Selon l’OMS, il faut six semaines sans nouveau cas pour déclarer la fin de l’épidémie d’Ebola. Au Liberia, un des pays les plus touchés par le virus, alors qu’on s’acheminait avec soulagement vers la fin de ce temps d’observation, retour à la case départ : en effet, le samedi 21 mars 2015, un nouveau cas d’Ebola y a malheureusement été découvert. Le même jour, le président de la Sierra Leone voisine a décrété le confinement de ses compatriotes pendant trois jours à compter du 27 mars : durant ce temps, des équipes interrogeront les habitants à la recherche d’éventuels malades, et rappelleront les règles à suivre, notamment lors des rites funéraires. En Guinée, le président Alpha Condé avait, lui, mis en garde en début de semaine contre tout relâchement face à la fièvre hémorragique : « Ebola, ce n’est pas fini ! » avait-il martelé.
Comme on le voit, dans les pays les plus touchés par l’épidémie d’Ebola, malgré le recul de celle-ci, l’heure n’est pas à la baisse de la garde face à la « peste rouge ». Et il y a de quoi, car, tenez-vous bien, le nouveau patient signalé, une femme, aurait, selon les autorités, probablement été contaminée lors d’un rapport sexuel avec un homme ayant survécu à Ebola, car le virus reste dans le sperme environ trois mois après la guérison du malade. De plus, «même si on arrivait au bout des 42 jours réglementaires sans nouveau cas, tant que la Sierra Leone et la Guinée connaissent de nouveaux cas de contamination, ce sera un risque pour le Liberia» selon Lewis Brown, porte-parole du gouvernement libérien. Comme quoi la moindre résurgence du virus peut être une source de propagation vers les pays voisins, et cela, de proche en proche en cercles concentriques.
C’est dire à quel point ce nouveau cas vient tout remettre en cause. S’il ne se passait pas de jour sans des nouvelles alarmantes sur Ebola, reconnaissons qu’il y a longtemps qu’on n’en entendait plus parler : ainsi depuis des semaines, on assistait à un reflux de la maladie en parallèle avec la reprise des activités économiques, la réouverture des écoles, la relance des actions politiques et, signe qui ne trompe pas, le départ des soldats américains. Hélas, le grand malade ouest-africain était juste convalescent, pas guéri, et on redoute à présent sa rechute ; d’où le branle-bas de combat, surtout en Sierra Leone. Quand est-ce que tout cela va enfin finir ? Avait-on crié victoire trop tôt ? Est-on retombé dans les travers, ces comportements à risques qui avaient fait le lit de la maladie ? Au plus fort de la lutte contre Ebola, les autorités sanitaires du Liberia n’avaient-elles pas noté avec satisfaction la non-survenue du choléra par exemple en raison de la stricte observation des mesures d’hygiène ?
C’est dire que nous devons prendre avec le plus grand sérieux la mise en garde d’Alpha Condé contre le relâchement dans la lutte pour éradiquer Ebola, en changeant durablement nos habitudes et nos attitudes à risques, pas seulement le temps d’une conjoncture pour après coup renouer avec : que seulement un tiers des gens qui se rendent aux toilettes pour tous besoins confondus se lavent les mains après s’être soulagés est un indice de forte exposition aux maladies. Que des Européens, des Américains puissent se permettre quelques écarts avec la stricte hygiène est peut-être compréhensible dans leur environnement pour ainsi dire aseptisé, mais dans nos pays où nous mangeons, buvons et dormons avec les micro-organismes, c’est là accorder un bonus aux germes. Vigilance donc face à ce fléau sanitaire qui, depuis son apparition en décembre 2013 en Guinée, a fait plus de 10 200 morts sur plus de 24 700 cas dans neuf pays au total, selon le dernier bilan de l’OMS, et dont les impacts économiques sont déclinés en termes de perte du produit intérieur brut, de menace contre la sécurité alimentaire, de forte baisse de l’emploi et des moyens de subsistance sans oublier la diminution des investissements.
Alh-Assane Rouamba