Politique
Pour l’ancienne majorité : «l’heure de la vérité démocratique sonnera le 11 octobre»
Publié le mardi 10 fevrier 2015 | L`Observateur Paalga
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Nous avons reçu la déclaration commune suivante des partis de l'ancienne majorité, du Front Républicain et des partis alliés, concernant les propositions de dissolution de certaines formations politiques et d'inéligibilité de leurs membres.
Depuis plusieurs mois, des voix s'élèvent dans certains partis de l'ex-opposition et parmi les organisations dites de la société civile pour réclamer la dissolution du CDP et l'inéligibilité des dirigeants de l'ancienne majorité politique pour les prochaines élections présidentielle, législatives et municipales. Les motifs invoqués à l'appui de cette revendication sont variés. Pour les uns, celle-ci serait fondée sur l'application de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, adoptée par l'Union africaine le 30 janvier 2007. Pour les autres, il s'agit tout simplement d'achever l'œuvre de l'insurrection, en détruisant systématiquement tout ce qui peut subsister des forces politiques qui symbolisaient ce qu'ils appellent "le régime Compaoré". Ce projet d'éradication vise en premier lieu le CDP, mais aussi tous les autres partis de l'ancienne majorité et du Front Républicain et, sans doute, pour faire bonne mesure, toutes les formations qui n'étaient pas affiliées au Chef de file de l'opposition. En somme, toutes les formations qui ont commis le "crime" politique de considérer que, face à la polémique que soulevait l'idée de la modification de l'article 37 de la Constitution, on pouvait consulter le peuple par référendum, en se conformant aux procédures prévues à cet effet par notre Loi fondamentale.
La récente crise survenue entre le Premier ministre de la transition et le Régiment de sécurité présidentielle (RSP) a servi de prétexte aux partisans divers de cette mesure extrême pour réitérer leur demande, avec un surcroît de véhémence.
Après le mouvement des Jeunes du MPP, c'est maintenant le tour d'autres responsables d'organisations parapolitiques qui, d'une même voix, exigent le démantèlement du RSP, la dissolution du CDP et de ses alliés ainsi que la mise à l'écart du processus électoral, voire l'arrestation pure et simple des dirigeants de ces formations et leur traduction devant des juridictions d'exception à créer. Parmi ces voix, celle de M. Luc Marius Ibriga, dont on ne sait s'il parle en sa qualité de Contrôleur général d'Etat (qui lui impose une obligation de réserve), ou d'activiste politique.
Les partis politiques signataires de la présente déclaration expriment, avec la plus grande vigueur, leur opposition ferme et résolue à cette manœuvre d'intoxication de l'opinion nationale et internationale.
1 - Sur l'implication dans la crise du RSP
Comme ils l'ont affirmé à de multiples reprises, ni le CDP, ni aucun des autres partis de l'ancienne majorité ou du Front Républicain n'est impliqué de près ou de loin dans le différend qui a opposé récemment le Premier ministre à certains membres du Régiment de sécurité présidentielle. Bien qu'il soit apparemment, de caractère corporatiste, nos partis souhaitent que ce litige, qui met en jeu, manifestement, la stabilité des institutions provisoires du Burkina, trouve une issue durable, afin que des élections ouvertes à toutes les forces politiques, sans exclusive, soient organisées suivant le calendrier prévu. Seuls ces scrutins permettront à notre pays de disposer d'institutions véritablement démocratiques, pour peu qu'ils se déroulent dans les conditions de liberté, d'égalité et de transparence prescrites par la Constitution et par les lois électorales en vigueur.
Concernant la question spécifique de l'organisation et du fonctionnement du RSP, nos partis considèrent qu'elle doit être traitée dans le respect des règles et des usages militaires, sans interférence politique, avec le souci primordial de préserver la cohésion, l'unité et l'efficacité de notre armée nationale. Dans un contexte préélectoral comme celui de la transition, il n'appartient pas aux partis politiques, ni à leurs affidés de décider la réorganisation des forces de défense et de sécurité, au risque de perturber le fragile équilibre des institutions de notre pays. C'est pourquoi nous sommes d'avis que tout projet tendant à engager une réforme globale du statut et des missions du RSP doit être différé pour être conduit par les institutions qui seront démocratiquement désignées, au terme de la transition.
2 - Sur la violation des dispositions de la Charte africaine
Nos contempteurs ne cessent d'invoquer les dispositions de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance pour justifier leur intention d'obtenir la dissolution de nos partis et l'inéligibilité de leurs dirigeants. Nous invitons nos compatriotes à ne pas se laisser abuser par ces fadaises. Examinons ensemble, sereinement, les textes qui fondent prétendument leur réclamation.
Ils prétendent qu'en se déclarant favorables à l'organisation d'un référendum sur la modification de l'article 37 de la Constitution, nos partis ont violé les dispositions de l'article 23 de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance. Ce texte dispose que
"Les Etats parties conviennent que l'utilisation, entre autres, des moyens ci-après pour accéder ou se maintenir au pouvoir constitue un changement anticonstitutionnel de gouvernement et est passible de sanctions appropriées de la part de l'Union :
- Tout putsch ou coup d'Etat contre un gouvernement démocratiquement élu...
- Tout amendement ou toute révision des constitutions ou des textes juridiques qui porte atteinte aux principes de l'alternance démocratique".
Faut-il le rappeler, le projet de modification de l'article 37 de la Constitution, soumis à l'Assemblée nationale, consistait à porter la limitation des mandats consécutifs du Président du Faso de 2 mandats à 3 mandats. En outre, il prévoyait d'inscrire cette nouvelle limitation parmi les dispositions intangibles de la Constitution. Certains partis, tout en déclarant leur opposition à cette réforme, avaient admis le principe qu'elle puisse donner lieu à un référendum.
Avons-nous, ce faisant, fomenté un putsch ou un coup d'Etat contre un gouvernement démocratiquement élu ? La réponse évidente est non.
Avons-nous porté atteinte aux principes de l'alternance démocratique, en décidant de consulter le peuple par voie de référendum sur l'adoption de ce nouveau régime de limitation du nombre des mandats présidentiels ? La réponse est non. Parce que rien dans notre Constitution, ni dans la Charte africaine susmentionnée, ni dans aucun autre texte applicable à cette situation n'interdisait de le faire.
C'est pour cette raison, au demeurant, que la Présidente de la Commission de l'Union africaine, interrogée sur cette question, avait déclaré que les Etats membres avaient la latitude de modifier les règles constitutionnelles relatives à la limitation du nombre des mandats présidentiels, dès lors que cette révision était opérée dans les conditions et suivant les procédures prévues par leurs lois fondamentales.
L'article 10, paragraphe 2 de la Charte précise à cet égard que :
"Les Etats parties doivent s'assurer que le processus d'amendement ou de révision de leur constitution repose sur un consensus national comportant, le cas échéant, le recours au Référendum."
Contrairement à ce que certains veulent faire croire, cette disposition ne signifie pas qu'il faut réunir un consensus préalable de l'ensemble de la classe politique nationale avant d'engager une telle procédure de révision. Ce serait absurde, parce que cela contredirait la règle la plus élémentaire de la démocratie, qui est que face à un choix de société, on vote, avec comme conséquence que la décision de la majorité s'impose à la minorité. Ce que veut dire le paragraphe 2 de l'article 10, c'est précisément que le "consensus national" peut trouver sa traduction à travers le Référendum.
Tout cela est une question de bon sens. Toute autre interprétation de ces dispositions relèverait d'arguties destinées à masquer l'inanité des prétentions de nos adversaires qui, redoutant d'affronter le suffrage des électeurs, veulent tronquer le vote du peuple burkinabè, sous le couvert d'un mouvement insurrectionnel perpétuel. L'heure de la vérité démocratique, celle du choix authentique du peuple burkinabè, sonnera le 11 octobre 2015.
Pour manifester notre bonne foi dans ce débat, nous invitons nos adversaires à aller jusqu'au bout de leur logique. S'ils considèrent, de bonne foi, que nos partis et leurs dirigeants ont violé les règles de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, qu'ils engagent des poursuites contre eux devant les instances compétentes de l'Union africaine. Sinon, qu'ils se taisent et participent à la compétition démocratique dans un esprit républicain.
Nous nous définissons comme des partis politiques démocrates et républicains. Tout au long de l'histoire de ce pays, nos membres, à des titres divers, ont participé à la gestion des affaires de l'Etat, en faisant preuve d'esprit de responsabilité et de patriotisme. S'il y a eu des erreurs ou des fautes de gestion commises par tel ou tel d'entre nos membres, qu'elles soient sanctionnées par l'application des procédures administratives et judiciaires prévues à cet effet. Mais nous n'accepterons pas et le peuple burkinabè non plus qu'une poignée d'activistes vindicatifs s'arroge le droit de décider du sort de la démocratie burkinabè, par des imprécations, par la menace et par la violence.
3- Sur la poursuite de la transition.
Ces vérités étant dites, nous tenons à réaffirmer notre volonté de contribuer à la poursuite de la transition, de façon loyale et constructive. Tout simplement parce qu'il y va de l'intérêt supérieur de notre Nation.
Les événements d'octobre 2014 ont bouleversé le cours de l'histoire politique du Burkina. Ils ont créé l'obligation ardente, pour l'ensemble de la classe politique et singulièrement pour nos partis, de se remettre en question, de repenser leurs fondements, leurs méthodes et leurs stratégies, afin de contribuer à un renouveau de notre démocratie. Les acquis que notre pays a accumulés au cours des dernières décennies sont loin d'être négligeables, dans le domaine de l'économie, comme dans celui de l'exercice de la démocratie. Mais, plus que jamais, nous avons conscience qu'il est nécessaire aujourd'hui de franchir une nouvelle étape de notre avancée démocratique, pas seulement en améliorant les modes de la participation du peuple aux choix politiques, mais aussi et surtout en assurant une plus grande égalité de nos concitoyens en matière de développement économique et social.
C'est la ligne directrice des propositions que nous soumettrons à nos compatriotes à l'occasion des prochaines échéances électorales. Nous le ferons sans forfanterie, ni arrogance aucune, mais aussi sans complexe et sans céder à aucune tentative d'intimidation, d'où qu'elle vienne.
Ont signé :
CDP : Léonce Koné, président du directoire
UNDD, Front Républicain : Hermann Yaméogo, président
ADF/RDA pour le Président : Diao Mamadou Koné, vice-président
UPR : Toussaint Abel Coulibaly, président
Les Verts du Burkina : Ram Ouédraogo, president
RSR : Emile Kaboré, président
RDB : El Hadj Saidou Compaoré, president
RDS : Salvador Yaméogo, président
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