Le vote de lois portant modification du code électoral burkinabè prévu dans l’après midi du mardi 07 avril 2015 a suscité de fortes tensions politiques dans la capitale Ouagadougou et d’autres villes du pays. Une tension exacerbée d’une part, entre les partisans du régime de transition qui soutiennent cette modification du code électoral visant l’exclusion des membres du gouvernement déchu de Blaise Compaoré de compétir aux élections présidentielles et législatives du 11 octobre 2015.D’autre part, entre les membres de l’ex parti majoritaire, le Congrès pour la Démocratie et le Progrès(CDP) qui rejettent toute forme d’exclusion qu’ils jugent anticonstitutionnelle. Ainsi, des menaces ont été proférées dans chacun des deux camps antagonistes avec des velléités de pyromanie comme lors de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2015.Un impressionnant cordon de sécurité a été déployé dans la zone du siège du Conseil National de Transition (CNT) qui tient lieu de parlement pour la transition et d’où les lois controversées ont été votées, dont l’exclusion de militaires aux élections, si et seulement si ils ne démissionnent pas au préalable de l’armée. Des jeunes agités ont déjà incendié des pneus vers le siège du FESPACO dans la périphérie du siège du CNT très tôt dans la matinée du 07 avril 2015 et ont pris la poudre d’escampette. Le ministère de la sécurité a publié un communiqué faisant des mises en garde contre les troubles à l’ordre public et aux tentatives de déstabilisation du pays. Le ministère a fait savoir qu’il procédera à des interpellations si nécessaire.
Des députés du CNT lors du vote à main levée.
D’ores et déjà certaines personnalités du régime Compaoré ont été interpellées par des services de sécurité. Il s’agit de l’ex-maire de la ville de Bobo-Dioulasso, Salia Sanou, de l’ex-ministre des mines Salif Lamoussa Kaboré, de l’ex-maire de Tanghin Dassouri et président de la FEDAP-BC Adama Zongo, du président du parti NAFA Rasmané Ouédraogo,de Jean-Bertin Ouédraogo ex-ministre des infrastructures et transports, de Jérôme Bougouma ex-ministre de la sécurité. Pour les ex-maires, les motifs invoqués contre eux sont essentiellement liés à des litiges fonciers. Quant aux ex-ministres, ce sont des fautes de gestion de marchés publics qui leurs sont reprochées.
Le gouvernement de la transition et le pouvoir judiciaire, au regard du pacte national pour le renouveau de la justice devront œuvrer à ce que ces interpellations se déroulent dans des conditions d’une justice impartiale sans des actions de règlements de comptes politiques basés sur des faits subjectifs. Il faudrait éviter aussi le sentiment d’une justice des vainqueurs car, de bons procès de crimes économiques et de sang au Burkina ne sauraient concerner exclusivement les récents dignitaires du régime déchu mais aussi d’autres personnalités citées dans des rapports de l’Autorité Supérieure de Contrôle d’Etat(ASCE) et qui sont rangés dans des tiroirs.
La loi portant modification du code électoral a été finalement adoptée par les députés du CNT le 7 avril 2015 par 81 voix pour, 6 contre et 1 abstention. Le CNT, regroupe un effectif de 90 députés dont 2 membres étaient absents au vote sans avoir laissé de procuration à des collègues pour voter en leurs noms. Des groupes de manifestants qui protestaient contre le vote de la loi ont été dispersés par des tirs de gaz –lacrymogène.
Oscar Félix Diakité