Le nouveau code électoral adopté par le Conseil national de la Transition (CNT), le 7 avril dernier constitue, selon les partis politiques appartenant à l’ex-majorité, une violation flagrante et outrancière de la Constitution burkinabè par son caractère exclusif. Cette position a encore été réitérée, lors d’un point de presse, le mercredi 15 avril 2015, à Ouagadougou. Afin d’annuler ledit code, l’ex-majorité a déclaré avoir déposé un recours devant le Conseil constitutionnel et entend saisir la Cour de Justice de la CEDEAO. A propos des arrestations en cours, Léonce Koné, les a jugées arbitraires et politiques, à travers des procédures hâtives et bâclées.
Le 7 avril 2015, le CNT, organe législatif de la Transition a adopté un nouveau code électoral. Son article 135 stipule que : « Sont inéligibles toutes les personnes ayant soutenu un changement anticonstitutionnel qui porte atteinte aux principes de l’alternance démocratique, notamment au principe de la limitation du nombre de mandat présidentiel ayant conduit à une insurrection populaire et d’autres formes de soulèvement ».
Si les partis affiliés à l’ex-CFOP et les organisations de la société civile ont salué l’adoption de ce code électoral, les partis appartenant à l’ex-majorité l’ont toujours décrié. Pour ces derniers, il (le code électoral) constitue une négation du principe de l’inclusion et de l’idée de réconciliation. Lors d’un point de presse animé, le 15 avril dernier, le CDP et ses alliés ont réaffirmé le caractère exclusif du code électoral et entendent rentrer en résistance face « aux dangers avérés qui menacent la stabilité du pays ».
Ces formes de résistance sont déjà actives et d’autres déjà en perspectives devant les juridictions nationale et sous régionale. « Parce que nous voulons accorder un préjugé d’indépendance et d’impartialité aux juridictions de notre pays, nous avons déposé un recours contre la révision du code électoral devant le Conseil constitutionnel », a indiqué Léonce Koné, président du directoire du CDP, dans sa déclaration liminaire. Il a poursuivi « Parallèlement à cette démarche et tenant compte du calendrier électoral, nous déposerons également un recours devant la Cour de Justice de la CEDEAO ».
A la question de savoir la suite à donner à la lutte, si toutefois ces différentes juridictions ne leur donnent pas satisfaction, les conférenciers ont dit être convaincus de leur démarche. « Nous avons des juristes dans nos rangs et nous restons confiants que notre démarche va aboutir. Quand même, si nous ne trouvons pas satisfaction, nous allons prendre acte ».
Les interpellés soumis à des traitements humiliants et dégradants
Pour ce qui est de l’opération mains propres engagées par les autorités de la Transition, l’ex-majorité a souhaité l’extension du terrain de la justice. « Il n’y a pas de raison que le champ des investigations soit limité aux membres du dernier gouvernement de l’ancien régime. L’ancien régime s’étend à toutes les personnes qui ont eu à collaborer au cours des 27 dernières années avec le Président Blaise Compaoré », a précisé Léonce Koné.
Les arrestations ‘’arbitraires et systématiques’’, ont déploré les animateurs du point de presse, obéissent à une logique de déstabilisation des partis politiques qui sont visés précisément par la loi d’exclusion. Ces arrestations, de leur avis, n’a pas suivi les voies légales et certaines personnes interpellées ont été traitées de façon inhumaine.
« Il s’agit d’arrestations politiques, parce que de l’aveu des agents de la police et de la gendarmerie, certaines personnes ont été soumises à des traitements volontairement dégradants et humiliants, dans le seul but d’assouvir des revanches mesquines ». Ces traitements dégradants, ont-ils rappelé, ont consisté à l’obligation desdits interpellés de passer la nuit à même le sol. Compte tenu de la situation actuelle du CDP, le parti a reporté son congrès pour le 9 au 10 mai prochain.
Des menaces à l’encontre des députés de l’ex-majorité
Dans la logique de la résistance, les partis signataires de l’appel du 9 avril 2015 qui sont représentés dans le groupe ARD (Alliance républicaine et démocratique) du CNT ont demandé à leurs députés de suspendre leur participation aux activités du CNT. Cependant, l’on a constaté que lesdits députés sont toujours présents lors des plénières. Vos députés participent-ils aux activités du CNT, parce qu’ils touchent 800 000/mois? A cette question, les conférenciers ont expliqué que les députés ont la latitude de manifester la protestation du code électoral par les initiatives concertées qu’ils jugeront appropriées. Cette bataille, au sein du CNT, ont-ils insisté, peut également se faire à travers des boycotts. « Ils peuvent choisir de se retirer ostensiblement des séances plénières, après l’appel de leurs noms ». « Les petits sous que constituent les 800 000 ne peuvent pas maintenir nos députés au CNT », a précisé René Emile Kaboré du Rassemblement pour le sursaut des démocrates (RSR). Par ailleurs, les animateurs du point de presse ont déploré des pressions faites à leurs représentants au sein de l’organe législatif, par le Président du CNT. « Il nous est revenu que nos députés ont fait l’objet de pressions insistantes de la part du CNT pour les amener à renoncer à toute démarche de protestation », s’est indigné Léonce Koné: « Il est inadmissible pour le Président d’une institution parlementaire de convoquer des députés et de chercher à influer sur leurs prises de position politiques par des menaces à peine voilées ».
« La demande d’extradition de Blaise Compaoré par le MBDHP est une déclaration pour la galerie »
En ce qui concerne une éventuelle extradition du président déchu, Blaise Compaoré, exigé par le MBDHP (Mouvement burkinabè des droits de l’homme et du peuple) l’ex-majorité, par la voie des conférenciers, se dit être sereine, dans la mesure où Blaise Compaoré bénéficie d’une amnistie. « Nous sommes dans un contexte assez agité de la transition où des mouvements de la société civile font des déclarations pour la galerie. Parce qu’il est évident que la demande d’extradition n’aura aucune suite. De par la Constitution de notre pays, le président Blaise Compaoré bénéficie d’une amnistie. Je ne vois pas à quel titre et pour quel chef d’accusation on pourra engager des poursuites contre lui. C’est un jeu de posture qui ne nous impressionne pas du tout », a indiqué Léonce Koné1
Par Lassané SAWADOGO