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Sidwaya N° 7253 du 13/9/2012

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Mali, quel patriotisme !
Publié le jeudi 13 septembre 2012   |  Sidwaya




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La paix au Mali n’est pas pour demain. Et ce n’est pas la faute de la communauté internationale mais celle des fils même du Mali. Pendant que la situation préoccupe ses voisins immédiats et au-delà, notamment la communauté internationale, à Bamako on a du mal à parler d’une même voix. L’adage selon lequel « les mêmes peines unissent mille fois plus que les mêmes joies » semble ne pas survivre à la situation malienne. Pour preuve, le président Dioncounda Traoré a, dans une lettre transmise au président ivoirien, Alassane Ouattara, demandé le 6 septembre dernier, un appui militaire de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Dans cette lettre signée du Président Traoré mais corédigée avec le Premier ministre Cheick Modibo Diarra et le ministre de la Défense, le colonel-major Yamoussa Camara, M. Traoré demande un appui aussi bien en hommes, en formation et en matériel. Ce qui a suscité une colère dans le camp militaire de Kati, base des ex-putschistes. « Pas question d’envoyer des troupes ni à Bamako, ni dans le Nord », rétorque le Colonel Youssouf Traoré membre, de l’ex-Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’Etat (CNRDRE). Selon lui, « l’envoi de troupes va créer plus de problèmes que de solutions et compliquera la situation tant au Sud qu’au Nord ». Des Maliens estiment que le président Traoré n’aurait pas dû autoriser la CEDEAO à envoyer 3 300 hommes pour la reconquête du Nord. Mais que veulent réellement ces Maliens enfermés dans l’illusion de reconquérir l’intégrité territoriale avec seulement un appui logistique et matériel de la communauté internationale ?
Combien de fois allons-nous dire aux Maliens que l’heure n’est plus aux tergiversations, aux divergences de vue ? Le plus urgent c’est de parler le même langage. Pendant que Bamako continue de se diviser sur des procédures et des méthodes pour combattre la rébellion, le camp d’en face avance sans même trouver de résistance ni de résistants sur son chemin. Il vaut mieux avancer d’un même pas, si l’intérêt de tous, c’est de ramener la paix et la quiétude sur toute l’étendue du territoire. « Nous avons toujours demandé une aide logistique et matérielle car nous avons suffisamment d’hommes pour combattre et libérer les zones occupées. Mieux, de nos jours, le moral est au beau fixe. Ceci n’a rien à voir avec ces troupes que l’ancien régime a tout mis en œuvre pour saper le moral », martèle le Colonel Youssouf Traoré. Qu’on ne se voile pas la face, le Mali ne dispose pas à l’heure actuelle d’une armée déterminée, capable d’affronter la rébellion touarègue et les islamistes du Nord. Les thuriféraires de la junte semblent être sur une autre planète. En effet, à quelle armée unie et au moral d’acier font-ils référence ? A notre connaissance, la guerre entre bérets rouges et bérets verts n’a pas encore connu d’armistice. De même, n’est-ce pas sous la présidence de ce capitaine que l’entièreté du septentrion malien est passée sous le contrôle total des islamistes et des indépendantistes ? Dernièrement encore, le capitaine Sanogo était bel et bien là lorsque quelques dizaines d’éléments du MUJAO se sont emparés de Douentza, une ville située au centre du Mali à quelques 200 km de Mopti. Comment alors la CEDEAO peut-elle laisser son équipement entre les mains d’un tel groupuscule militaire fut-il très influent à Bamako ? Les dirigeants de l’Afrique de l’Ouest peuvent-ils laisser la vie de milliers de soldats entre les mains d’une armée divisée, incompétente, sous-équipée et surtout sans commandement unifié ? En tous les cas, le leader du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO), Abdel Hakim a prévenu : « Bamako sera prise en 24 heures si les positions du MUJAO sont attaquées ». Faut-il dans ces conditions laisser les militaires maliens aller à l’assaut sans être sûr de la victoire ? Pourquoi la CEDEAO laisserait-elle ses soldats en retrait, sachant pertinemment que les militaires maliens dans leur forme actuelle n’ont aucune chance face aux jihadistes et aux indépendantistes ?
La communauté internationale, la CEDEAO en tête a donc raison d’être prudente face à la requête bamakoise. Il suffit de se rappeler simplement la chute en cascade des villes du Nord et de la débandade des soldats maliens face aux rebelles pour se convaincre de la déliquescence de cette armée.
L’armée malienne reproche à la CEDEAO d’avoir bloqué dans les ports de Conakry, Dakar et Abidjan son matériel militaire et s’oppose que cette communauté envoie ses troupes sur le sol malien. Une armée qui n’a pas de combattants mais plutôt des hommes qui ordonnent les « replis tactiques » à la moindre escarmouche, ne peut rien faire, même si elle a les armes les plus perfectionnées du monde. Ce n’est pas le matériel qui combat mais des hommes qui utilisent le matériel pour combattre. Le matériel entreposé dans ces différents ports risque fort de tomber entre les mains de la rébellion s’il est expédié à Bamako. N’est-ce pas ces mêmes hommes qui ont décampé partout où ils ont appris l’arrivée des rebelles ? Depuis le 17 janvier 2012, date du déclenchement de la rébellion, a-t-on récréé une nouvelle armée au Mali ? Pas si certain.
Il y a aussi qu’il faut craindre que ces armes, semble-t-il, commandées en Bulgarie par l’ex-président Amadou Toumani Touré, une fois entre les mains des militaires maliens ne soient utilisées pour déstabiliser davantage le pays. Depuis le coup d’Etat du 22 mars dernier, en effet, l’armée malienne paraît divisée même si personne n’ose s’opposer ouvertement au trublion capitaine Amadou Aya Sanogo et à ses bérets verts. Le président Dioncounda Traoré lui non plus n’a pas une réelle autorité sur la grande muette.
Face à cette situation, il vaut mieux pour la CEDEAO de convaincre les Maliens (militaires et politiciens) que son seul souci c’est d’aider le Mali à sortir du gouffre. D’ailleurs, les soldats de la CEDEAO seront mis à la disposition des autorités maliennes demanderesses. A elles de savoir les utiliser judicieusement. Mais en attendant ce déploiement, il vaut mieux discuter avec ceux qui s’opposent à cette option et clarifier un point important au Mali. Qui du capitaine Sanogo ou de Dioncounda Traoré gère réellement le pouvoir au Mali ? Pourquoi une armée qui s’est déclarée républicaine et loyale s’oppose-t-elle à la décision d’un président constitutionnellement désigné ? Il faut que la CEDEAO maîtrise la situation constitutionnelle avant d’accéder à la requête du président Traoré si elle veut éviter l’échec de sa stratégie de recherche de la paix. D’aucuns pensent qu’il faut absolument le retour de la junte dans les casernes, qu’elle soit écartée de la vie politique, des institutions politiques pour espérer une issue rapide à cette crise. Mais réussira-t-on à le faire ? La CEDEAO doit se pencher sur cette phrase d’André Malraux : « Il y a des guerres justes. Il n’y a pas d’armée juste ». A la classe politique malienne d’aller à l’école de la vie pour se rendre compte de ce qui suit. Dans la vie, nous avons deux choix à faire chaque matin. Soit on se recouche pour continuer à rêver, soit on se lève pour réaliser ses rêves. Le rêve d’un Mali uni, stable et prospère ne peut se réaliser dans le sommeil. Vivement que les pro ou contre ceci ou cela se ravisent que l’essentiel, c’est le Mali, mais pas les calculs politiciens, encore moins les intérêts et prébendes égoïstes.

Rabankhi Abou-Bâkr ZIDA
rabankhi@yahoo.fr

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