Les pays du Sahel, en première ligne dans la lutte contre le terrorisme et le trafic de migrants vers l'Europe, se sont engagés jeudi à intensifier leur coopération, en présence du ministre de l'Intérieur français Bernard Cazeneuve.
"Au vu des interactions existant entre ces crimes, seule une action commune de nos pays est à même de relever ces défis", ont pointé les ministres de l'Intérieur des pays du G5 du Sahel (Burkina, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad) dans une "déclaration de Niamey" qu'ils ont tous signée.
"Un pas de plus a été franchi dans la construction de cet espace sur le plan de la sécurité", s'est félicité le ministre nigérien de l'Intérieur Hassoumi Massaoudou en clôture de la réunion.
Le Sahel est l'une des zones les plus pauvres au monde. Ses 137 millions d'habitants y vivent avec des indices de développement parmi les plus bas. Ses Etats peinent à juguler les groupes islamistes tels qu'Aqmi ou Boko Haram.
Les représentants du "G5 Sahel", créé l'an dernier pour contrer la menace terroriste, se sont ainsi engagés jeudi à mettre en place un système de communication informatisé et sécurisé pour échanger des informations.
C'est "la clé de l'efficacité dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée", a commenté Bernard Cazeneuve, invité à cette réunion avec son homologue espagnol Jorge Fernandez Diaz.
"Il était devenu indispensable et même vital que les pays les plus concernés par le phénomène terroriste se mobilisent ensemble pour y répondre", a-t-il assuré.
Des moyens mutualisés et "l'appui de nos partenaires" permettront d'atteindre cet objectif, selon le ministre nigérien. Les contours financiers de la déclaration de Niamey, qui prévoit aussi la création d'un "centre d'études stratégiques", restent encore très flous.
- Mesures 'en amont' sur l'immigration -
En matière d'immigration, les Etats se sont engagés à prendre des mesures "en amont" pour empêcher les migrants d'arriver sur les côtes italiennes.
Le Sahel, vaste étendue désertique aride, constitue l'une des principales routes pour les migrants d'Afrique subsaharienne souhaitant se rendre en Europe. Agadez, la capitale du nord du Niger, est le dernier lieu de regroupement massif de clandestins avant la Libye.
"L'immigration clandestine vers l'Europe n'est pas seulement une tragédie humaine, mais aussi un défi sécuritaire car elle sert de fond de commerce à des organisations criminelles qui en tirent des profits substantiels", a regretté l'envoyée spéciale du secrétaire général des Nations unies pour le Sahel, Hiroute Guebre Sellassié.
Quelque 1.800 personnes sont mortes dans des naufrages en Méditerranée depuis le début de l'année, selon l'Organisation internationale des migrations. De nombreux autres périssent régulièrement dans la traversée du Sahel.
Intensification de la collaboration entre pays source, de transit et de destination, renforcement des capacités des forces de sécurité... les ministres ont aussi convenu d'une coopération renforcée avec les agences européennes Europol (police) et Frontex (patrouille au frontières).
Au delà de la réponse policière, des avancées sont possibles dans le domaine économique, politique ou en matière d'éducation, a observé M. Massaoudou.
"Toutes ces stratégies, nous voulons les discuter avec nos partenaires européens pour casser les filières criminelles en amont, combattre l'immigration clandestine et éventuellement favoriser une immigration légale", a remarqué le ministre nigérien de l'Intérieur.
"Nous souhaitons être dans la solidarité pour les demandeurs d'asile, et dans des politiques partenariales pour les migrants qui relèvent de l'immigration économique" irrégulière, lui a répondu Bernard Cazeneuve.
La réunion du G5 du Sahel a aussi accouché d'une déclaration distincte visant à "prévenir et combattre la radicalisation de l'extrémisme violent" religieux, en contrôlant notamment certains flux financiers.
Jeudi, le mouvement jihadiste Al-Mourabitoune, actif au Sahel et créé par l'Algérien Mokhtar Belmokhtar, a prêté allégeance à l'organisation Etat islamique (EI) dans une déclaration d'un de ses responsables, diffusée par l'agence privée mauritanienne Al-Akhbar.