Le parti fondé par Blaise Compaoré a annoncé en début de semaine qu’il s’opposerait « vigoureusement » au vote, mardi, d’un projet de loi qui prévoit d’exclure les proches du président déchu des élections d’octobre au Burkina Faso. Le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) ne pourra faire barrage à ce texte car l’ancienne majorité ne compte que 10 députés sur les 90 du Conseil national de transition (CNT), l’assemblée intérimaire.
Le CDP s’opposera « vigoureusement », « par tous les moyens légaux et pacifiques », à ces « initiatives liberticides », seul ou avec les « forces politiques et sociales alliées », a déclaré le président de son directoire, Léonce Koné, lors d’une conférence de presse. Des appels à manifester mardi ont été lancés par des organisations de la société civile soutenant M. Compaoré. Mais le ministre de la Sécurité, Auguste Denise Barry, dans une note rendue publique lundi, a « mis en garde » les « instigateurs de troubles », menaçant d’interpellation toute personne « coupable de trouble à l’ordre public, d’atteinte à la sécurité des personnes et d’atteinte à la sûreté de l’Etat ». « Des sommes d’argent sont distribuées pour inciter les populations à participer aux manifestations et aux mouvements sociaux, comme cela avait cours sous l’ancien régime », a assuré le ministre, affirmant que des députés ont été « ouvertement menacés ».
L’assemblée intérimaire n’a « aucune légitimité pour décider (...) qui est éligible et qui ne l’est pas au Burkina Faso, pour la bonne et simple raison que ses membres n’ont eux-mêmes pas été élus par le peuple », a estimé le responsable du CDP, Léonce Koné. Le CNT a été mis en place après la chute fin octobre de Blaise Compaoré. Le mandat de ses députés prendra fin après les élections présidentielle et législative, dont le premier tour est prévu le 11 octobre. Le projet de loi, proposé par le gouvernement et amendé par des députés issus de la société civile et de l’ex-opposition, majoritaires au Conseil national de transition (55 membres sur 90), vise à modifier le code électoral.
Il prévoit « d’exclure de toutes les élections tous les membres du dernier gouvernement du président Compaoré et toute personne qui a soutenu ouvertement ou publiquement la modification de l’article 37 de la Constitution” ». Blaise Compaoré, par sa volonté de réviser cet article afin de se maintenir au pouvoir, avait provoqué fin octobre une insurrection populaire qui l’avait contraint à démissionner. Le projet de loi est un « projet de confiscation du pouvoir par des groupuscules d’activistes », a encore dénoncé le patron du CDP, qui accuse ses auteurs de « fabriquer des lois à la sauvette dans le but manifeste de biaiser le vote des électeurs ».
Le texte doit impérativement être adopté avant le 11 avril, les textes de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’ouest (Cédéao), dont le Burkina est membre, n’autorisant la modification d’une loi électorale que jusqu’à six mois avant la date d’un scrutin. Les députés de l’ex-opposition et de la société civile veulent également modifier le code militaire burkinabè. Pour faire acte de candidature à une élection, un membre de l’armée devra en avoir « démissionné cinq ans auparavant », ont-ils affirmé à l’AFP. Cette mesure vise clairement le général Djibrill Bassolé, ancien chef de la diplomatie de Blaise Compaoré, qui s’est récemment mis en disponibilité de l’armée pour se présenter à la présidentielle.