Une fois n’est pas coutume. Les syndicats de la SONABEL ont décidé de donner de la voix face aux multiples délestage auxquels font face les populations depuis quelques années. Ils pointent du doigt la vétusté de certains équipements et les longues procédures de passation de marché ; si fait que, selon eux, ce n’est pas demain la veille que le problème énergétique sera résolu. « Car, disent-ils, « si aucune mesure d’urgence n’est prise, le déficit sera encore plus profond en 2016 ». Lisez donc pour en savoir davantage ?
Depuis quelques années, le service de l’électricité par la SONABEL se traduit par les importants délestages et les diverses difficultés enregistrés dans la fourniture des services de branchements, de dépannages et de règlement de factures, entraînant une grogne sociale caractérisée par de nombreuses plaintes par voie de presse, réseaux sociaux et manifestations de la population et même de sit-in devant le siège de la SONABEL en avril 2014. L’image de la Société a été fortement ternie, malgré toutes les campagnes de communication organisées pour expliquer la situation. Aujourd’hui, il est temps pour nous organisations syndicales de la SONABEL, de porter notre voix, pour passer l’information aux usagers de l’électricité et à toute la population en général.
Du déficit de la production
Le réseau national interconnecté dispose aujourd’hui d’une puissance exploitable d’environ 250 MW, mais au vu de la vétusté de certains groupes et des indisponibilités par manque de pièces de rechange (longues procédures de passation de marché), la puissance disponible est d’environ 160 MW dans les meilleurs moments. Les investissements en matière de production sont faits par l’Etat au regard des importants moyens que cela nécessite. La SONABEL éprouve même du mal à réaliser les extensions dans les quartiers lotis. Si nous partons du principe qu’il faut un Milliard de francs CFA pour produire 1 MW, il faudra investir environs 100 Milliards de francs CFA pour résorber le déficit actuel. Pourtant, rien ne présage une meilleure situation dans un futur proche, les priorités de l’Etat étant tout autre. Si aucune mesure d’urgence n’est prise, le déficit sera encore plus profond en 2016. Les prévisions de solutions les plus proches sont à partir de 2017, avec la réalisation des centrales de Fada (7,5 MW), Ouaga-Est première tranche (50 MW) et Donsin première tranche (50 MW), en plus de l’interconnexion Bolga-Ouaga.
Nous sommes fermement opposés au projet d’installation d’un producteur privé qui doit revendre sa production à la SONABEL. Ce producteur va-t-il bénéficier de la subvention de l’Etat pour son approvisionnement en carburant comme c’est le cas actuellement pour la SONABEL? Sinon le coût de revient de son kWh sera plus élevé que celui de la SONABEL. Nous pensons que cet investissement doit être fait par l’Etat.
De l’énergie solaire
Elle est certes d’un apport important, mais pour la technologie actuellement à la portée de la SONABEL, c’est-à-dire le solaire photovoltaïque, elle permettra de réduire substantiellement les consommations de carburant. Cependant, en raison de l’intermittence de la ressource, les centrales solaires ne contribuent pas à la satisfaction de la demande de pointe; il n’y a d’électricité que quand il y a du soleil. Même les nuages perturbent sa production. Nous sommes donc obligés de maintenir les investissements thermiques et hydro-électriques pour parer à toute éventualité. Aussi sachons que la puissance du soleil qui nous brille n’est pas proportionnelle à sa puissance en électricité, les rendements sont nettement inférieurs, environ 20%. Nous attirons l’attention de l’Etat sur le contrat signé entre la SONABEL et ZINA SOLAIRE (projet WINDINGA) et l’interpelons pour un droit de regard sur le prix de cession de cette production solaire à la SONABEL.
Du déficit financier
Depuis 2011 la situation financière de la SONABEL s’est fortement dégradée car le cout de production du kWh au seul poste combustible (charges de consommation de DDO et FO) est supérieur au prix de vente moyen de l’énergie. C’est dire que les produits que génère l’activité de vente d’énergie de la SONABEL ne lui permettent plus de couvrir les charges de combustibles utilisées pour la production thermique. Ainsi, on enregistre une hausse importante du prix de revient de l’énergie électrique pendant que son prix de vente reste figé depuis 2006. A partir de 2011, la forte hausse des charges de combustibles a conduit à un prix de revient largement supérieur au prix de vente (la SONABEL vent à perte) :
- 2011, prix de revient de 1 kWh = 158 F CFA; prix de vente moyen de 1 kWh = 138 F CFA
- 2012, prix de revient de 1 kWh = 160 F CFA; prix de vente moyen de 1 kWh = 138 F CFA
- 2013, prix de revient de 1 kWh = 138 F CFA; prix de vente moyen de 1 kWh = 125 F CFA
- 2014, prix de revient de 1 kWh = 140 FCFA; prix de vente moyen de 1 kWh = 127 F CFA
Les charges de combustibles sont passées de 20,8 milliards de FCFA en 2006 à 59,1 milliards de F CFA en 2013. Ces montants représentent respectivement 35% et 52% des recettes de ventes d’énergie et des primes fixes. Cela signifie qu’actuellement, plus de la moitié des recettes de la SONABEL sont absorbées par les charges de combustibles.
D’autres études révèlent diverses causes des difficultés de l’entreprise :
- Investissements à caractère politique non rentables, affectant la trésorerie et la rentabilité;
- Difficultés de recouvrement des créances des administrations publiques et des collectivités locales;
- Retards très importants dans le paiement des subventions;
- Lenteurs administratives dans la procédure des passations des marchés engendrant une mauvaise qualité des services offerts par l’entreprise.
De la subventions dites d’équilibre de l’Etat
Ces subventions dites d’équilibre, restent virtuelles et n’ont pour objectif, que de permettre à la société de satisfaire les exigences des Partenaires Techniques et financiers plutôt que de retrouver son équilibre financier. Allez-y comprendre comment ces subventions qui figurent aux bilans de l’entreprise lui sont versées (cf. tableau). Les montants des subventions d’équilibre ont été déterminés à partir du modèle financier de la SONABEL.
Nous en appelons à la responsabilité de l’Etat pour que des mesures idoines soient prises afin, non seulement, de permettre à la SONABEL de s’approvisionner en carburant et de constituer des stocks, mais aussi de pouvoir maintenir un équilibre financier tout en gardant le prix du kWh à un coût supportable par les populations.
L’électricité est un droit et non un luxe.
Ont signé
C/CGTB
Lassina DAHOUROU
SNTS
Mahama WUNGRANA
S/STOB
Francis ZAGRE