L’adoption de la loi sur les conditions d’éligibilité aux prochaines élections fait aussi bien des heureux que des mécontents. Dans cet écrit, Issaka Kaboré, ancien conseiller de l’ex-secteur 10 de Ouagadougou, appelle à la raison ceux qui sont favorables à l’exclusion de certains Burkinabè aux elections, car le Conseil constitutionnel existe pour la validation des candidatures.
Peuple du Burkina Faso, les événements des 30 et 31 octobre 2014 ont causé d’énormes dégâts : des pertes en vies humaines, des blessés, des biens privés et publics pillés, saccagés ou brûlés. Le Burkina n’avait jamais connu ni imaginé un tel degré de violence. En dépit de la violence du traumatisme qui a ébranlé chaque Burkinabè au plus profond de lui-même, il convient de remercier les différentes confessions qui, par leurs prières, ont permis d’éviter le pire. Cependant, depuis lors, nous assistons avec inquiétude à une prolifération de propos haineux et d’exclusion, de violences verbales et de menaces de la part de certains Burkinabè sur d’autres. C’est pourquoi nous voudrions, humblement, attirer l’attention des autorités politiques et religieuses des organisations de la société civile et de tous les Burkinabè sur la gravité de la situation et appeler chacun à bannir l’exclusion et la vengeance car, comme le dit une sagesse africaine, «Les chemins de la vengeance sont comme ceux des forêts. On les suit pendant longtemps avant de se rendre compte qu’ils ne mènent nulle part et qu’on s’est égaré».
Rappelons-nous toujours cette citation de Mahatma Gandhi : La règle d’or de la conduite est la tolérance mutuelle, nous ne penserons jamais tous de la même façon, nous ne verrons qu’une partie de la vérité et sous des angles différents». Aussi voudrions-nous interpeller les autorités compétentes afin que des mesures urgentes soient prises pour assainir l’ambiance communicative très indigeste dans laquelle nous nageons et qui connaîtra un pic durant la campagne électorale, avec un risque évident de dérapage. Chacun doit soigner son langage au nom de la paix et de la cohésion sociale. Jean Paul Sartre, philosophe français (1905-1980), nous interpelle en ces termes : «Les paroles sont des pistolets chargés». Il suffit d’une mauvaise manipulation et l’irréparable peut se produire.
Tous ceux qui appellent à exclure certains Burkinabè des élections, nous voudrions les appeler à la raison car le Conseil constitutionnel existe pour la validation des candidatures en fonction des textes et lois électorales burkinabè. Concernant la candidature de militaires, nous pensons que les débats y relatifs sont inappropriés car ce sont les valeurs intrinsèques du candidat qui importent et non le corps auquel il appartient. Avant d’être militaire, enseignant, économiste, agent de santé, etc., chacun a reçu un potentiel moral lors de son éducation. Aucun corps ne forme des dictateurs et aucun autre n’a le monopole de la bonne gouvernance. Alors, élevons un peu le niveau des débats. Tous les acteurs de l’environnement politique actuel que sont les dirigeants de la transition, les membres de la Commission nationale de réconciliation et des réformes, les responsables des partis politiques, les organisations de la société civile, nous voudrions les inviter à méditer régulièrement ces citations pleines de sagesse et d’enseignements pour tout décideur :
«Un état d’esprit, non des lois, voilà ce que réclame le monde ; une réforme mentale plus qu’une réforme matérielle. Il ne faut pas rêver d’installer les hommes dans une règle qui leur impose le bonheur, mais de leur suggérer un état d’esprit qui comporte le bonheur» (Maurice Barres, homme politique français 1862-1923)
«Le secret du changement consiste à concentrer son énergie pour créer du nouveau et non pour se battre contre l’ancien.» (Dan Millman, écrivain américain né en 1946)
3- «Nul homme qui aime son pays ne peut l’aider à progresser s’il ose négliger le moindre de ses compatriotes» (Nelson Mandela)
4- «Vous obtiendrez plus dans ce monde avec le pardon qu’avec des actes de représailles» (Nelson Mandela)
Concernant tous les partis politiques et les organisations de la société civile, notre désir est qu’ils n’oublient jamais cette pensée de Martin Luther King : «La non violence est une arme puissante et juste, qui tranche sans blesser et anoblit l’homme qui la manie. C’est une épée qui guérit».
Nous les invitons aussi à méditer ce comportement des loups, être privés de conscience et de raison mais doués d’un sens élevé du vivre-ensemble qui interpelle les humains. En effet, il est constaté par des chercheurs que quand deux loups se battent pour l’acte sexuel, le vaincu se couche et tend sa gorge au vainqueur pour qu’il l’arrache, mais celui-ci l’épargne et va accomplir ce pour quoi il se battait. Le combat qu’ils menaient n’avait donc pas pour but d’anéantir l’autre, mais un objectif bien précis au-delà duquel tout acte violent n’a aucun sens. Les humains que nous sommes, être dotés de conscience et de raison par excellence, sont-ils prêts à épargner les gorges de leurs adversaires ?
Responsables et militants de l’ancienne majorité, nous les prions de s’approprier cette pensée de Winston S. Churchill, ancien Premier ministre britannique (1874-1965) : «Tous les hommes font des erreurs, mais seuls les hommes sages apprennent de leurs erreurs», de celle du Dallai Lama, guide spirituel tibétain : «Lorsque vous échouez, n’échouez pas la leçon» mais aussi celle de Nelson Mandela : «Le monde ne sera pas construit par ceux qui restent à l’écart les bras croisés, mais par ceux qui sont dans l’arène, les vêtements réduits en haillons par la tempête et le corps mutilé par les événements».
Peuple burkinabè, nous souhaiterions que tu aies en permanence à l’idée cette pensée d’Oscar Wilde, écrivain britannique (1854-1900) : «Seuls les faibles mettent des années à s’affranchir d’une émotion. Celui qui est maître de soi peut étouffer un chagrin aussi aisément qu’inventer un plaisir». Tu as démontré que tu es maître de toi-même. Alors, bannis l’exclusion, la vengeance et la violence, élève-toi davantage et de façon solidaire, avance pour ton développement intégral. Nous t’invitons à abreuver ton âme, à construire ton humanisme et à célébrer ta grandeur en épousant cette citation «apocryphe» inspirée d’une pensée de Voltaire, défenseur des libertés d’expression et de pensée, qui dit : «Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire.»
Nous nous en voudrions de ne pas saluer les populations du secteur 08 (ex-secteur 10) pour leur degré élevé de maturité politique, les inviter, et à travers elles tous les Burkinabè, à se rappeler au quotidien cette pensée de Victor Hugo, écrivain français (1802-1885) : «Nous devons apprendre à vivre comme des frères, sinon nous allons mourir ensemble comme des idiots».
Pour terminer, j’implore la compréhension et la clémence de chaque Burkinabè si j’ai failli dans ce message, car mon intention est d’apporter ma modeste contribution à l’édification de la paix et de la démocratie au Burkina.
Dieu bénisse le Burkina Faso
Ouagadougou, le 16 mars 2015
Issaka Kaboré, dit Docteur
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