Les forces de sécurité et les forces vives de la nation se sont retrouveés le samedi 9 mai 2015, à Ouagadougou, pour échanger sur la «montée exponentielle» de l’incivisme et la défiance de l’autorité au Burkina Faso. Placée sous la présidence du Premier ministre Yacouba Isaac Zida et le co-parrainage des autorités coutumières et religieuses, la rencontre a débouché sur la signature d’un pacte républicain de citoyenneté.
Débuté dans la matinée du samedi 9 mai 2015 dans la salle de conférences de Ouaga 2000, le dialogue direct entre les forces de sécurité et les forces vives de la nation sur l’incivisme grandissant au Burkina Faso a accouché d’un pacte républicain de sécurité. Ce document qui a valeur de contrat social a été ratifié par les entités que sont : les organisations de la société civile, les forces de sécurité, les opérateurs économiques et les dirigeants des sociétés industrielles et services. Le pacte républicain de citoyenneté contient douze articles et a, entre autres, pour ambition de contribuer à la promotion de la citoyenneté, de pacifier les rapports entre la population et les forces de sécurité et de faire comprendre aux populations le bien-fondé des interventions de forces de sécurité. « Les lois et règlements, institutions, armoiries et symboles du Burkina Faso seront scrupuleusement respectés par tout citoyen burkinabè et tout étranger présent au Burkina Faso quels que soient son rang, sa classe sociale, sa profession, sa fonction ou sa fortune, son sexe, ses croyances religieuses et ses opinions », stipule l’article1 du pacte.
Dès l’entame des concertations, le ministre en charge de l’Administration territoriale, Auguste Denise Barry, représentant le président de la cérémonie a tiré la sonnette d’alarme sur les actes d’incivisme et de défiance de l’autorité de l’Etat devenus monnaie courante au « pays de Hommes intègres ». « On assiste à une montée exponentielle des actes d’incivisme et de remise en cause quotidienne de l’autorité de l’Etat. A titre indicatif, on ne compte plus le nombre des services de police et de gendarmerie saccagés ou pris d’assaut par des populations, pour exiger la libération d’individus interpellés pour des faits délictueux avérés, sans compter les mairies contraintes de fermer, ou de palais de justice incendiés », a-t-il déploré. Selon lui, même si les actes antirépublicains se justifient en partie par des crimes économiques et de sang du régime déchu, ils ne sauraient persister dans un contexte où l’impératif est d’œuvrer pour bâtir un Burkina de paix, de justice et de stabilité. Le représentant des co-parrains, l’abbé Pierre Claver Bélemsigri a, à l’ouverture des travaux, traduit les remerciements des leaders religieux et traditionnels aux organisateurs pour avoir rassemblé les fils et filles du Burkina Faso dans le souci de renforcer la cohésion sociale à travers une citoyenneté collective.
Des relations orageuses...
Avant de parvenir à la signature du pacte, les participants, environ 400, ont eu droit à une communication du directeur général de la police nationale, Lazare Tarpaga, sur l’état des lieux des relations entre populations et forces de sécurité. Il a indiqué que ces relations sont marquées par des conflits orageux et tumultueux occasionnés par des marches contre les forces de sécurité et des saccages et incendies de services. Comme solutions à ces actes déplorables, le communicateur a souligné la nécessité de rétablir la confiance entre populations et forces de sécurité, de redonner une légitimité aux forces de sécurité et de restaurer l’autorité de l’Etat par la prééminence de la règle de droit. A l’issue de cette communication, les participants, repartis en deux groupes, se sont concertés autour du thème « rôle et responsabilité des forces vives et des forces de sécurité dans l’application des lois et règlements pour la paix et la sécurité ». Ces réflexions ont permis d’identifier un certains nombres de contraintes. Il s’agit notamment de la vulgarisation insuffisante des lois et règlements de l’Etat, du sentiment d’injustice ressenti par les populations dans l’application partiale des lois, de la formation inadaptée des agents de sécurité, de l’ignorance par les populations des attributions et missions des forces de sécurité et de la manipulation des populations. Le ministre Auguste Denise Barry, tout en se réjouissant de la signature du pacte républicain de citoyenneté, a évoqué la question de son application. « Une chose est d’amener un certain nombre de sensibilités à se retrouver et à signer un pacte au nom de l’ensemble des citoyens de notre pays. Une autre est de faire en sorte que cela soit mis en œuvre. Le mécanisme de suivi et d’évaluation qui a été retenu par les participants permettra de suivre l’application du pacte et de prévoir si possible des réajustements », a-t-il dit. Il a souhaité que les populations et les forces de sécurité adhèrent au pacte et se l’approprient pour une véritable promotion de la citoyenneté. Le président du conseil national des organisations de la société civile, Jonas Hien, a exprimé sa satisfaction quant à l’élaboration de ce contrat social. «C’est une très belle initiative que de promouvoir la civisme dans notre pays. Je souhaite que les autres acteurs prennent le relais pour faire accepter ce pacte en termes de communication élargie et de sensibilisation. C’est à ce prix que nous pourrons construire l’unité de notre pays», a souligné M. Hien.
Karim BADOLO