Accueil    Shopping    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Burkina Faso    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article


 Titrologie



Sidwaya N° 7250 du 10/9/2012

Voir la Titrologie

  Sondage

 Autres articles


Comment

Politique

Libre circulation dans l’espace UEMOA : Des vices de fonctionnement minent le poste juxtaposé de Cinkansé
Publié le mardi 11 septembre 2012   |  Sidwaya


Logo
© Autre presse
Logo de l`UEMOA


 Vos outils




Les Postes de contrôle juxtaposés participent à l’ambition de la commission de l’ Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA) d’asseoir un espace de libre circulation des personnes et des biens. Première expérience, le poste-pilote de Cinkansé à la frontière entre le Burkina Faso et le Togo tarde à fluidifier effectivement ces échanges transfrontaliers. Construit à hauteur de sept (7) milliards F CFA et exploité par un concessionnaire pour une durée de vingt (20) ans, son impact sur la libre circulation se fait encore attendre.

Dans la mise en œuvre de la libre circulation des biens et des personnes tant prônée par les autorités sous-régionales au sommet, les Postes de contrôle juxtaposés (PCJ) s’avèrent être des composantes-clés. Ce projet vise l’uniformisation des procédures et la réduction du temps de passage, l’allègement, l’efficacité et la célérité des contrôles, la fluidité du trafic ainsi que l’élimination des faux frais.
Le PCJ de Cinkansé, à la frontière entre le Burkina Faso et le Togo, doit servir de projet-pilote et ouvrir la voie aux dix autres postes prévus dans l’espace UEMOA. Les administrations burkinabè et togolaise qui ont ainsi la lourde charge de relever ce premier défi, trouvent un modus vivendi : le principe du transit électronique sans rupture de charge à la frontière. « Concrètement, cette procédure signifie que nos deux pays s’accordent sur une convention qui définit le rôle de chaque administration à l’arrivée de la marchandise sur le site. C’est-à-dire que lorsqu’une marchandise arrive à Cinkansé en provenance du Togo, la douane de ce pays procède aux formalités de sortie au niveau de son système informatique et transfère le dossier à la douane burkinabè qui effectue les formalités d’entrée sur notre territoire et le véhicule continue son chemin jusqu’au bureau de destination », explique le chef du bureau des douanes du Burkina de Cinkansé, Hilaire Ky. Le bureau de destination de la marchandise peut être Ouagadougou ou Bobo-Dioulasso en ce qui concerne le Burkina Faso. Pour la destination Mali, ce sont Faramana, Thiou et Koloko. Et Kantchari pour les sorties vers le Niger. En clair, il s’agit d’effectuer une seule procédure douanière avec un document unique valable d’un bout à l’autre. « Si le système est opérationnel, selon les calculs des informaticiens et des techniciens, un véhicule ne doit pas passer plus de 10 mn en frontière », ajoute-il. Les textes régissant donc le PCJ de Cinkansé sont si clairs que leur bonne application ne peut que favoriser la libre circulation des biens et des personnes dans l’espace UEMOA.
Près de deux années après l’occupation du bâtiment R+1 juste sur les dernières portions du territoire burkinabè, presque tous les corps (douane, police, eaux et forêts, services sanitaires et phytosanitaires) des deux pays, sont en effet à leurs postes respectifs. Ils ont la charge d’assurer le plein fonctionnement du site.
Dans la vaste cour, de nombreux camions sont stationnés en attente de remplir les formalités douanières. Les conducteurs roupillent sous leurs gros engins en attendant l’ouverture des bureaux à 15h. « Avant le poste, il y avait des embouteillages et des difficultés de stationnement. Nous avons maintenant un parking et tout est désormais fluide. Je suis arrivé vers 11h et d’ici à 16h je compte pouvoir continuer », admet Seydou Traoré, une fois tiré de sa sieste.

Un PCJ en léthargie

La disponibilité d’un parking réjouit les chauffeurs. Cependant, pour ce qui est du fonctionnement du poste, la réalité est tout autre, surtout pour la douane, l’un des pans importants du dispositif. « Les procédures ont été lancées depuis mai 2011 sans que les deux administrations des douanes qui devraient travailler en étroite collaboration aient pu élaborer leur manuel de procédures et parvenir à l’interconnexion de leur système informatique », avoue le chef de bureau Hilaire Ky. Son homologue togolais, Oscar Essien, embouche la même trompette : « Nous n’avons pas encore de connexion informatique entre les deux douanes. C’est un gros handicap ». Pour le moment, toutes les formalités douanières se font manuellement entre les deux bureaux, ce qui occasionne toujours une perte énorme de temps pour les usagers de l’axe Ouagadougou-Lomé. Aussi, la question de la caution (la garantie obligatoire dans toute opération de transit) constitue-t-elle, selon Hilaire Ky, une équation non encore résolue par les deux pays. Le Togo comme le Burkina Faso disposant chacun de sa caution nationale, il est obligatoire de mettre en place une garantie unique.
« Les Togolais peuvent prélever le fonds de garantie à leur niveau et trouver un mécanisme pour le partager avec notre garantie nationale. Et vice versa, pour le transit sur le Togo, que la garantie nationale du Burkina Faso qui est gérée par la Chambre de commerce puisse également percevoir ce fonds et le reverser dans le compte, avec une clé de répartition propre à chaque pays », propose le chef de bureau de Cinkansé-Burkina. En outre, la question des commissionnaires en douanes agréés, profession règlementée par l’UEMOA, même si chaque Etat dispose de ses propres textes en la matière, n’est pas encore tranchée. Pour le convoyage par exemple d’une marchandise jusqu’au Burkina Faso, le transitaire qui se trouve à Lomé prendra un certain nombre d’engagements avec le bureau de départ pour mettre en route le colis. Pour Hilaire Ky, cela veut dire que si cette marchandise ne sort pas du territoire togolais ou en cas de problème quelconque, le bureau de départ du port va, naturellement, poursuivre ce transitaire et le propriétaire du colis.
Or, si la marchandise franchit la frontière et arrive au Burkina Faso, ajoute-t-il, étant donné que ces maisons de transit basées à Lomé ne sont pas reconnues juridiquement par les autorités burkinabè, il sera difficile de poursuivre le transitaire ou le propriétaire. Alors qu’avec le PCJ, la frontière devient juste un bureau de passage (l’engagement pris dès le départ doit couvrir la marchandise jusqu’à destination), Hilaire Ky se pose cette question cruciale toujours sans réponse : « Comment trouver un mécanisme, un cadre juridique qui permette d’engager de bout en bout la responsabilité du commissionnaire en douanes ? ».

« Aucun changement… »

Enfin, le suivi satellitaire des véhicules en transit en vue de la suppression de l’escorte, surtout pour le Burkina Faso, n’est pas encore assuré. Afin de sécuriser ses recettes publiques, l’escorte est imposée par le Burkina Faso, et la douane a pris dès lors des dispositions particulières pour assurer le convoyage des marchandises à destination de Ouagadougou ou pour la sortie. « Si les PCJ devraient connaître un plein fonctionnement, organiser encore l’escorte serait un alourdissement du système et les véhicules perdront beaucoup de temps. Elle est donc appelée à être supprimée pour qu’un autre système de suivi du transit, par satellite, puisse voir le jour », indique Hilaire Ky, tout en précisant que les Togolais ont déjà adopté le système satellitaire.
Au vu de tous ces textes non encore harmonisés entre le Togo et le Burkina Faso, il est indéniable que le PCJ de Cinkansé, érigé pour favoriser la libre circulation des personnes et des biens entre ces deux pays de l’UEMOA, éprouve d’énormes difficultés de fonctionnement. Sur le site, les acteurs assurent que rien n’a changé malgré l’érection du poste. « Nous n’avons observé aucun changement. Tout se déroule comme avant. Lorsque tu dédouanes tes marchandises à Cinkansé tu rencontreras encore des postes de contrôle un peu partout dans les deux pays », déclare le président du syndicat des transporteurs de Cinkansé, Issa Guessongo. Il en veut pour preuve, les postes de contrôle de police et de douanes togolais toujours en service à quelques mètres du PCJ où les usagers continuent de payer à chaque passage. En territoire burkinabè, la police opère aussi hors du poste, des contrôles de véhicules et des passagers. « Ce site est loin d’être un poste de contrôle juxtaposé. Car les douanes des deux pays ne travaillent pas en synergie. J’ai l’impression que pour l’érection de ce poste, l’UEMOA a mis la charrue avant les bœufs », souligne de son côté, un des responsables de l’association des transitaires de Cinkansé, Seydou Tondé. En plus de la non-conformité des textes des deux pays, il indique que l’institution sous régionale n’a pas communiqué suffisamment sur l’opportunité de la construction d’un PCJ. Pour lui, le saccage des barrières de déviation du poste par la population en mars 2011, en protestation contre le paiement des redevances, est une preuve tangible. « Il fallait d’abord préparer les usagers et non exiger directement les paiements. Une personne qui ne connaît rien d’un produit n’acceptera jamais verser une redevance de 50 000 FCFA. Les gens pensent que cet argent va dans la poche du transitaire puisqu’il est versé à son niveau. Les chauffeurs nous accusent, la douane aussi, de même que Scanning système, le concessionnaire chargé de la gestion du site », déplore le président des transitaires, Issoufou Gnangané.
Services des douanes, transitaires, chauffeurs et Scanning système se rejettent la responsabilité de la léthargie que connait le PCJ de Cinkansé depuis sa mise en route. Les manifestations de mars 2011 contre les redevances, assorties de casse de barrières rendent difficiles les contrôles à la frontière.
Les fraudeurs de tout acabit peuvent passer facilement entre les mailles des filets des forces de sécurité et de services douaniers. C’est pourquoi la police burkinabè poursuit d’ailleurs ses contrôles dans leur ancienne enceinte. Le chef de bureau de Cinkansé, Hilaire Ky tout en reconnaissant que les plaintes des chauffeurs sont justifiées, affirme qu’il est difficile de lever toutes les barrières dans ce contexte.
« Jusqu’à présent, nous continuons d’enregistrer manuellement les dossiers pour que les véhicules aillent faire les formalités à Bittou. Alors que dans la formule des PCJ, tout devrait se passer à Cinkansé et dès que le véhicule quitte la frontière, il ne fait que traverser Bittou. Or Bittou (NDLR : Bittou située à 35 km de Cinkansé et abritant un poste de duanne) ne peut pas aussi arrêter de lever le transit, puisque Cinkansé n’est pas opérationnel », indique-t-il.
Le PCJ de Cinkansé, poste-pilote de l’espace UEMOA clopine. Celui de Malanville à la frontière nigéro-béninoise qui devrait constituer le 2e poste de l’espace, tarde à se concrétiser. Et c’est la libre circulation des biens et des personnes qui en pâtit.

Sié Simplice HIEN

LIENS PROMOTIONNELS


 Commentaires