Le Mali est en guerre, mais le réalisateur malien Ibrahima Touré reste optimiste pour le cinéma : « Je suis un Sahélien, au Sahel, sans espoir, on y meurt. » La Toile d’araignée, en lice pour l’Etalon d’or du 23e Fespaco, montre le combat d’une femme qui refuse d’épouser le mari choisi par ses parents. Malgré la pression du village et les tortures et brimades au commissariat et en prison, elle reste fidèle à son rêve et à son amoureux. Tourné en six semaines avec un seul acteur professionnel et un petit budget de 180 millions francs CFA (274 000 euros), il se confronte aux problèmes existentiels du Mali.
RFI : De quelle toile d’araignée parle-t-on ? De la résistance, de l’oppression ?
Ibrahima Touré : La toile d’araignée, c’est la société. C’est l’individu qui n’est plus dans une toile, une fois qu'il naît. Dès sa naissance, il doit obéir sans rechigner à ses parents, à son chef du quartier, à son chef de village, à l’autorité. C’est l’immense toile qui enveloppe l’individu dès sa naissance. Il n’a pas le droit à la parole, à dire ce qu’il pense. En fait, c’est la dictature faite par les hommes sur les hommes.
Le Mali est aujourd’hui en guerre. De votre film, on sort interloqué, on a le sentiment d’avoir assisté à une guerre de la société.
Oui, malheureusement c’est ça. L’histoire du livre que j’ai adaptée, elle s’est passée en 1974. C’est aberrant, ce qu’on montre dans le film est toujours une réalité au Mali et en Afrique. Les droits des individus sont toujours réprimés et les tenants du pouvoir restent au pouvoir. Ils refusent la gouvernance, ils refusent l’alternance. C’est un problème qui mine l’Afrique.
Vous dénoncez l’oppression et le viol des femmes, la corruption de la justice, de la police et du militaire, mais qui au Mali va pouvoir regarder ce film ?... suite de l'article sur RFI