Sur appel des leaders des partis de l'ex-opposition et de la société civile, des milliers de manifestants se sont rassemblés à la place de la Révolution, épicentre des manifestations qui ont conduit à la chute du régime Compaoré, pour témoigner leur soutien à la transition en cours. Selon les partis qui ont chassé l’ex président du Faso, le nouveau code électoral est en phase avec les aspirations du peuple. La nouvelle loi électorale n'exclut pas des partis politiques, ni des individus. Il vise à exclure des comportements ignobles. Le peuple peut pardonner ces mauvais comportements, mais impossible de les oublier de sitôt.
Le Parlement intérimaire du Burkina Faso ou Conseil National de la Transition (CNT), a adopté le 7 avril 2014, à une large majorité un nouveau code électoral. Ce nouveau code électoral consacre les candidatures indépendantes et fixe à 25 millions de francs CFA, la caution pour être candidat à la présidentielle. Il prévoit aussi des dispositions contre tous ceux qui ont soutenu le projet de modification de l’article 37 sous Blaise Compaoré et qui a entrainé le soulèvement populaire des 30 et 31 octobre 2014. Selon le gouvernement, ces nouvelles dispositions trouvent leurs explications dans le fait que le peuple, à l’issue de l’insurrection populaire, a exprimé sa volonté de ne plus voir les dirigeants de l’ancien régime qui se sont obstinés à modifier l’article 37 de la Constitution. La deuxième explication est l’application de l’article 25 alinéa 4 de la Charte africaine de la démocratie des élections et de la gouvernance. « Elles ne visent que les personnes qui ont attenté à la constitution jusqu’au bout de l’obstination. Etant donné que les anciens partis, notamment le CDP, ne sont pas exclus du jeu démocratique ». Les partis de l’ex-opposition au Burkina Faso ont annoncé publiquement leur soutien à l’adoption de ce nouveau code électoral. Ainsi, les partis politiques de l’ancienne opposition burkinabè, réunis au sein du Cadre de Concertation de Partis Politiques (CCPP), estiment que le nouveau code électoral « est une suite logique et implacable du processus de l’insurrection populaire ». Convaincus du bien fondé de ce nouveau code électoral, les ex-opposants ont affirmé que les critères d’éligibilité définis par ce code sont des conditions minimales que le peuple s’est donné pour éviter de perpétuer la culture de la présidence à vie, de l’impunité et de la mal gouvernance.
Le parti de Blaise Compaoré saisit la cour de justice de la CEDEAO
Avant le vote au CNT, le président du directoire du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP, ex-parti majoritaire), Léonce Koné, a indiqué que le Parlement intérimaire n'a pas de légitimité pour décider qui est éligible et qui ne l'est pas du fait que ses membres n'ont pas été élus par le peuple. Le jour suivant, les partis de l’ex-majorité au Burkina Faso, réunis sous la bannière des partis signataires de l’Appel à la Mobilisation Patriotique pour une Transition Inclusive et Démocratique (AMPTID), ont décidé de saisir le Conseil Constitutionnel et la Cour de justice de la CEDEAO. L’ex-majorité crie au scandale et dénonce une « dérive totalitaire et populiste ». Confiant quant à l’issue de leur saisine, le porte-parole des partis, Léonce Koné, a déclaré qu’il est « convaincu que nous aurons gain de cause ». Les partis de l’AMPTID ont également annoncé avoir décidé de ne pas participer aux initiatives qui viendront à être prises par la Commission nationale de réconciliation et des réformes (CNRR). Par ailleurs, ils se sont retirés du Conseil national de la Transition, tant « qu’une véritable politique inclusive n’est pas mise en œuvre par les autorités de la Transition ». La situation inquiète la communauté internationale. Certains pays ont appelé au respect de l’esprit de l’inclusion pour des élections apaisées. Le gouvernement a rencontré dans la même semaine les ambassadeurs accrédités au Burkina Faso pour donner des explications et les rassurer.
Les chancelleries occidentales inquiètent
A l’issue des échanges l’ambassadeur de France Au Burkina Faso, Alain Holleville a déclaré que son pays souhaite le respect du calendrier annoncé et le caractère inclusif de la transition pour permettre aux électeurs de juger. « Une transition est un processus fragile. Et jusqu’au bout de la transition, il y aura des hauts et des bas. Ce qu’on souhaite est que d’aucun côté, ne viennent des comportements de nature à la remettre en question, à la fragiliser. Nous sommes des accompagnants et souhaitions être utiles, faire en sorte que la transition puisse passer la main à des élus, qui auront un programme, qui auront la légitimité et qui seront jugés sur leurs actions et que la transition ait ce rôle de passeur, en tenant compte de l’avis de toutes les parties », a souhaité Alain Holleville. Pour l’ambassadeur des USA, Dr. Tulinabo Mushingi, « le principe de base chez nous, c’est que ce soit coordonné, consensuel et inclusif. Ce sont aux électeurs de désigner leurs élus. Donc, s’ils n’aiment pas tel ou tel autre candidat, ils ne voteront pas pour lui. Pour nous donc, c’est l’idée d’inclusion, de coordination, de paix ; qu’on ne divise pas les gens en différents groupes, il revient au peuple burkinabè de décider, les partenaires étant-là pour l’accompagner. Et le peuple burkinabè doit avoir l’opportunité de choisir son candidat, et les candidats doivent venir de toutes les couches sociales de la population », a-t-il précisé.
Abdoul Razac Napon