A l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, le Centre national de presse/Norbert Zongo a organisé le samedi 2 mai 2015 à Ouagadougou, un panel sur le thème : «Médias d’Etat ou de service public : état des lieux ou service public». Au cours de ce panel, il a été procédé au lancement du prix Norbert Zongo.
Ils étaient trois panélistes du monde de la communication et du droit à débattre du thème : «Médias d’Etat ou de service public : état des lieux ou service public» entrant dans le cadre de la Journée mondiale de la liberté de la presse, le samedi 2 mai 2015 à Ouagadougou. Il s’agit du directeur de l’Institut panafricain d’étude et de recherche sur les médias, l’information et la communication (IPERMIC), Serge Théophile Balima, du président de l’Observatoire burkinabè des médias, Jean Baptiste Ilboudo et de l’avocat, Me Prosper Farama. Pour le Pr Serge Théophile Balima, parlant des médias d’Etat, il faut remonter le cours de l’histoire avec la période coloniale où le fonctionnement de l’administration était basé sous un système pyramidal. Les Etats ayant accédé à l’indépendance ont selon lui, hérité de ce mode de gestion et les médias n’ont pas échappé à cette règle. De ce fait, a-t-il fait savoir, ils se trouvent en porte-à-faux avec la théorie libérale de la presse. «Parce que cette dernière est définie comme l’absence de tout contrôle extérieur des entreprises de presse», a-t-il indiqué. Selon lui, la notion de média d’Etat implique au premier chef, la responsabilité de l’Etat qui doit garantir l’expression de l’intérêt général et garantir les organes qu’il contrôle. Mais le directeur de l’IPERMIC fait remarquer que cette vision est assez autoritaire parce que c’est une restriction dite raisonnable de la liberté d’expression, à travers un système de régulation politico administrative des médias d’Etat d’où, a-t-il poursuivi, la création des ministères de l’information ou de la Communication qui sont en réalité des noms de baptême. «Dans ce cas, il faut que le ministre de la Communication se transforme en gendarme. Ce qui fait que la critique faite aux médias d’Etat laisse entendre que ce sont des outils de propagande au service des intérêts du pouvoir en place», a-t-il relevé.
Les impératifs d’un média de service public
Embouchant la même trompette, le président de l’Observatoire burkinabè des médias (OBM), Jean Baptiste Ilboudo, souligne qu’étant donné que le ministre de la Communication détient le pouvoir de nomination des responsables de médias publics, (Sidwaya et RTB), il dispose d’une certaine autorité sur ces responsables et cela crée toujours un lien de dépendance. Pour lui, les médias d’Etat ne sont pas encore des médias de service public dont la caractéristique essentielle est l’indépendance vis-à-vis du pouvoir en place. «Un média de service public doit respecter les impératifs suivants : l’indépendance vis-à-vis du gouvernement, le respect de la liberté d’expression, la satisfaction du droit à l’information, à l’égal accès des différentes composantes de la société aux médias, l’observation stricte des principes de pluralisme et d’équilibre de l’information, le respect des diversités culturelles et la protection des droits des minorités. Voilà un certain nombre d’impératifs des médias de services publics qu’on a de la peine à retrouver dans les médias d’Etat», a-t-il expliqué. Et l’avocat Me Prosper Farama de poser la problématique en ces termes : «Comment et qui détermine la ligne éditoriale des médias d’Etat? Les médias d’Etat en tant qu’émanation de l’Etat donc, propriété de l’Etat, peuvent-ils ou doivent-ils avoir une indépendance éditoriale ? Comment mettre en application cette indépendance ? Est ce que les médias d’Etat peuvent traiter l’information de manière neutre et indépendante de la même façon qu’un organe privé»? De l’avis de Me Farama, ces questions n’ont jamais connu de réponse. Si les lignes ont sensiblement bougé comme le constate le Pr Balima, avec le mode de désignation du directeur général de la Radiodiffusion télévision du Burkina (RTB), le président de l’OBM salue les réformes majeures envisagées par les autorités de la transition à travers la création de la sous-commission médias. Me Prosper Farama à quant à lui insisté sur la création d’un statut conséquent pour le personnel et permettre une autonomie financière des médias d’Etat. «Le fait qu’ils (les agents, Ndlr) soient fonctionnaires, il y a une dépendance morale vis-à-vis de la Fonction publique … qui dirige leur carrière», a-t-il proposé. Le panel a servi de cadre au lancement de la 5e édition du prix Norbert Zongo. Les catégories retenues sont la presse écrite, la radio et la télévision et les œuvres concernées doivent être publiées ou diffusées entre le 3 mai 2013 et le 3 mai 2015.
Paténéma Oumar OUEDRAOGO