Si la démission du Premier ministre tunisien est loin d’être une surprise, il convient de saluer cette cohérence attitude d’aller toujours au bout de sa conviction. Laquelle conviction prône la formation d’un gouvernement de technocrates épuré des ivraies politiciennes. En effet, c’était la seule façon d’obtenir un gouvernement consensuel et admis par les populations tunisiennes qui ont basculé dans les manifestions contre le parti majoritaire Ennahda, d’où émane d’ailleurs Jebali.
Des manifestations qui ont véritablement tourné à des appels à la chasse d’Ennahada au pouvoir après l’assassinat de l’opposant historique Chokri Belaïd. A l’annonce de ce projet de gouvernement, le parti Ennahda était divisé. Contrairement à une minorité dite pragmatique et réaliste favorable au projet, l’aile dure du parti Ennahda conduite par Rached Ghanouchi a opposé un refus. Le Premier ministre Jebali avait menacé de rendre sa démission si son projet n’est pas accepté. Après près d’une semaine d’intenses tractations, le ‘’nada’’ a fini par l’emporter. En « bon Magrébin », la décision de Jebali ne s’est pas fait attendre. Selon certains observateurs, le Premier ministre démissionnaire pourrait être reconduit à son poste. Ce qui impliquerait l’acceptation de son projet de former un gouvernement de technocrates à même de véritablement amener la Tunisie sur les chantiers du développement. En tout cas, il est de fait rare qu’une autorité d’un tel rang quitte son poste pour le respect de ses ambitions politiques. D’où, il semble peu superfétatoire de tirer un chapeau ou du moins un ‘’panama’’ au ministre Jebali qui, désormais, se hisse au dessus des mêlées politiciennes. « L’unité de la Tunisie ou mon départ ». C’est ainsi que se résumait l’attitude du Premier ministre qui est alors resté de marbre face aux caprices de son parti en perte de crédibilité aux yeux du peuple tunisien en quête d’une démocratisation véritable. Au chapitre des conséquences de la démission du Premier ministre Jebali c’est, en filigrane, la décrépitude annoncée du parti islamiste Ennahda qui se dégage. Criblé de critiques les plus acerbes depuis son avènement au pouvoir, Ennahda, majoritaire dans le gouvernement, a fini par être construit dans le nouméa des Tunisiens comme un obstacle aux aspirations révolutionnaires qui ont emporté le président Ben Ali. Désormais fragilisé et déchiré à l’intérieur et à l’extérieur la réforme du parti islamiste avec l’élaboration de nouvelles orientations s’imposent.
Les politistes les plus avertis soutiennent d’ailleurs à l’occasion que les partis de nature confessionnelle fondés sur la base des dogmes et inflexibles sont désormais mal adaptés aux sociétés arabes en mutation. Quoiqu’un postulat ne se justifie pas dans tous les contextes, force est de reconnaitre que face à l’universalisation des cultures favorisées par les nouvelles technologies de l’information et de la communication (TIC) (face book...), aucun Etat n’est guère un empire, imperméable à la marche révolutionnaire du monde. Dans l’hypothèse d’une tractation continue des membres du parti, il est clair que les autres partis laïcs viendront en troisième larron et profiteront sans doute des élections qui se profilent à l’horizon pour éclipser véritablement Ennahda. Peut-être de là viendra alors la démocratisation des pouvoirs d’Etat en Tunisie. En attendant, on constate que ça tangue ! Mais pour quelle côte? .