« L’Université de Ouagadougou connaît particulièrement, depuis l’année académique 2010-2011, des problèmes récurrents qui retiennent notre attention. Il est impératif que des solutions, les meilleures, soient appliquées pour remédier à cette situation persistante ». Ces propos ont été tenus, le mercredi 30 janvier 2013, par le Premier ministre, Luc Adolphe Tiao, lors de sa Déclaration de politique générale (DPG) devant l’Assemblée nationale.
A sa prise de fonction en octobre 2012, le nouveau président de l’Université de Ouagadougou (UO), Pr Karifa Bayo, n’avait pas dit le contraire, parlant même de « turbulence » dans ce temple du savoir. Plus que les autres universités publiques qui connaissent aussi des difficultés, l’UO, qui a formé autant de cadres pour le Burkina, va mal. Très mal. Les grèves à répétition, qui s’appuient sur des revendications plus ou moins fondées, ont fini par faire perdre la face à la « maison- mère ». Si ce n’est pas l’Union générale des étudiants burkinabè (UGEB), l’Association nationale des étudiants du Burkina (ANEB) ou les autres syndicats estudiantins qui montent au créneau pour réclamer de meilleures conditions d’études, c’est le Syndicat national autonome des enseignants-chercheurs (SYNADEC) qui exige un meilleur statut pour la corporation.
Le Syndicat national des enseignants du secondaire et du supérieur (SNESS) qui n’est pas en reste, dénonce, entre autres, les effectifs pléthoriques et la non-prise en compte de certaines indemnités. Les étudiants veulent plus d’infrastructures, des repas de qualité, des enseignants en nombre suffisant, etc. Autant que faire se peut, ils ruminent encore, à tort ou à raison, l’érection d’une clôture et l’institution du Service de sécurité des universités (SSU) au sein du campus de Ouagadougou. Les enseignants, eux, demandent, parmi tant d’autres doléances, plus de considération sur le plan salarial et des meilleures conditions de recherche. Ces luttes justifiées, de part et d’autre, ne sont pourtant pas sans influence négative sur le déroulement des années académiques à l’UO. Les grèves, les protestations et les conflits larvés privent les étudiants, ceux-là même qui constituent l’avenir de la nation, de « précieuses » heures de cours. Etalés dans le temps, les mouvements d’humeur perturbent dangereusement les cours et rendent difficile l’application du calendrier universitaire. Conséquence : les promotions se chevauchent au grand désarroi de tous. Malgré la recherche de solutions durables par les autorités administratives et politiques, le problème est passé du stade conjoncturel au stade structurel. Les années se suivent et se ressemblent à l’UO, avec leur lot de grèves aux nombreuses conséquences. Notre confrère « Le Journal du Jeudi », raillant la situation, a même laissé entendre que les troubles constituaient désormais la « normalité ». Plus qu’un cliché, le problème de l’UO affecte sa réputation. En 2011, et selon un classement, l’UO a dégringolé de la 42e à la 65e place dans le top 100 des universités africaines.
Même si elle a encore de quoi s’enorgueillir d’être la deuxième université après celle de Dakar parmi les pays francophones. Quoiqu’il en soit, le problème de l’UO inquiète le Premier ministre, qui compte travailler à y remédier. « Afin de rétablir la normalité des années universitaires, j’engagerai, d’urgence, un processus de concertation avec tous les acteurs au terme duquel des mesures fortes et susceptibles de résoudre définitivement la question universitaire seront annoncées à la nation », a-t-il promis dans sa DPG. Aussi, les recommandations des travaux du comité ad hoc de réflexion sur l’université burkinabè et les résultats attendus des Etats généraux de l’enseignement supérieur, prévus en mai 2013, lui seront-ils d’un apport capital ? Déjà, l’une des solutions aux écueils de l’UO, semble indiquer Luc Adolphe Tiao, pourrait être l’invalidation d’une année académique. Une « douloureuse » et « courageuse » décision qu’il faudrait pendre, si cela s’avère être le moyen pour ramener les choses à l’ordre.