La loi portant modification du code électoral burkinabè a été adoptée, le mardi 7 avril 2015, en marge de manifestations autour du CNT. Cette loi qui a été promulguée quelques jours plus tard par le président Michel Kafando exclut notamment les personnes ayant pris part au dernier gouvernement de Blaise Compaoré et qui se sont prononcées pour la modification de l’article 37. Si à Ouagadougou, les avis sont partagés, à Abidjan, tous sont unanimes. Pour les Burkinabè vivant en Côte d’Ivoire, il faut trouver une solution pour éviter que le Burkina ne connaisse « le chaos » que la Côte d’Ivoire a vécu pour « cette même histoire d’exclusion » qui s’appelait alors « Ivoirité ».
Youssouf Ouédraogo, agent de mairie
« La seule solution, c’est que tous les candidats participent sans discrimination »
« Nous ne sommes pas pour la loi votée le mercredi dernier. Nous pensons que pour une bonne réconciliation au Burkina Faso, on doit laisser tous les candidats et tous les partis politiques se présenter aux élections législatives et présidentielle. Cela, même s’ils ont travaillé avec Blaise Compaoré. Nous disons cela parce que nous voulons une réconciliation vraie au Burkina Faso pour ne pas qu’il y ait d’autres problèmes plus tard, à l’issue des élections. La seule solution, c’est que tous les candidats participent sans discrimination. »
Yacouba Ouédraogo, imprimeur
« Si on doit assainir, il faut commencer du haut jusqu’en bas »
« Mon seul problème concernant cette loi, c’est que les choses ne se passent pas comme en Côte d’Ivoire où l’exclusion a provoqué beaucoup de choses. Nous sommes en Côte d’Ivoire depuis longtemps et nous savons ce que ce genre de lois a créé en Côte d’Ivoire. Ici, ça a commencé par « l’ivoirité ». Or cette loi d’exclusion est pareille que l’Ivoirité. Le CDP est profondément implanté. Si les choses ne sont pas bien jonglées, ses partisans ou ses militants peuvent se venger. Car, ceux qui sont sortis du pays peuvent revenir se venger comme ce qui est arrivé en Côte d’Ivoire. Surtout que Blaise Compaoré lui-même est en Côte d’Ivoire. Ça fait donc un peu peur. On parle d’assainissement, mais et les gens du MPP ? Ils sont aussi concernés pas l’assainissement. Car, ils ont aussi travaillé avec Blaise Compaoré. Ils se reprochent aussi beaucoup de choses. Si on doit assainir, il faut commencer du haut jusqu’en bas. Même Yacouba Isaac Zida doit se reprocher quelque chose pour avoir aussi travaillé avec Blaise Compaoré. 27 ans de pouvoir, ce n’est pas 27 jours. Nous avons peur parce que si les choses se gâtent ici, nous pouvons aller au Burkina. Mais, si les choses se gâtent au Burkina, ce sera difficile de rester ici. Pendant la crise ici, nous sommes allés nous refugier au Burkina parce que nous avons des biens là-bas. »
Moussa Zallé, président du collectif des associations et mouvements de jeunesse burkinabè en Côte d’Ivoire
« Nous demandons au CNT et au gouvernement de Transition de revoir leur copie »
« En tant qu’organisation de la société civile qui plaidons pour le droit, nous disons aux autorités de la Transition et au CNT de revoir leur copie. Notre pays est présentement dans une situation difficile. Nous souhaitons tous qu’il y ait une sortie de crise heureuse au Burkina, qu’il y ait des élections inclusives dans notre pays pour qu’il aille plus tôt à la réconciliation. Cette loi qui vient d’être votée et promulguée par le président du Faso ne peut pas unir les Burkinabè. Mais, plutôt les diviser. Nous avons vu l’exemple dans certains pays où ce genre de lois a provoqué pas mal de conflits. Nous, la diaspora, qui souhaitons que le Burkina Faso soit unifié et aille le plus tôt à la réconciliation, demandons au CNT et au gouvernement de Transition de revoir leur copie pour qu’il y ait une politique d’inclusion. »
Edouard Sama, particulier
« Ils doivent s’asseoir et discuter pour trouver un terrain d’entente »
« Nous avons appris ici le vote de cette loi. C’est vraiment un peu difficile. Mais, nous pensons que cette loi est à revoir. Parlant de démocratie, il faut qu’ils essaient de revoir cette loi pour que le Burkina ne tombe pas dans le chaos. Nous avons vu ce qui s’est passé en Côte d’Ivoire et nous ne souhaitons pas que ce genre de choses arrive au Burkina. Je pense qu’ils doivent s’asseoir et discuter pour trouver un terrain d’entente pour éviter le chaos. »
Propos recueillis à Abidjan par Philippe Bouélé BATIONO