Suite à la récente nomination de membres du Conseil Constitutionnel, en remplacement de ceux dont les mandats sont arrivés à leur terme, ou définitivement empêchés de poursuivre leur fonction, une certaine opinion tend à remettre en cause le bien-fondé et la légalité d’une telle décision. Cela, d’une part, sur la base du statut des personnalités choisies pour siéger au sein de cet important organe du système institutionnel de notre pays, et d’autre part, sur la forme du décret relatif à leur nomination.
1- En ce qui concerne le choix des personnalités : Conformément à l’article 153 de la Constitution du 11 juin 1991, le Conseil constitutionnel comprend :
- les anciens Chefs de l’Etat du Burkina Faso ;
- trois (03) magistrats nommés par le Président du Faso sur proposition du Ministre de la justice ;
- trois (03) personnalités nommées par le Président du Faso dont au moins un (01) juriste ;
- trois (03) personnalités nommées par le Président de l’Assemblée nationale dont au moins un (01) juriste ; - trois (03) personnalités nommées par le Président du Sénat dont au moins un (01) juriste.
Ces dispositions sont reprises dans la loi organique N°11-2000/AN du 27 avril 2000, portant composition, organisation, attributions et fonctionnement du Conseil constitutionnel et procédure applicable devant lui (article 2).
L’article 6 de cette loi dispose que : « Les fonctions de membres du Conseil constitutionnel sont incompatibles avec la qualité de membre du gouvernement, l’exercice de tout mandat électif, de tout emploi public ou privé, civil ou militaire, de toute autre activité professionnelle ainsi que de toute fonction de représentation nationale ou d’administration de société. ».
C’est en référence à ces dispositions, que Madame Haridiata DAKOURE/SERE, Monsieur Bouraima CISSE et Monsieur Anatole TIENDREBEOGO (retraités), ont été nommés, en remplacement de madame Elisabeth YONI, monsieur Jean Baptiste ILBOUDO (retraité) , dont les mandats prennent fin, et monsieur Salif NEBIE (décédé, mais qui était également retraité).
Le Conseil constitutionnel, est souvent qualifié de « Conseil des sages », tant les personnalités qui ont la charge de veiller au contrôle de la constitutionnalité des actes importants qui régulent la vie institutionnelle, doivent être libérées de toute activité professionnelle contraignante, incarner la sagesse, la maturité, le respect, que complètent à l’évidence, une bonne dose de connaissance de la règle juridique, et du fonctionnement des institutions de l’Etat. Le fait par exemple que les anciens Chefs d’Etat (par ailleurs tous retraités) y soient admis d’office, n’est pas une chose anodine.
L’exercice de la fonction présidentielle fait d’eux des experts aguerris sur toutes les questions qui pourraient relever de la compétence du Conseil constitutionnel. Nulle part il n’est précisé que la retraite de la fonction publique exclut d’être membre du Conseil constitutionnel, tout comme aucune disposition constitutionnelle ou législative relative à la composition du Conseil constitutionnel, n’exige la présence d’universitaires, de professeurs d’universités ou de personnes non admises à la retraite, dans la composition de l’Organe constitutionnel. C’est dire que, le pouvoir discrétionnaire du Président du Faso, de celui du Président de l’Assemblée Nationale, en l’occurrence du Conseil National de la Transition (CNT), ou de celui du Ministre de la Justice, en matière de choix des membres du Conseil constitutionnel ne saurait souffrir, dans les termes actuels de notre Constitution, de directives subjectives et non fondées. Ou alors, il faudra attendre la relecture des dispositions constitutionnelles et de la loi organique pour en décider autrement.
En conclusion, aucun vice de fond ne peut être relevé dans le décret portant nomination des membres du Conseil constitutionnel du 25 mars 2015.
2- En ce qui concerne la forme du décret : Le membre du Conseil constitutionnel dont la nomination relève de la compétence du Président du CNT, l’a été par décision autonome dudit Président (décision N°045/CNT/PRES du 10/02/2015).
Par conséquent, et dans la mesure où le décret N° 2015- 291/PRES-TRANS/PM du 25 mars 2015, portant nomination de membres du Conseil constitutionnel, n’est pas rentré en vigueur, du fait de sa non publication au Journal Officiel du Faso, des décrets rectificatifs, sans contreseing du Premier ministre, seront pris qui ne concerneront que les seuls membres dont les nominations relèvent des prérogatives exclusives du Président du Faso.
Ouagadougou, le 31 mars 2015
Pour le Cabinet du Président du Faso
La Conseillère juridique
Madame Clarisse MERINDOL OUOBA