C’est un gros scandale ! La saisie de l’important stock de cannettes de sucrerie, opérée le jeudi 19 février 2015, à Gampèla à la périphérie de Ouagadougou par l’Unité d’intervention polyvalente de la police nationale (UIP-PN), continue de défrayer à juste titre, la chronique. Et les débats allaient être moindres, si des commerçants sans scrupule ne s’étaient pas employés à maintenir coûte que coûte ces Fanta, Coca-cola, Sprite, Malta et autres jus périmés depuis 2011 sur le marché. Ils ont préféré effacer et consigner de nouvelles dates sur les bouteilles pour continuer à les écouler sur le marché, tant pis pour la santé des consommateurs. Et c’est l’Entreprise Ouédraogo Boureima et Frères (OBOUF), qui semble être au cœur de cette ténébreuse affaire. Comment une entreprise peut-elle ignorer royalement sa responsabilité sociale en mettant sur la place du marché, des produits impropres à la consommation ? Le problème est sérieux d’autant plus qu’il concerne des produits de plus en plus prisés et intégrés dans les habitudes de consommation des Burkinabè. Pire, on ne sait pas depuis combien de temps cet entrepreneur véreux s’adonne à ce commerce suicidaire. Après un constat fait par les services du Laboratoire national de santé publique, sur l’expiration des produits courant 2014, les responsables de l’entreprise ont fait une déclaration écrite sur l’honneur, promettant un remplacement de la cargaison par le fournisseur tunisien, qui l’aurait embarquée par erreur. Une couleuvre difficile à avaler ! La police scientifique a fait des prélèvements à des fins d’analyses dont les résultats sont fortement attendus, mais il faut craindre pour la dangerosité de ces sucreries. Car l’on ne peut décider de «prolonger» la vie d’un produit alimentaire au gré de ses calculs mercantilistes. Et c’est à se demander où se trouvait la Ligue des consommateurs, pendant qu’une telle arnaque s’organisait. Ce n’est pas surprenant quand on se rappelle la bataille de chiffonniers à laquelle on assiste au sein de cette structure. Que ce soit la Ligue de Pierre Nacoulima ou celle de Gilbert Hien, on s’en moque ! Le consommateur burkinabè veut d’une ligue qui défende réellement ses droits et le protège. Il faut féliciter cet intègre Burkinabè qui a mis la puce à l’oreille de l’UIP-PN. Sa collaboration salutaire a permis de mettre fin à une activité commerciale génocidaire et mérite d’être suivie par d’autres citoyens. Car en plus de l’entrepôt de Gampèla, l’entreprise concernée dispose d’une autre unité de stockage au quartier Cissin de Ouagadougou. Et cela semble n’être que la face visible de l’iceberg. Mais, s’il y a un corps qui doit se sentir interpellé, c’est celui de la douane. Notre système de contrôle douanier est-il défaillant, poreux ou fait-il encore montre de sa corruption avérée? Se demandent certainement des consommateurs manifestement désemparés en apprenant la nouvelle. Car à y voir de près, l’entreprise incriminée semble avoir opté pour l’importation des vieux stocks périmés depuis leur lieu de fabrication pour des raisons que l’on ignore. Cet exploit des policiers relance la question cruciale de la corruption au sein de l’administration douanière burkinabè. Les douaniers auront du mal à prouver qu’ils n’y sont pour rien dans ce deal juteux des Frères OBOUF. Et sur ce terrain, les gabelous devront déployer de grands arguments pour rassurer l’opinion publique, surtout dans le contexte post-insurrectionnel où les attentes et la vigilance des populations sont grandes. D’ailleurs, la dynamique de la transition prône une certaine transparence dans toutes les sphères administratives. La douane, qui par la voix de son syndicat, a déjà pris ses distances avec ce commerce illicite, est donc interpellée. Les coupables sont entre les mains de la police, mais quel sort la justice leur réserve ? Car le plus souvent, les procédures judicaires n’aboutissent pas et les fautifs sont souvent relâchés. Au point que l’on se demande si les efforts de la police en valent la peine. Puisque ces derniers circulent au vu et su de tous, s’ils ne narguent pas leurs victimes. Au moment où la justice est en quête de crédibilité et de confiance, elle se doit de se saisir de cette affaire et au plus vite. Il est inadmissible qu’un tel commerce ait cours dans notre pays.
Beyon Romain NEBIE
nbeyonromain@yahoo.fr