rencontré dans l’après-midi, du 3 juin 2015, la diaspora burkinabè de France. Les échanges ont porté sur la conduite de la Transition, le vote des Burkinabè de l’étranger, les arrestations d’anciens dignitaires du régime Compaoré et le soutien que le Burkina Faso attend de ses enfants vivant dans l’hexagone.
L’hymne national du Burkina Faso, le Ditanyé, a retenti au 8e arrondissement de Paris, Boulevard Haussman, le 3 juin 2015. C’était à l’ambassade où le président du Faso a eu son face à face avec ses compatriotes vivant en France. La salle a refusé du monde. Signe que les Burkinabè de l’hexagone, notamment de Paris, attendaient cette rencontre. D’entrée de jeu, le chef de l’Etat a expliqué les conditions difficiles dans lesquelles il a été porté à la magistrature suprême du «pays des Hommes intègres». «L’insurrection a été faite par des jeunes et des femmes qui voulaient rompre avec l’ancien », a-t-il lancé. Le vin étant tiré, il faut le boire, a-t-il relevé, avant de dire que chaque Burkinabè où qu’il se trouve, doit mettre du sien. Pour lui, le sursaut patriotique doit prendre le dessus, nonobstant les divergences car, personne d’autre ne construira le Burkina Faso à la place de ses filles et fils. A la diaspora de France, le président du Faso a fait savoir que le gouvernement et lui-même, en prenant les rênes, ont trouvé un pays déjà déstructuré sur le plan politique. « Notre première tâche a été de restaurer l’autorité de l’Etat et de stabiliser les institutions », a-t-il affirmé. En deuxième position, ils s’en sont pris aux difficultés économiques. « La santé financière du Burkina était loin dêtre agréable. Nous avons trouvé les caisses vides. Le budget qui avait été arrêté par le gouvernement, accusait un déficit de plus de 300 milliards de F CFA. Mais ce n’est pas là l’essentiel. Le plus urgent était de trouver les fonds nécessaires pour payer le salaire des fonctionnaires. Et franchement, lorsque j’ai vu les états financiers, j’ai eu la plus grande appréhension de ma vie », a regretté Michel Kafando. Mais le plus important aux yeux du gouvernement était de parvenir à honorer les engagements de l’Etat vis-à-vis des fonctionnaires avec le payement des salaires à bonne date. Ce problème a été jugulé grâce au soutien de la communauté internationale, a-t-il expliqué. Le troisième problème auquel le gouvernement s’est attaqué a été la restauration de l’image du Burkina Faso aux yeux de ses partenaires internationaux.
Pourquoi exclure la candidature d’anciens dignitaires ?
Ces questions résolues, la Transition, foi du président Kafando, a commencé à mettre en œuvre son programme d’urgence et à entamer la gestion des affaires judiciaires. « Pour les arrestations, nous avons pris quatre mois à faire des audits. Les investigations nous ont conduits à l’arrestation de certaines personnalités de l’ancien régime », a indiqué le premier magistrat du Burkina Faso. Le deuxième volet a consisté en la mise en place de projets au profit des femmes et des jeunes, porte-flambeau de la révolution d’octobre 2014. C’est ainsi qu’une enveloppe de 26 milliards de F CFA a été mobilisée pour soutenir des projets. A ce titre, il a invité les Burkinabè de l’extérieur, notamment ceux de la France, à soumettre des dossiers avant la fin de la Transition. Le troisième aspect a concerné la prise de mesures pour des élections justes, crédibles et indiscutables. A ce niveau, il a réitéré qu’il n’est pas question de permettre à ceux-là qui ont conduit le peuple à se révolter, d’être candidats. D’où l’élaboration du nouveau Code électoral pour exclure les dignitaires de l’ancien régime qui ont soutenu bec et ongles la modification de l’article 37 de la Constitution. Comme il fallait s’y attendre, l’impossibilité pour les Burkinabè de la diaspora de voter cette année est venue dans les échanges. «Si nous allions tenir compte de vous, il nous aurait fallu mobiliser une enveloppe de 75 milliards de FCFA au lieu de 56 milliards de FCFA. Mais c’est essentiellement pour des questions de sécurité que nous n’avons pas voulu le faire », a justifié le président de la Transition. Après environ deux heures de communion avec ses compatriotes de France, le chef de l’Etat a demandé que les uns et les autres fassent confiance en la Transition et la soutiennent. «J’ai la certitude, que si nous ne réussissons pas à mettre en place une vraie réconciliation au Burkina, nous risquons d’aller à l’éternel recommencement. Nous voulons façonner une nouvelle société démocratique où régnera la justice, la liberté, où les gens se respecteront», a souligné le président. Bien avant cette rencontre, Michel Kafando a échangé avec les consuls honoraires du Burkina Faso en France et en Belgique (six au total, dont cinq de la France et un de la Belgique).
Steven Ozias KIEMTORE à Paris
kizozias@yahoo.fr