où donner de la tête, en raison des frappes chirurgicales opérées par les avions de chasse de l’armée française, ils avaient commencé à se faire discrets. Puis, ils ont abandonné, selon les témoignages des habitants du Nord du pays, leurs bastions de Gao, Tombouctou et Douentza. Cette débandade a été bien accueillie par les populations qui ne se sont pas fait prier pour savourer le vent de liberté retrouvée.
Au moment où certains jeunes déambulaient avec des cigarettes à la bouche, d’autres avaient formé des grins devant leur cour pour déguster du thé. Pendant ce temps, des femmes, après s’être débarrassées des fameux "burka", avaient osé pointer le nez dehors. Le porte-parole de Ansar Dine, Sanda Ould Bouamana, a fait savoir que la nébuleuse islamiste a effectué un repli tactique. Qu’il n’est pas question de se jeter à plat ventre devant les forces maliennes et leurs alliés. Selon lui, il s’est agi de se mettre à l’abri des avions espions annonciateurs de la mort et de la désolation. C’est de bonne guerre, car l’opération Serval a déjà occasionné la mort de près de 200 combattants jihadistes, la destruction de camps d’entraînement, d’infrastructures, de nombreux dépôts de carburant et de munitions. Le directeur des études de l’ Institut de recherche stratégique de l’école militaire (IRSM), Michel Goya, a souligné que la nébuleuse islamiste a perdu 5 à 10 % de sa capacité de nuisance. Le mal dans tout ça, c’est que cela ne profite pas vraiment aux forces armées maliennes. Elles se comportent comme si elles avaient été ankylosées par la brutalité des combats de Konna. Elles n’ont pas avancé d’un seul mètre carré, ne serait-ce que pour prendre le contrôle de ladite localité désertée par la horde des fondamentalistes. Au contraire, la soldatesque, aux ordres d’un certain capitaine condamné à subir sa propre dépréciation, a encore perdu du terrain. La petite ville de Diabali, située à 400 kilomètres de Bamako, est tombée dans l’escarcelle des enturbannés boîteux qui se sont emparés de véhicules de transport et des casernes. Les islamistes sont désormais au-delà de la ligne de front où ils ont pris le soin de se fondre au milieu de la population. C’est un véritable camouflet pour l’armée nationale malienne et ses chefs. L’ex-chef de la junte, Amadou Haya Sanogo avait sonné la mobilisation de tous les hommes en uniforme. L’Institut international d’études stratégiques de Londres avait évalué, en 2010, le nombre de soldats à 15 150 dont 7 350 actifs.
Où sont-ils passés ? Ne sont-ils pas aussi armés que les jihadistes ou bien c’est parce qu’ils ne veulent pas affronter les fournaises infernales ? Tout porte à croire qu’ils ne sont pas les seuls. Sinon, comment expliquer que les Etats ouest-africains qui ont promis de déployer des troupes trottinent. On annonce que les premiers hommes vont fouler le sol malien la semaine prochaine. Si cela est avéré, cela fera près de deux semaines après que les Français dont on négociait la participation active soient intervenus. Les Etats d’Afrique centrale n’ont pas attendu aussi longtemps pour aller se mettre en travers de la route des troupes de la Séléka, dans les rangs desquels on suspectait la présence de jihadistes, qui avançaient dangereusement sur Bangui, la capitale. Les soldats de la Communauté économique de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) doivent se hâter pour contenir l’islamisme avant qu’il ne se métastase. De fait, les intégristes viennent de réaffirmer hier qu’ils vont s’attaquer à des pays voisins comme le Burkina Faso. Le fondamentalisme est plus que jamais aux portes de ces pays qui ont des ressortissants dans ses rangs. La contagion cancéreuse est imminente et aucune puissance militaire étrangère, aussi généreuse fut-elle, ne viendra stopper sa progression. Il faudra bien épauler l’armée française en profitant de la conjoncture où elle ne semble plus enfermée dans le seul créneau des frappes aériennes. C’est tout le sens qu’on donne à l’augmentation de ses effectifs qui passeraient de 750 actuellement à plus 2000 hommes. Si les Etats africains ne se bousculent pas honnêtement à ses côtés pour sortir le Mali du creux de la vague, la France, dont la position a maintes fois varié dans la lutte contre le terrorisme dans le Sahel, peut geler des opérations en vue.