L’ancien Secrétaire général (SG) de l’Organisation des Nations unies (ONU), Kofi Annan, sous le couvert de sa Fondation, a lancé, fin janvier 2013, la Commission sur l’impact du trafic de drogue sur la gouvernance, la sécurité et le développement en Afrique de l’Ouest. Cette structure aura pour, entre autres objectifs, de sensibiliser l’opinion publique et mobiliser les politiques sur les dangers du trafic de drogue, et de promouvoir les capacités locales et régionales de gestion du phénomène et de ses conséquences.
Aussi la commission devra-t-elle formuler des recommandations fondées sur des données probantes, à l’endroit des dirigeants politiques et des leaders de la société civile, en vue de renforcer la lutte contre le trafic de stupéfiants. Autant que faire se peut, le comité est appelé à rendre les résultats de ses travaux d’ici à la fin de l’année 2013. Aussi nobles que salutaires, les ambitions de cette nouvelle commission sont toutes tracées, à l’initiative de l’ancien dirigeant de l’ONU, qui a coopté des personnalités et pas des moindres, pour la conduire. Outre l’ancien président du Nigéria, Olusegun Obansanjo, patron de la commission, l’ex-chef de l’Etat du Cap-Vert, Pedro Pirès et l’ancien Premier ministre du Togo, Gilbert Houngbo, qui en sont membres. Ces personnalités travailleront aux côtés d’un certain nombre de spécialistes et d’acteurs de la société civile africaine, pour donner du sens à ce projet, soutenu par l’Union africaine (UA), la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et les partenaires internationaux. Convaincu que « la question des drogues est en train de déchirer certains pays ouest-africains », Kofi Annan a jugé bon de mettre ses idées et ses relations au service de la sous-région. Et il s’est surtout inspiré du triste cas de la Guinée-Bissau, ce pays de moins de deux millions d’habitants où le narcotrafic est une réalité. La drogue en provenance d’Amérique ou d’ailleurs, y transite en permanence et un marché s’est même développé in situ. Et selon un récent rapport de l’ONU, le gouvernement et l’Armée bissau-guinéenne seraient impliqués dans le commerce de drogue.
A titre illustratif, l’on fait cas de « la responsabilité supposée de plusieurs hauts fonctionnaires du gouvernement de l’ancien Premier ministre, Aristides Gomes, dans la disparition de 670 kilogrammes de cocaïne saisis par les autorités ». Aussi d’importantes quantités de drogue sont-elles souvent saisies chez des militaires, sans que ceux-ci ne soient inquiétés. Les faits sont tels que l’un des chefs de la marine, le contre-amiral, José Américo Bubo Na Tchuto, figurerait même sur la liste des "barons de la drogue", établie par les Etats-Unis. Pour certains observateurs, la montée des tensions en Guinée-Bissau entre certains responsables du gouvernement et des membres de la hiérarchie militaire se justifierait par « la concurrence pour le droit à assurer la sécurité des narcotrafiquants ». Ces rivalités, comme l’atteste l’histoire, se terminent parfois par des règlements de compte. Les intérêts financiers sont tellement énormes, que le trafic de drogue est devenu une source d’instabilité sociopolitique en Guinée-Bissau. On le voit, ce phénomène, qui touche aussi les autres pays d’Afrique de l’Ouest, peut influer négativement sur la gouvernance et favoriser la corruption. Une autre mauvaise nouvelle est que l’argent issu du trafic de drogue peut alimenter le terrorisme. Là-dessus, l’ancien SG de l’ONU a soutenu que la crise malienne est un cas « concret » du lien entre le trafic de drogue et la déstabilisation d’un pays. « (…) d’après les recherches que les gens ont faites, les trafics passent souvent par le Sahel pour aller en Europe », a-t-il rapporté à ce propos. Il paraît évident que le trafic de drogue constitue une menace pour la sécurité intérieure d’un pays, en ce qu’il peut contribuer à financer des groupes armés. Plus qu’une menace pour la gouvernance et la sécurité, le trafic de stupéfiants constitue un danger pour la santé. Les drogues ont des conséquences néfastes sur l’organisme humain, étant donné qu’elles entrainent des perturbations physiques ou psychologiques. Pis, les drogues dont raffolent certains jeunes en quête de sensations fortes, conduisent à la délinquance. Il faut donc combattre, par tous les moyens, les narcotrafiquants, qui bénéficient souvent de la complaisance de certains pouvoirs publics. A ce sujet, aucune initiative n’est de trop et c’est en cela que la trouvaille de Kofi Annan mérite encouragement.