C’est confirmé. Hier mardi 13 février 2013, le capitaine Amadou Haya Sanogo a été officiellement investi à la tête d’un Comité de réforme de l’armée. Nommé en août dernier par simple décret présidentiel, le chef de la junte se voit ainsi confirmé dans les fonctions qu’il occupait depuis lors. Un rebondissement spectaculaire alors qu’on imaginait aisément le capitaine de Kati rasant les murs depuis le début de l’intervention française au Nord Mali. Il est vrai que depuis les premières frappes de l’opération Serval, le chef de la junte s’était fait plutôt discret, préférant laisser le premier plan aux autorités de la transition et à la hiérarchie militaire.
Décidément insubmersible, c’est à Koulouba, siège du pouvoir, et en présence du président par intérim, du Premier ministre et de plusieurs huiles que l’ancien putschiste a reçu les attributs de sa charge. En ce moment, il doit boire du petit lait en savourant les délices de cette petite victoire sur ses ennemis de toujours. En effet, cette investiture intervient quelques jours seulement après les affrontements violents qui ont opposé vendredi dernier des éléments de l’armée malienne.
Ce soir-là, «des militaires lourdement armés» ont pris d’assaut la caserne des Bérets rouges. «Le comble de l’irresponsabilité», avait-on titré au lendemain des affrontements qui, en fin de compte, avaient opposé les bérets verts du capitaine Sanogo à leurs éternels rivaux tandis qu’au nord leurs frères d’armes français et africains se battaient et se battent toujours pour restaurer l’intégrité territoriale du Mali.
La crise entre les deux corps dure depuis 10 mois, depuis que les bérets rouges, autrement dit les para commandos de Djicoroni, le corps d’origine de l’ancien président Amadou Toumani Touré, ont été chassés des arcanes du pouvoir par le coup d’Etat perpétré par le béret vert Amadou Haya Sanogo et ses hommes.
Dix mois d’escarmouches, de crocs-en-jambe de toutes sortes et de fausses trêves. Dernier épisode en date, après les échanges de tirs de vendredi, l’audience marathon accordée par le Premier ministre à une délégation de bérets rouges. Une démarche d’apaisement qui aura fait long feu face à la pression de l’ex- junte et de la hiérarchie militaire, bien décidées à faire rentrer ces soldats d’élite dans les rangs de la grande muette.
Mais en réalité, dans cette guerre des couleurs, qu’il s’agisse des bérets rouges ou des bérets verts, c’est toujours la même peste noire qui ronge le grand corps malade qu’est désormais l’armée malienne. Une maladie aussi pernicieuse qu’honteuse qui montre à quel point la restructuration sera une tâche herculéenne. Et elle le sera bien davantage pour le président fraîchement investi du Comité de réforme de l’armée, lui qui a démontré qu’en la matière, il était à la fois juge et partie.