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Mgr Anselme T. Sanon à propos de la démission du Pape : « La crainte d’une infiltration des sectes est réelle »
Publié le dimanche 17 fevrier 2013   |  Burkina24


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© AFP par Andreas Solaro
Réligion/christianisme : Le pape Benoît XVI


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Archevêque émérite de Bobo-Dioulasso en plus d’être un théologien connu et respecté, Mgr Anselme Titianma Sanon a côtoyé à maintes occasions le Pape Benoît XVI depuis les années 1960. A l’annonce de la démission du Saint Père, Burkina 24 est allé à la rencontre de l’ancien évêque de Bobo, qui vit sa retraite dans la cour du Musée Sénoufo de la ville de Sya. Il se prononce sur la démission du Pape Benoît XVI et évoque la crainte d’une infiltration des sectes au sein de l’Église catholique qui serait une menace réelle.

Burkina 24 (B24): Vous qui connaissez le pape depuis qu’il était évêque, que retenez-vous de lui ?

Mgr Anselme Titianma Sanon (Mgr ATS): Joseph Ratzinger était théologien au Concile Vatican II dans les années 60, quand j’étais étudiant en théologie. Sa pensée m’a toujours fasciné. Je suivais ses interventions et lisais ses écrits quand il enseignait en Allemagne. Je l’ai rencontré aussi plusieurs fois au Conseil Pontifical de la Culture à Rome auquel je fais partie depuis 1983.

B24: L’actualité mondiale est justement marquée par la démission annoncée du pape. Ya t-il une autre explication à cette démission, en dehors de celle donnée par le Saint Siège ?

D’aucuns évoquent par exemple les épreuves des prêtres pédophiles et de Vatileaks…
Mgr ATS: Outre la surprise, on évoque les raisons avancées par le Pape lui-même : retenons entre autres l’âge, ce qu’on appelle en italien« fatica » qui, plus que la fatigue, exprime l’affaiblissement des forces physiques, morales et mentales. Mais du côté du monde sont évoquées les questions qui fâchent sur lesquelles certaines personnes ou pressions n’ont pas eu raison du Pape. Dans les charges papales, il ya les poids du monde avec ses promesses mirobolantes remplies d’interrogations, et son poids de péchés que sont les dérives sous-humaines élevées au nom du droit, de la justice et de la liberté individuelle. A côtoyer ces réalités avec le sentiment de ne pouvoir faire quelque chose d’efficace pour enrayer ces dérives, jusque dans l’entourage quotidien, pour un intellectuel d’un tel niveau, le geste peut s’expliquer. Ce n’est pas le seul cas dans l’histoire des grands hommes et aussi des saints.

B24: A propos, de par le passé, comment l’Église catholique a-t-elle géré les situations pareilles ?

Mgr ATS: L’on retient l’exemple de l’opposition de l’antipape Hyppolite au Pape Calixte. Mais l’exemple le plus notoire est celui de Grégoire XII. Pendant la Guerre de Cent ans entre la France et l’Angleterre (1339-1453), les rois de France étaient prépondérants au point d’influer sur les affaires de l’Église, et par la suite en nommant comme papes des Français.

Arriva le moment où il y eut trois papes en même temps : Grégoire XII à Rome, Benoît VIII à Avignon, et le premier Jean XXIII nommé par les cardinaux. Finalement, afin de mettre fin au Grand Schisme d’Occident (1337-1417), le concile exigea la démission des trois papes. Jean XXIII s’enfuit, Benoît VIII persiste jusqu’à se retrouver sans partisan, et seul Grégoire XII accepte de se retirer. Ce qui permit d’élire un autre pape, Martin V, en 1417.

La situation présente est toute autre, six cents ans après, et la procédure est toute tracée.

Ainsi, à partir du 28 février prochain, Benoît XVI vivra quelque part sans interférer sur les affaires de l’Église confiées à son successeur.

B24: Parmi les potentiels futurs papes, certains observateurs citent le cardinal nigérian Francis Arinze et le Ghanéen Peter Turkson. Quelles sont les chances de voir un pape africain avant Pâques ?

Mgr ATS: Si mes souvenirs sont exacts, à l’élection du Bienheureux Jean XXIII, il y avait un cardinal africain, le Cardinal Ruganbwa de Tanzanie. A celle de Jean Paul II, ils étaient d’un certain nombre dont le Cardinal Paul Zoungrana.

Cependant, sur mesure humaine, on voit difficilement un africain Évêque de Rome. La majorité des catholiques se trouvent jusqu’à présent en Amérique Latine. Les églises d’Amérique Latine ont plus de cinq cents ans, tandis que celles d’Afrique, excepté les anciens territoires portugais, n’ont pas deux cents ans. Quant aux noms avancés, je connais assez bien l’un comme l’autre, étant de bons frères évêques. L’Esprit y pourvoira pour le reste.

B24: Nombreux sont ceux qui craignent une infiltration du Vatican par les sectes et les agences secrètes. Cette crainte est-elle justifiée ?

Mgr ATS: Le Saint Siège n’est pas étanche, et le service de sécurité est sécurisant pour ceux qui suivent adroitement le protocole, sans égards pour leurs intentions. La crainte est non seulement justifiée mais réelle car elle n’est pas d’aujourd’hui. Qu’on se rapporte à la période de la Renaissance moderne !

B24: En ce mois de Carême marqué par un changement à la tête de l’Église, quel message avez-vous à l’endroit des fidèles catholiques du Burkina?

Mgr ATS: Benoît XVI nous montre que l’Église n’est pas liée qu’à la personne du Pape. Le Pape est élu dans la communion avec tous les évêques du monde entier. Benoît XVI nous demandait pardon pour ce qui n’a pas marché. Nous devons aussi lui demander pardon.
B24: Que devient Mgr Anselme Sanon après sa retraite ?

Mgr ATS: Mes amis et les autorités burkinabè m’ont aidé à me soigner. Dieu merci, j’ai recouvert la santé. A présent, je me repose. Je m’occupe également de culture, je travaille la terre, et je suis actif dans ma fondation, la Fondation Anselme Titianma Sanon. Enfin, je donne des cours de théologie.

Interview réalisée par Michel KONKOBO,
pour Burkina 24

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