Il n’ y a rien de plus sacré dans les pays d’Afrique francophone que les lieux de culte. En tout cas, c’est ce que l’on croyait jusqu’à ces malheureux incidents, survenus récemment à Zinder au Niger. Certes, par le passé, dans ce pays à plus de 90% musulman, certains écervelés avaient brisé cette règle non écrite de non- agression entre religions. Mais jamais ce ne fut aussi violent et haineux, comme nous l’ont laissé voir les événements de Zinder. Doit-on pour autant continuer de classer ce genre de barbarie dans le simple registre des réactions épidermiques idiotes et spontanées de personnes manipulées ou incontrôlées ?
Visiblement, il faut cesser de regarder ces dérives religieuses par le petit bout de la lorgnette. Car les temps ont changé. La donne aussi. Le Niger est désormais cerné par l’intégrisme religieux avec les groupes qui écument le Nord-Mali et le Nord-Nigeria. Dans cette dernière région, Boko Haram a dans la panoplie de son mode opératoire, l’incendie d’églises. Les autorités, si elles ne l’ont pas encore fait, doivent impérativement s’assurer que le venin de Boko Haram n’est pas déjà sécrété au sein de certains groupes musulmans au Niger, notamment dans la région de Zinder qui fait frontière avec le terrain de chasse de Boko Haram. On le sait, ce mouvement veut transformer le Nigeria en une nécropole pour les chrétiens et s’en donne les moyens. Depuis quelques mois, les attentats se succèdent, dans une cadence infernale, sans que les autorités ne puissent les arrêter. C’est dire à quel point il est important d’anticiper sur la menace que constituent ces fous de Dieu. Certes, depuis l’éclatement de la crise malienne, le Niger a fait montre de fermeté face aux réseaux terroristes du Nord-Mali. Mais il doit redoubler aussi de vigilance sur sa frontière nigériane, car son image d’un pays tolérant envers les minorités religieuses risque d’en prendre un coup. En effet, comme dans bon nombre de pays de la sous-région, la tolérance religieuse a rarement été prise à défaut. Le dialogue interreligieux est en permanence entretenu par les leaders religieux, en vue d’une cohabitation harmonieuse entre communautés. Mais cette tranquille ambiance est de plus en plus remise en cause par l’expansion de certaines sectes extrémistes. D’où la nécessité pour les autorités de changer de paradigme en matière de tolérance des actes anti-religieux. On ne peut plus continuer à fermer les yeux sur tout, au prétexte que tout ce qui touche au religieux est sensible. Une nouvelle législation s’avère de plus en plus nécessaire, pour adapter les lois à la nouvelle donne et permettre aux différentes structures compétentes d’agir quand il le faut. Personne ne crierait au scandale si certains agissements de nature à utiliser la religion pour troubler la paix sociale étaient criminalisés. Il ne s’agit pas de porter atteinte à la liberté de culte ou d’expression, mais de barrer la route à tous ceux qui lisent à l’envers les livres saints. Ce sont de vrais dangers pour nos sociétés, comme on le voit au Nord- Mali et au Nigeria. Alors Nigériens, vigilance !