Suite à l’élection présidentielle togolaise du 25 avril 2015, Lucien Ouédraogo, chargé de programme démocratie, droits humains et genre à Diakonia se prononce sur ce scrutin et l’expérience qui peut en être tirée au profit de l’organisation des prochaines présidentielle et législatives couplées au Burkina. L’homme était à la tête d’une délégation, composée, entre autres, de Mariam Liéhoun du Groupe d’étude et de recherche sur la démocratie et le développement économique et social (Gerddes)- Burkina et de Abdoul Karim Saidou du Centre pour la gouvernance démocratique (CGD).
Fasozine: Quel était le but de votre mission au Togo?
Lucien Ouédraogo: En organisant cette mission, la délégation voulait voir comment étaient organisées les élections d’une part et d’autre part comment la société civile togolaise organise des élections apaisées, crédibles et qui respectent les nommes internationales. Nous avons donc pu faire le tour de bureaux de vote de la ville de Lomé et nous notons qu’il y avait une participation moyenne de la population togolaise. Beaucoup d’électeurs n’arrivaient pas à retrouver leurs noms sur les listes dans les bureaux de vote, ce qui nous a emmené à penser que si le taux de participation attendu n’est pas atteint, cela pourrait être l’une des raisons.
C’était à une grande échelle cette anomalie?
Cette anomalie était perçue dans pratiquement tous les bureaux de vote où nous sommes passés. Des personnes nous ont même demandé ce que l’on pouvait faire dans une telle circonstance. Il semble que la CENI (Commission électorale nationale indépendante, NDLR) aurait mis à la disposition de la population un numéro vert où elle pouvait appeler. Encore fallait-il connaitre ce numéro et pouvoir l’appeler! Je pense que les autorités devraient travailler sur ce point pour les prochaines élections.
Que pensez-vous du rôle de la société civile dans l’organisation de cette élection?
Pour ce qui concerne la partition de la société civile, nous avons voulu nous inspirer de l’expérience de la Concertation nationale de la société civile togolaise qui a mis en place un dispositif de veille électorale. Il s’agissait pour cette structure d’avoir des observateurs sur le terrain pour faire remonter les observations qui seront analysées sur une plateforme. Ce qui devrait permettre au citoyen togolais de suivre le déroulement des élections à partir de ce site. Si nous avons voulu nous intéresser à cette expérience, c’est que pour les élections législatives du 11 octobre 2015, Diakonia avec l’appui de ses partenaires de mise en œuvre du programme d’appui au processus électoral, veulent mettre ce dispositif en place. Du reste, nous avons pu nous imprégner déjà, de l’expérience du Sénégal, du Mali et nous avons voulu voir comment cela se passe au Togo.
Est-ce que il y a des aspects de cette expérience togolaise que vous allez pouvoir appliquer au Burkina Faso?
Pour ce qui concerne la mobilisation nous allons voir concrètement avec la Céni, ce qui est fait à ce niveau. Comment par exemple le citoyen qui n’arrive pas à lire peut retrouver son bureau de vote. Il s’agira notamment de simplifier les choses pour le citoyen qui a sa carte d’électeur afin qu’il puisse accomplir son devoir. Egalement, au niveau du dispositif de veille électorale, à partir de l’expérience togolaise, nous faisons le constat qu’il nous faut une meilleure organisation si nous voulons que la plateforme soit efficiente. Car si la préparation n’est pas pointue alors nous ne pourrons pas disposer des données en temps réel. Pourtant le but de se dispositif est de donner des données fiables en temps réel, pouvoir faire des analyses et prendre des mesures collectives. C’est sur l’ensemble de ces aspects que nous allons travailler.
«Une meilleure préparation» est-ce à dire que ce travail sera confié à des professionnels?
Nous savons que nous n’avons pas l’expertise requise pour faire ce travail très technique. Donc au lieu de vouloir le faire nous-mêmes nous avons passé un contrat avec une structure «One World» qui a piloté le dispositif sénégalais qui fut une réussite en la matière. Il s’agit donc de confier ce travail à des experts et de travailler en étroite collaboration avec tous les acteurs, que ce soit la société civile ou les partis politiques, pour la réussite de cette expérience. Sans cette collaboration les acteurs eux-mêmes ne maitriseront l’outil et il ne faut pas être étonné si le résultat attendu n’est pas au rendez-vous. Mais cette communication étroite devrait nous permettre de réussir ce projet.
Propos recueillis par Morin YAMONGBE