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Le Quotidien N° 697 du 18/2/2013

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Braquage de 5 guichets de change au centre de Dakola / frontière Burkina-Ghana : Plus de 40 millions de F CFA et de Cedi emportés 1 mort
Publié le mardi 19 fevrier 2013   |  Le Quotidien




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Dakola, ville frontalière entre le Burkina et le Ghana a été le théâtre d’un tragique événement le samedi 16 février 2013. 4 individus juchés sur deux motos ont investi le quartier général des changeurs de devises CFA et Cedi pour, dans un premier temps s’emparer des billets de banque, et dans un second temps, abattre sauvagement un monnayeur, Issouf Nana, la trentaine révolue qui tentait de sauver le pactole que lui avait confié un autre. Tout est allé très vite, selon les témoins. En l’espace de 15 mn, les bandits armés jusqu’aux dents, ne portant ni masque ni autre artifice, ont semé la terreur dans la ville au nez et à la barbe des éléments de sécurité, terrés dans les commissariats de police et gendarmerie nationale. La psychose est totale et jusqu’à hier, lundi 18 février 2013, les uns et les autres n’avaient d’autre sujet de causerie que ce spectacle digne d’un film d’Hollywood. Les populations que nous avons rencontrées sur le terrain pointent du doigt l’Etat qui, selon elles, doit redoubler d’efforts dans la lutte contre la criminalité et le grand banditisme, surtout, dans cette zone soumise depuis quelques temps à des braquages à répétition.

Le lundi 18 février 2013, à 7h30mn, le quartier général des changeurs de devises étrangères communément appelés monnayeurs de Dakola, est tout vide. D’habitude, nous a-t-on confié, ils sortent dès 6 heures du matin. Ce retard avait-il un lien avec le braquage dont ils ont été l’objet le samedi 16 février 2013 dans la soirée ? Peut-être ! Approchés, surtout pour comprendre comment le braquage s’est déroulé le week-end, les monnayeurs nous ont dit de patienter, le temps que leur chef arrive à 8h. Ils ont même pris le soin de nous inviter à boire un thé dans un kiosque situé non loin de la route nationale n°5. Dans le café, les uns et les autres devisaient à voix basse sur ce qui est convenu d’appeler l’actualité à Dakola, ville frontalière du Burkina avec le Ghana, située à 160 km de la capitale Ouagadougou : le braquage de monnayeurs. A l’heure prévue, par un signe de la main, les monnayeurs nous invitent de venir à leurs « bureaux », quelques tables et bancs de fortune, déposés sous deux manguiers. Au même moment, et à quelques jets de pierre, 3 ou 4 mètres, des policiers, sont venus investir leurs anciens locaux, abandonnés quelques années plus tôt. Ils sont deux avec une seule arme qu’un d’eux porte en bandoulière, assis sur deux chaises. Pour notre part, il fallait arracher rapidement de la bouche des monnayeurs, préoccupés par le change des devises que les discours, le film de l’évènement tragique du samedi. Le cœur meurtri, le chef Averbou Salif, nous a confié qu’après la prière musulmane de 15h, ils avaient rejoint leurs lieux de travail. 15 minutes plus tard, a-t-il poursuivi, 4 individus sur 2 motos se sont dirigés vers eux. Mais, à peine ces derniers sont arrivés, qu’ils ont commencé à tirer des coups de fusil. « Nous étions obligés de nous coucher à terre pour que les balles ne nous atteignent pas. Ils se sont mis à ramasser les sacs d’argent et à tirer davantage barrant la voie dans les deux sens. L’un de nous Issouf Nana, à qui El hadj (Ndlr : un monnayeur très fortuné) avait remis de l’argent avait pu s’en fuir dans un premier temps. Mais, ayant constaté qu’il avait oublié l’argent, il est revenu pour le chercher en exploitant l’inattention des braqueurs. Après avoir pris le sac plein d’argent et en voulant s’échapper, il a été grièvement blessé par un des 4 braqueurs avec 2 balles. En très peu de temps, 15 mn environ, les braqueurs ont pu commettre leur forfait et s’enfuir dans la brousse. » Ces propos ont été corroborés par un autre monnayeur qui a requis l’anonymat. « Ils ne portaient pas de masque. Deux d’entre eux étaient en blouson et portaient des lunettes noires. Quand ils sont arrivés, ils nous ont lancé « bâtard » en langue nationale mooré avant d’ouvrir le feu. Quand notre ami, Issouf Nana, est revenu pour prendre son argent, l’un des bandits a donné l’ordre de le tuer. Amené d’urgence au centre médical de Pô, il a perdu la vie quelques instants plus tard. Il y avait coupure d’électricité dans la ville. Donc, il était hors de question qu’il puisse même subir une opération chirurgicale. C’est cela aussi la réalité au Burkina », a-t-il lancé tout tristement. Ouello Abouga, plus que remonté par l’événement tragique, a lui aussi confié : « J’ai personnellement essayé d’appeler le 17 (Ndlr : le numéro vert de la police) en vain. Après leur forfait, les braqueurs se sont enfuis par la brousse sans que l’on ne puisse les rattraper sur les vieux engins qui ne roulaient pas plus de 20 km/h. Selon des témoignages recueillis sur place, ils se sont arrêtés dans un village situé à 15km de Dakola où ils ont encore dévalisé le gérant d’un kiosque. » Selon le commissaire de police de la localité, les braqueurs étaient suffisamment préparés. Aussi, a-t-il confié, il paraîtrait qu’ils étaient même dans la matinée avec les monnayeurs. Effectivement, a confié un monnayeur, dans la journée du samedi, il a reçu un appel l’invitant à préparer une forte somme d’argent pour faire le change. « Pour moi, c’était un client habituel. Je ne savais pas qu’il s’agissait d’un braqueur qui préparait son coup. Les 15 millions de francs CFA que j’avais sur moi ont été emportés. Je remercie Dieu car souvent, j’ai sur moi 40 millions de francs CFA », s’est contenté de confier le monnayeur. Pour l’officier de police Borou, par ailleurs commissaire de police de Dakola, il y a une double difficulté à laquelle ses éléments sont confrontés. D’abord, il s’agit du manque de moyens pour lutter contre ce genre de banditisme, la police de frontière étant beaucoup plus administrative que répressive. Deuxièmement, le principe de l’inviolabilité des frontières fait qu’un braquage qui se produit au Burkina, les policiers burkinabè ne peuvent pas poursuivre les brigands jusqu’au Ghana.

« Les braqueurs sont très intelligents. Ils savent qu’en se rendant au Ghana, nous ne pouvons rien faire. Le temps de contacter la police ghanéenne, ils ont eu le temps de s’échapper. Mais d’ores et déjà, nous avons saisi nos homologues ghanéens avec qui nous sommes en étroite collaboration pour que les coupables soient pris. Il y a des pistes intéressantes, car les bandits ont laissé les sacs des monnayeurs dans un village ghanéen », a confié le commissaire de police qui pour des raisons d’enquête n’a pas voulu s’étaler davantage sur la question.
Le braquage du samedi dernier, selon quelques témoins, vient mettre à nue la défaillance du système de sécurité burkinabè. En effet, selon eux, ce genre de cas est légion dans la localité. Malheureusement, ont-ils souligné, cela se passe sous l’œil impuissant des éléments de sécurité. Voici ce qu’a confié Ouello Abouga : « Abattre un individu avec un tel sang froid, c’est un défi à l’autorité de l’Etat. Les bandits n’étaient pas masqués. Ils ont montré qu’ils sont plus forts que les autorités burkinabè. Pô n’est pas une petite ville. Mais, il n’y a même pas de CRS (ndlr : Compagnie républicaine de sécurité) et de BAC (ndlr : Brigade anti-criminalité). On rassemble tout à Ouaga.

Depuis qu’il y a des braquages sur la route de Pô, je n’ai jamais entendu dire que l’on a attrapé un seul bandit », a-t-il déploré tout en mentionnant que les armes que les bandits possèdent sont de loin plus puissantes que celles des policiers : « Avec les armes des bandits, même si la police était là, elle ne pouvait rien faire. Aujourd’hui, pour amuser la galerie, on nous amène deux policiers avec une seule arme (Ndlr : l’ancien commissariat de police de Dakola est occupé actuellement par les monnayeurs. Depuis le braquage du samedi, deux policiers ont été dépêchés, dit-on, pour assurer la garde des locaux vides) Que peuvent-t-il face de 4 personnes armées jusqu’aux dents ? » En attendant que des dispositions soient prises pour sécuriser la zone, les populations sont dans la psychose. Pour les douaniers, les transitaires et les autres fonctionnaires présents à Dakola, l’Etat doit renforcer la sécurité des personnes et des biens .

Par Raogo Hermann OUEDRAOGO

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