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Le Pays N° 5289 du 1/2/2013

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Appel au dialogue avec le MNLA : A quel jeu joue la France ?
Publié le vendredi 1 fevrier 2013   |  Le Pays




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Depuis Clausewitz, nous savons que la victoire militaire est la condition de la réalisation de l’objectif politique. Mais, dans le cas de la situation malienne, les principes classiques du stratège allemand volent en éclats. Au Mali, la guerre actuelle combine les aspects asymétrique et conventionnel. Par conséquent, la victoire opérationnelle ne garantit pas ici le succès stratégique et politique. Consciente de cette réalité, la France invite et incite les autorités maliennes légitimes à ouvrir, rapidement, la page du dialogue et des négociations avec le MNLA. A l’heure actuelle, ce mouvement qui a perdu la guerre réelle face aux djihadistes, a choisi de mener à Kidal, une guerre des symboles. Il refuse toute coopération avec les armées malienne et africaine et cherche à créer ici une zone tampon. Pourtant, sur le plan militaire, le MNLA ne dispose d’aucune puissance réelle sur le territoire de l’Azawad qu’il prétend vouloir rendre indépendant. Le MNLA, ce n’est pas du tout le FLN algérien. Mouvement national malien, il a, par la violence armée aveugle, mis en cause l’existence, la survie et la légitimité de l’Etat du Mali et surtout la paix intérieure.

Aujourd’hui, le Mali se défend donc contre trois grandes frayeurs de son histoire : l’anarchie, la guerre et le terrorisme islamiste. Face à un MNLA qui a fini par avoir peur de lui-même et qui veut exorciser cette peur par une fuite en avant suicidaire, l’Etat légitime du Mali, sûr de son autorité, doit se montrer capable de maîtriser et de dominer la méfiance entre Maliens. Dans la situation actuelle, le Mali ne peut mettre en sourdine les problèmes de fond qui ont engendré la guerre. La question unique est : que faire du MNLA ? On ne peut pas exiger de la France de trancher cette question strictement inter-malienne. Il est vrai que le parti pris systématique de certains milieux français en faveur de la cause tourègue, des peuples et groupes du désert, ne peut manquer de susciter méfiance et doute sur les dessous de l’intervention militaire française. Certains détracteurs de l’opération militaire de la France n’hésiteront pas à dire que si elle est intervenue au Mali, c’est pour protéger les Touaregs et non le peuple malien. Et face aux « questions » bretonne, corse, basque antillaise, Kanak, qu’a fait la France ? Elle a systématiquement rejeté toute idée d’indépendance pour ces minorités culturelle et nationale. Elle ne peut donc exiger de l’Etat-Nation malien, prolongement historique de l’Etat-Nation français, de valider l’idée folle d’indépendance défendue par le MNLA. La France ne doit pas redonner de la force et une seconde vie à ce mouvement qui ne représente aucunément la volonté du peuple malien. Historiquement, l’idée d’indépendance de l’Azawad est condamnée et elle doit être combattue avec la dernière énergie, avec le soutien des communautés touarègues elles-mêmes. Comme l’avait si bien vu l’historien burkinabè Joseph Ki-Zerbo, « le micro- Etat est structurellement inapte au développement ». Cela dit, il ne s’agit pas, comme dans les Balkans à l’époque, d’une guerre éthique et confessionnelle. Au Mali, on ne peut pas éviter la question d’un règlement durable de la question touarègue sans l’implication pleine et entière des Touaregs eux-mêmes. Cependant, il ne faudra pas se contenter avec eux, des négociations verbales et vaines dont les recettes ne résisteront pas à l’épreuve du temps. La paix, comme la république et la démocratie, c’est d’abord et avant tout une manière de penser, d’agir et de vivre. Désormais, le MNLA doit savoir que dans un Etat légitime, dans une société démocratique, il y a du permis et du défendu et que toute revendication n’est pas forcément juste. Au Mali, il faudra, à l’avenir, un changement d’orientation des esprits. Prenons-y bien garde : négocier ne saurait être une quelconque comédie ou tragi-comédie gouvernementale, jouée au nom du peuple malien invité bêtement à applaudir.

L’escroquerie au dialogue, à la négociation et à la paix est le ferment des guerres de demain. C’est pourquoi avant toute chose, il faut réaffirmer, face au MNLA, les impératifs républicains et démocratiques. Sinon, dans le Mali d’après-guerre, de nouvelles forces destructrices n’hésiteront pas, une fois de plus, à transférer des problèmes de développement économique et social vers la sphère de conflits dits ethno-culturels ou religieux. Il ne faut ni sous-estimer, ni surestimer la question touarègue, il faut la restituer à sa vraie place. Ici, Rousseau a vu juste : « Tout tient à la politique ». Ce qui unit tous les Maliens au-dessus de tout ce qui les divise, c’est la République, et non l’idée d’indépendance portée par un groupuscule sectaire et violent.

Abdoulaye BARRO

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