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BURKINA : La transition entre le marteau du peuple et l’enclume du terrain
Publié le jeudi 26 fevrier 2015  |  Le Pays
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© Présidence par DR (Photo d`archive utilisée juste a titre d`illustration et ne correspond pas forcément avec le contenu de l`article)
Le Président du Faso, Michel Kafando, a pris part à la 24è session ordinaire de la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine(UA) à Addis Abeba les 30 et 31 janvier 2015




Le 24 février dernier, le président de la transition, Michel Kafando, recevait les Organisations de la société civile (OSC), dans le cadre de la première session de concertation et de dialogue entre l’Etat et les OSC. Après la prise de contact du début d’année où le chef de l’Etat avait reçu, tour à tour, les OSC et les partis politiques, cette concertation vient témoigner, si besoin en était encore, de la nécessité de communiquer et d’échanger entre gouvernants et gouvernés pour réussir la transition qui est un défi commun à tous les Burkinabè. Cela est une bonne initiative qui mérite d’être saluée, et l’on s’attend à ce que cette première session en appellent d’autres, avec tous les acteurs de la scène politique burkinabè, pour se parler et se comprendre, afin de savoir dans quelle direction l’on va. Cela permettra de décrisper quelque peu l’atmosphère, car, de plus en plus, l’on a le sentiment que les autorités de la transition sont prises entre le marteau du peuple et l’enclume du terrain, tant les revendications s’accumulent sans que les solutions, quand il y en a, ne suivent forcément avec le même rythme.

Beaucoup avaient vu dans la chute de Blaise Compaoré, la fin d’une époque

Si fait qu’aujourd’hui, bien des Burkinabè sont déçus de l’évolution de la situation, et n’hésitent pas à le manifester ouvertement. Cela pourrait justifier la baisse de la cote de popularité des autorités de la transition, qui sont en passe de perdre la confiance d’une partie des populations.

En effet, le constat général des populations est que les choses ne bougent pas comme elles le voudraient, et que l’Exécutif aussi donne l’impression de parler plus qu’il n’agit. Alors que le peuple attend des actes concrets, qui tranchent avec la gouvernance de Blaise Compaoré. L’impatience perceptible des populations se justifie par le fait que beaucoup avaient vu dans la chute de Blaise Compaoré, la fin d’une époque. Aussi, dans l’euphorie des premiers jours, les nouvelles autorités se sont-elles laissé aller à des déclarations et des promesses qu’elles ont, aujourd’hui, toutes les peines du monde à tenir. Confortant plusieurs de leurs compatriotes dans leur conviction que ce n’était que des déclarations purement populistes.

De ce point de vue, l’on pourrait dire que c’est la transition elle-même qui a cherché ses problèmes.

Si les autorités s’étaient, dès le départ, clairement fixées comme seul objectif, l’organisation réussie des élections, elles pousseraient moins de cheveux blancs à l’heure actuelle, face aux multiples sollicitations dont elles sont l’objet, de la part de beaucoup de leurs compatriotes impatients (et on peut le comprendre) de récolter les fruits de leur engagement dans le combat pour le changement et l’espoir de lendemains meilleurs.

Aujourd’hui, force est de constater que l’équipe dirigeante est à la peine. Car, le terrain est beaucoup plus miné qu’elle ne l’imaginait. Et il apparaît de plus en plus certain que pendant son long règne, Blaise Compaoré a méticuleusement tissé une véritable toile d’araignée dans le pays, tant sur les plans politique qu’économique, avec une emprise et une mainmise totales sur tous les secteurs. Aujourd’hui, la transition qui paraissait une simple formalité, se révèle presqu’une montagne à déplacer. Si fait que les autorités apprennent à leurs dépens, et le peuple avec, que ce n’est pas du jour au lendemain, ni en seulement quatre mois, que l’on peut balayer un système vieux de vingt-sept ans. L’administration est encore truffée d’individus acquis à la cause du défunt régime. C’est pourquoi les Burkinabè doivent s’armer de courage et de patience, et se parler franchement pour ne pas se tromper d’adversaire. Car, démêler l’écheveau ne sera pas chose facile. Cela, les autorités de la transition semblent l’avoir compris ; malheureusement, un peu sur le tard, alors qu’elles sont prises par le temps et qu’elles croulent sous le poids des revendications et des promesses non tenues.

La transition n’est pas l’affaire du seul président Kafando et de son gouvernement

A présent, il faudrait aller à l’essentiel, car il ne reste plus que sept petits mois pour arriver aux élections. Le défi majeur, c’est de réussir ces élections. A côté de cet objectif primordial, les autorités de la transition devraient se définir deux ou trois autres priorités, assorties de calendriers et de délais d’exécution précis qu’elles devraient s’engager à réaliser. Par exemple, pour les dossiers Thomas Sankara et Norbert Zongo, il s’agit non seulement de les rouvrir, mais surtout de poser les actes judiciaires nécessaires à leur relance, pour leur permettre de suivre leur cours, même après la transition. Autrement, Michel Kafando et son équipe risquent de donner le sentiment de ruser avec le temps, pour refiler la patate chaude au prochain régime. Pour le reste, même si les revendications des populations sont légitimes et fondées, il est clair que la transition ne peut pas tout faire. En cela, les autorités gagneraient à dire clairement et courageusement ce qu’elles peuvent et ce qu’elles ne peuvent pas faire. Leurs intentions sont bonnes, mais encore faut-il qu’elles soient suivies d’actes concrets et visibles, pour être plus crédibles. Autrement, au moment de passer le témoin, leur bilan se résumera en une litanie de bonnes intentions et de vœux pieux pour laquelle les Burkinabè n’auront vu que dalle !

En tout état de cause, cette transition n’est pas l’affaire du seul président Kafando et de son gouvernement, même si ce sont eux qui sont aux commandes. C’est l’affaire de tous les Burkinabè, qui veulent bâtir une société plus juste et plus égalitaire, en rupture avec les mauvaises pratiques du passé. Et chacun doit y mettre du sien, pour qu’elle réussisse. Tout le monde y gagnerait, et c’est l’image du pays qui s’en trouverait rehaussée.


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