La chose fait pratiquement l’unanimité ; c’est à tout rompre que l’on applaudit l’intervention des forces françaises, qui ont permis, en un temps deux mouvements, de reconquérir les villes maliennes que les djihadistes avaient investies et dont ils entendaient faire leurs places fortes pour des expéditions futures. Une guerre éclair des soldats français, épaulés plus tard par les forces africaines, aura mis fin aux rêves les plus fous des groupes militaires et faussement religieux qui avaient fini pas instaurer un régime de terreur dans la partie septentrionale du Mali, où les habitants, surpris par tant d’horreur, ne savaient plus à quel saint se vouer.
A ce jour la reconquête du Nord-Mali n’a pas livré tous ses secrets : la débandade des rebelles ne signifie pas qu’ils se déclarent vaincus ; loin s’en faut ; passés maîtres dans l’art de se confondre avec une nature qu’ils connaissent à la perfection, les survivants se terrent dans les replis des ergs et des regs, entretenant sans doute le secret espoir que la traque dont ils sont l’objet finira bientôt. Reste à voir si la suite des opérations leur donnera raison.
Mais il se pose tout de même un problème lorsqu’on observe l’opération de reconquête de ce Nord-Mali, dont on croit tout légitimement qu’elle est une œuvre de salubrité publique non seulement pour le Mali, mais aussi pour l’ouest-africain et même l’ensemble du continent noir et, sans doute aussi, d’autres parties de la planète, car tous auraient subi des coups de boutoir de ces islamistes si d’aventure ils avaient réussi à faire de la zone qu’ils cherchaient à occuper un bastion imprenable.
Kidal ! La ville où se sont refugiés les membres du MNLA se présente en ce moment comme un havre de paix jouissant d’un statut spécial enrobé d’une certaine impunité de fait ; pour le dire tout net, on semble vouloir réserver à Kidal un sort bien spécial, au motif qu’elle constitue un refuge pour les hommes du MNLA. Ce faisant, on accorde à ses combattants un régime bien spécial, au regard du traitement infligé à ceux d’Ansar Dine et du Mujao.
La raison, il semble bien qu’on la devine : les revendications qu’ils ont présentées sont d’un tout autre ordre que celles des djiadistes purs et durs ; de plus, ces derniers jours, le MNLA après s’être démarqué des «fous d’Allah», a même offert sa collaboration aux troupes françaises et s’échinent à tout mettre en œuvre pour convaincre les uns et les autres de son existence de sa bonne foi. Et il semble qu’ils aient réussi un tant soit peu, puisqu’à présent ils vivent en toute quiétude dans leur «ville» de Kidal.
C’est peut-être là qu’il faudra éviter de tomber dans le piège si savamment tendu. Céder à ces avances peut s’avérer de tous les dangers. Car, il est permis, tout d’abord, de s’étonner de ce revirement d’un groupe qui, dans un passé récent, a tout de même pactisé avec ces hommes qu’il se plaît aujourd’hui à vouer aux gémonies ; ensuite, qui, aujourd’hui, peut s’e risquer à prendre pour crédibles à 100% les signes de bonne volonté du MNLA ?
Car, enfin ce serait trop vite oublier que c’est tout de même cette structure qui a choisi de porter le premier coup de canif au pouvoir républicain malien, aux premières heures de l’année 2012 ; les autres hordes ont trouvé dans leur cheminement une voie déjà toute pavée ; il serait injuste à ce jour de chasser les démons djihadites en protégeant les "anges" du MNLA.
Et enfin, à supposer qu’on les sécurise dans leur oasis de Kidal, qui dit que, dans un avenir plus ou moins proche, ils ne tireront pas parti de l’immunité qu’on leur aura généreusement accordée pour se refaire des forces dans le but de revenir avec fracas, histoire d’exiger plus et mieux que ce qu’ils avaient jusque-là réclamé.
Il semble qu’à ce jour, il est impérieux de sécuriser le Mali, toutes les contrées du Mali, Kidal y compris, car on n'inhume pas un cadavre en en laissant les pieds dehors. La phase militaire passée, on pourrait alors se mettre autour de la table de négociations avec ceux qui ont des revendications recevables. Mais à présent, rien ne justifie vraiment que l’on choisisse de chouchouter qui que ce soit ; pas plus le MNLA que tout autre mouvement rebelle.