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Léon-Paul Toé, DG de l’Urbanisme et des Travaux fonciers : « Le lotissement doit se réaliser désormais sur la base de besoins exprimés»
Publié le mardi 24 fevrier 2015  |  Sidwaya
Léon-Paul
© Autre presse par DR (Photo d`archive utilisée juste a titre d`illustration et ne correspond pas forcément avec le contenu de l`article)
Léon-Paul Toé, directeur général de l’urbanisme et des travaux fonciers




Le ministère de l’Habitat et de l’Urbanisme organise, le mardi 24 février, un atelier national de validation de l’avant-projet de la révision de la grille des équipements urbains au Burkina Faso. A cet effet, le Directeur général (DG) de l’Urbanisme et des Travaux fonciers, Léon-Paul Toé explique ladite grille et se prononce sur les perspectives en matière de lotissement, à travers cet entretien accordé aux Editions Sidwaya.

Sidwaya (S.) : En quoi consiste la grille des équipements urbains au Burkina Faso ?


Léon-Paul Toé (L.P.T.) : A l’occasion des aménagements que l’on réalise, notamment les opérations de lotissement qui sont assez connues au Burkina, l’Urbaniste qui fait le plan d’aménagement organise le quartier sur la base des besoins en habitations mais aussi en équipements qui doivent accompagner la vie en ville et son bon fonctionnement. C’est ce que l’on appelle des équipements connexes. Depuis 1982 l’on avait une première grille qui organisait la programmation des équipements dans les lotissements, dans les opérations d’aménagement au Burkina. Avec l’évolution, cette grille a été dépassée par le temps. On l’a relue en 2006 pour nous conformer à l’évolution réelle du tissu urbain de nos villes.


S. : Pourquoi réviser encore cette grille alors?


L.P.T. : Nous sommes aujourd’hui en 2015, il va sans dire que le processus d’urbanisation a connu une évolution significative au point qu’il faut qu’on regarde encore de près la conformité de la programmation de nos équipements urbains par rapport aux besoins nouveaux des populations de nos villes. C’est pourquoi, au sein du ministère en charge de l’habitat à travers la direction générale de l’Urbanisme et des travaux fonciers, l’on a procédé donc à une relecture, une mise à niveau de cette grille qui existe comme instrument qui permet de bien aménager les quartiers, les espaces lotis au Burkina Faso. L’atelier à venir c’est surtout pour s’accorder avec tous les acteurs qui interviennent dans la construction de la ville à travers la réalisation d’équipements spécifiques dans divers secteurs à savoir l’éducation, la santé, la sécurité, les sports et loisirs, des équipements marchands, sur des normes à retenir de commun accord pour régir les superficies nécessaires à la réalisation de chaque équipement dans les espaces lotis. Nous rappelons aux populations qu’en ville, il y a des règles auxquelles il faut se conformer. En ville chacun ne fait pas ce qu’il veut là où il le veut. Il faut faire ce qui est recommandé là où il le faut. Déjà nous sommes en train de finir le foncier de nos villes en quelques générations. Cela n’est pas du tout intéressant.


S. : Quel a été le processus de révision de cette grille ?

L.P.T. : En premier lieu, nous avons regardé déjà par rapport à l’évolution, quels sont les aspects de la grille qui semblent dépassés. Par exemple, à un moment donné vous déterminez une superficie pour les écoles primaires parce que selon la vision populaire, l’on ne les construit qu’en rez-de-chaussée. Mais aujourd’hui avec les progrès dans la construction au Burkina on peut les construire en hauteur. Cela modifie les superficies nécessaires pour les différents équipements. Voilà une nouvelle donne. La dernière révision de la grille date de 2006, or depuis lors les choses ont beaucoup bougé. La première étape du processus était donc d’évaluer nous-mêmes ce qui est d’actualité et ce qui est dépassé. Nous avons regardé ce qui a évolué dans notre société et qui peut nous permettre d’utiliser le sol mieux qu’avant. Ensuite, nous avons fait une sorte de recueil documentaire et puis regardé aussi ailleurs, dans les autres pays comment cela se passe et comment les acteurs s’y prennent pour réaliser certains équipements pour compléter nos données. Nous avons élaboré un projet et nous avons eu à organiser une concertation avec tous les ministères sectoriels, à savoir les ministères en charge de l’éducation, les enseignements supérieurs, la santé, les sports et loisirs pour échanger autour de nos propositions. Nous avons reversé les observations de ces échanges dans le projet de grille. Nous avons également concerté tous les techniciens qui interviennent dans le domaine comme les urbanistes, les architectes, les géomètres, avec qui nous avons encore rediscuté des propositions contenues dans la grille. La phase actuelle c’est l’atelier national qui va réunir officiellement tous les départements ministériels et les professionnels intervenant dans l’urbain y compris les organisations de la société civile intervenant dans le secteur.


S. : Quel est le contenu actuel de l’avant-projet de la grille qui sera soumis pour validation au cours de l’atelier national le mardi 24 février 2015 ?


L.P.T. : Le contenu de la grille renvoie aux normes de programmation, c’est-à-dire que dans un aménagement on a besoin d’un certain nombre d’équipements. Il y a des équipements d’éducation (des écoles, des lycées, des centres de formation), de santé, des espaces de loisirs et ceux dédiés au sport. Quelles sont les superficies qu’on va affecter à ces différents secteurs dans un espace aménagé pour que la zone soit cohérente et qu’elle soit viable. C’est pour organiser la vie des hommes dans la zone aménagée. La vie ne concerne pas que l’habitation. Bien vivre dans le quartier cela suppose que dans le quartier il y a des équipements qui doivent exister de façon obligatoire. Si une commune nous soumet un projet de lotissement, c’est sur la base de cette grille que nous évaluons la pertinence du projet de lotissement. Nous regardons est-ce que l’espace à aménager comprend des équipements obligatoires et nécessaires pour une vie harmonieuse dans le quartier.


S. : De façon concrète montrez-nous l’importance de la grille des équipements urbains ?


L.P.T. : la grille permet de s’assurer que les populations ont les services dont elles ont besoin pour vivre. Si dans le quartier il manque des services de proximité cela veut dire qu’il y a un problème de programmation de l’implantation des équipements. Du reste, par la suite l’on comprendra les retombées de cette grille sur beaucoup d’aspects même pour ceux qui réalisent des équipements dans le secteur privé. Des gens qui demandent un terrain, soit pour réaliser une école, soit pour faire un centre de santé ou construire un lycée, il y a des superficies adaptées à cela. Chacun n’a pas à dire moi j’ai dix hectares je veux y construire une école par exemple. Non. Pour réaliser une école, il existe une superficie nécessaire. Nous allons désormais travailler sur cette base. Dorénavant, ce ne sont pas sur des superficies non contrôlées que l’on va autoriser les demandes de terrain pour telle ou telle activité. Nous aurons une norme pour dire aux gens en fonction de l’activité qu’ils veulent mener, la superficie qui y est adaptée.

S. : L’on remarque surtout dans les villes de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso des détournements de destination des équipements. Par exemple on demande le terrain pour une école mais à la grande surprise ce sont des habitations qui y poussent. Pourquoi cet état de fait ?


L.P.T. : C’est exact. C’est la situation que l’on a aujourd’hui. Il faudra justement que l’on évolue par rapport à cela. D’où l’intérêt de cette grille. Les gens doivent comprendre, qu’une fois que l’on a fait un aménagement cela signifie qu’on a donné des vocations à des terrains qu’il ne faut pas modifier. Sinon vous modifiez en même temps l’équilibre général. Comme conséquence immédiate, des enfants n’auront pas d’école près de chez eux, tout comme des populations n’auront pas un centre de santé vers chez eux si le terrain prévu pour cela a été réaffecté à un autre usage. Dans un plan aménagé les gens doivent comprendre qu’il y a une cohérence. L’urbaniste qui a élaboré le plan, a réfléchi à l’organisation de la vie de la zone que l’on aménage.


S. : Y a-t-il des sanctions prévues pour ces cas de figure ?


L.P.T. : Le principe même du changement de destination ne doit plus exister. Dans notre entendement, une fois que l’on a identifié l’implantation d’un équipement, jugé utile pour les riverains, il ne faut pas changer de destination. C’est extrêmement important de s’en tenir aux destinations premières qui sont données dans le plan d’aménagement des localités. Exceptionnellement, si l’on rencontre des difficultés particulières dans la réalisation d’un équipement parce que la nature du sol ne convient pas, par exemple, l’on peut délocaliser. Mais il ne faut pas que les gens changent comme ils veulent les destinations des équipements. Nous souhaitons que cette grille s’applique rigoureusement pour limiter les désordres que l’on constate actuellement dans les quartiers.


S. : Dans le processus de lotissement au Burkina Faso, quel est le rôle du ministère en charge de l’urbanisme ?


L.P.T. : Le lotissement est une opération d’urbanisme qui est réglementée par le code de l’urbanisme et de la construction au Burkina Faso. Il y a un décret sur la procédure d’exécution des opérations de lotissement. Nous disposons de ces textes avec le rôle des acteurs. Dans l’exécution des opérations de lotissement chaque acteur intervient avec un rôle précis. Aujourd’hui dans notre pays avec l’émergence des collectivités territoriales on leur a transféré la compétence de lotir. Les maires ont la possibilité de demander un lotissement et la procédure pour l’exécuter est réglementée par le code de l’urbanisme et ses décrets d’application. C’est le ministère de l’Habitat qui autorise le lotissement. Mais celui qui l’exécute, le maitre d’ouvrage, comme l’on le dit, c’est la collectivité territoriale, notamment le maire qui relève du ministère en charge de l’administration territoriale. Il y a des opérations d’intérêt général qui sont exécutées par le ministère de l’Habitat et de l’Urbanisme et ses démembrements.


S. : Il y a eu un communiqué gouvernemental qui suspend les opérations de lotissement sur toute l’étendue du territoire au regard du contexte politique du pays. A quand la reprise de ces opérations ?


L.P.T. : Nous croyons savoir que la réflexion est engagée pour voir comment recadrer la question afin d’avoir un environnement plus sain pour continuer les aménagements. Quelque part, il faut reconnaitre qu’un arrêt dans un secteur n’est pas intéressant. Nous attendons de nouvelles dispositions par rapport à cette situation afin de reprendre et continuer les aménagements. Ceci est nécessaire pour les localités qui sont à leur tout premier lotissement. Cela va leur permettre de planifier l’électrification et l’adduction d’eau de leurs zones. Si l’on n’y prend pas garde cela peut bloquer d’autres actions de développement dans nos collectivités.


S. : Les perspectives en la matière supposent-elles l’application des conclusions des états généraux des lotissements ?


L.P.T. : Nous avons fait les états généraux des lotissements pour que les recommandations soient appliquées. Il faudra qu’il y ait la volonté politique d’appliquer ces recommandations en vue d’un encadrement conséquent et cohérent du secteur. Nous avons reçu comme instruction de veiller à la mise en œuvre des actions majeures notamment la mise en place d’un comité de suivi de ces recommandations, la création de comité ad hoc dans des localités qui ont connu des difficultés spécifiques par rapport à leurs opérations de lotissement surtout à Ouagadougou (les arrondissements de Boulmiougou, Bogodogo), Koudougou… A l’époque on avait validé tous ensemble une nouvelle façon de réaliser le lotissement à travers la Méthode intégrée d’aménagement concertée (MIAC) qui consiste à considérer le lotissement comme une opération d’urbanisme et qui donne toute une procédure. L’idée principale c’est de réaliser le lotissement sur la base de besoins exprimés. C’est d’évaluer d’abord la demande avant de la valider. Au Burkina là où ça coince, quand vous faites le lotissement vous ne savez pas à l’arrivée à qui attribuer la parcelle. C’est toute la difficulté pour attribuer les parcelles. Normalement pour réaliser le lotissement il faut savoir pour qui le faire. La taille des parcelles et les équipements sont fonction de la catégorie de la population qui habite le quartier. Mais si l’on produit les parcelles avant de chercher à qui les attribuer cela entraine les bagarres. Mais lorsqu’au départ la demande est validée de commun accord avec tous les acteurs et les attributaires, il n’y aura pas de tensions ni de spéculations à l’arrivée. Si les bénéficiaires se connaissent déjà, cela peut aussi aider dans le processus de construction de leurs logements et accroitre la solidarité dans le quartier.


Entretien réalisé par Kowoma Marc DOH
dohmarc26@yahoo.fr
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