Pour sa participation aux élections locales prochaines, le FPI (Front populaire ivoirien) pose comme préalable un tête-à-tête entre Ouattara et Gbagbo, une « loi d’amnistie pour que tous les détenus soient libérés et que les réfugiés reviennent au pays ». Le parti de Laurent Gbagbo justifie sa démarche par le fait que tous ses candidats potentiels se recrutent dans les rangs des prisonniers et des exilés. Le fait d’accepter d’aller à la table des négociations est salutaire à plus d’un titre même si la revendication du FPI vient encore gripper la machine des négociations qui a déjà de la peine à démarrer.
A tout le moins, cette revendication, pour le moins surréaliste, atteste que le FPI est aujourd’hui une coquille vide qui pèse moins lourd qu’une plume. A qui la faute si le parti va mal du fait de l’absence de certains de ses militants ? Un grand penseur disait que la vie sur terre est un effort d’adaptation à des situations nouvelles et qu’il n’y a pas d’alternative possible si ce n’est que de disparaître. La vérité est que le FPI n’a pas su anticiper. Les membres qui le composent ont passé le temps à s’adonner au culte de la personnalité en élevant parfois leur leader au rang de démiurge. Or, l’histoire enseigne que les partis qui en font leur leitmotiv meurent toujours de leur propre mort. On ne le dira assez, les jeunes comme Blé Goudé et compagnie, qui devaient constituer le fer de lance du parti, ont passé plus d’une décennie dans la rue, défendant une idéologie noble au départ mais trafiquée par la suite par un Gbagbo qui ne défendait que ses propres intérêts. Au fait, les proches de l’ex-président ont, des années durant, déserté l’école de la politique pour aller à l’école de la haine et de la violence. Les résultats, on les connaît. Que veut-on d’autre que du vide politique si l’écrasante majorité qui devait animer ce parti a commis des crimes et se trouve rattrapée par la Justice ? Certes, l’on dit souvent de la politique que c’est le terrain de toutes les tractations où rien n’est impossible. Mais cette revendication formulée par le FPI relève du monde onirique. Prendre une loi d’amnistie pour les présumés criminels de la crise postélectorale serait synonyme de faire table rase pour repartir du très mauvais pied. Car, les victimes attendent toujours de connaître leurs bourreaux. Il faut même croire que les prisonniers se sentiraient mieux là où ils se trouvent. Les libérer sans justice reviendrait à les jeter en pâture face à des victimes assoiffées de vérité et de justice. Sylvain Miaka, président par intérim du FPI, le sait très bien. Il est tout autant conscient que le préalable qu’il pose au nom de son parti demeure un poisson de mer. A la vérité, le FPI ne dit pas tout. Au fait, il y a une autre raison plus profonde qui pousse ce parti à réclamer l’impossible avant d’aller aux élections. C’est surtout son incapacité à mobiliser encore grand monde. On comprend dès lors que l’amnistie et le tête-à-tête entre Ouattara et Gbagbo ne sont que des alibis que pose le FPI pour ne pas aller à une compétition électorale où l’échec est garanti. Ce fut d’ailleurs la même stratégie qu’il a adoptée lors des législatives dernières. On a du mal à comprendre ce parti qui ne jure toujours que sur le pensionnaire de la Cour pénale internationale, Laurent Gbagbo. Le FPI, ou ce qui en reste, gagnerait à quitter son mythe de caverne pour renaître de ses cendres sans son fondateur.