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Sidwaya N° 7327 du 2/1/2013

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Affrontement meurtrier entre deux communautés à Zabré : Un bilan officiel fait état de 7 morts
Publié le vendredi 4 janvier 2013   |  Sidwaya




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Dans la matinée du lundi 31 décembre 2012, un affrontement entre communautés peulh et bissa dans la commune rurale de Zabré située à 110 kilomètres de Tenkodogo dans la région du Centre-Est a fait 7 morts et de nombreux déplacés.

La fin de l’année 2012 a laissé une tache indélébile dans la mémoire des habitants de Zabré, une commune rurale située à environ 110 kilomètres de Tenkodogo, dans la région du Centre-Est. En effet, un affrontement entre les communautés peulh et bissa de la localité a fait 7 morts dont 6 chez les premiers et 1 chez les seconds. Que s’est-il passé ? Cette question n’a pas trouvé de réponses officielles aussi bien du côté des autorités locales que celui de la population, parce que les langues sont bien enfouies dans les poches. Même dans le camp qui a enregistré le plus de victimes, l’on se contente d’énumérer les dégâts matériels. « J’étais au village de Mangagou à 5 kilomètres de Zabré et on m’a téléphoné que les adversaires (NDLR : les Bissa) sont en train de venir. Je me suis enfui pour me réfugier chez le pasteur. Ils sont venus brûler nos maisons, nos greniers et ils ont épargné nos troupeaux. C’est la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) qui est venue nous chercher chez le pasteur hier matin (NDLR : le 1er janvier 2013) pour nous amener mes parents et moi, à la gendarmerie où nous dormons pour l’instant à la belle étoile. Jusque-là, je ne suis pas au courant de ce qui s’est passé », raconte Samuel Bandé, agent dans un secrétariat public. Egalement, pour retrouver le lieu du drame, ce fut un parcours du combattant. Il a fallu que nous garantissions l’anonymat à un témoin « oculaire », natif de la commune (un Bissa) après moults négociations pour qu’il nous conduise dans le village de Bangou, au secteur n°7 de la commune. Dans ce village, habite une famille peulh vivant dans 3 grandes concessions dont le chef de famille s’appelle Sambo Bandé, un riche éleveur âgé de la quarantaine et époux de 3 femmes et de nombreux enfants.

Le film du drame

Sambo est un acteur-clé du drame. « Les habitants du village de Sangou (NDLR : situé aussi dans la commune) ont un frère bissa qui a eu des problèmes avec un Peulh. Ce dernier est allé porter plainte au commissariat. Mais, le Bissa n’a pas répondu à la convocation qui lui avait été remise. C’est ainsi que des policiers sont allés le chercher nuitamment à son domicile. Donc, les gens ont soupçonné Sambo Bandé d’avoir corrompu les policiers pour qu’ils enferment leur frère. Ils sont d’abord allés manifester au commissariat. Ensuite, ils se sont dirigés vers le domicile de Sambo Bandé », explique le témoin. Et le dernier jour de l’année 2012 fut fatal pour le riche éleveur et sa famille. « C’était le lundi 31 décembre 2012 aux environs de 9 heures lorsque j’ai aperçu une dizaine d’hommes à moto, venus du village de Sangou, munis de fusils, qui se dirigeaient vers le domicile de Sambo Bandé. Par curiosité, j’ai suivi le groupe. Arrivés au lieu indiqué, ils se sont mis à tirer, disant qu’ils veulent le (NDLR : Sambo Bandé) chasser du quartier. Comme l’intéressé avait aussi une arme, il a répliqué, en tirant en l’air. Dans le groupe, un homme du nom de Nombo Bancé, en position un peu avancée, a tiré jusqu’à épuiser ses balles. Sambo Bandé s’est approché de lui pour lui demander de partir et que s’il lui reprochait quelque chose, il pouvait aller porter plainte et le faire convoquer par les forces de l’ordre pour en discuter. Puis, au moment où Sambo Bandé retournait dans sa concession, Nombo Bancé, après avoir rechargé son fusil, s’apprêtait à tirer sur son vis-à-vis qu’une autre personne qui était avec Sambo Bandé a ouvert le feu sur Nombo Bancé. Ils s’en sont suivis des échanges de tirs », relate-t-il. Et notre source de poursuivre en disant que la CRS arrivée au moment des échanges de tirs, n’a pu sauver ni Sambo ni les membres de sa famille. « Ainsi, ils ont tué son père qui était le doyen du village, sa mère une octogénaire, sa jeune épouse qu’il venait de marier il y a deux semaines et qui a rejoint le domicile conjugal le 30 décembre dernier. Ils ont aussi tué son neveu et sa cousine, une collégienne qui était venue pour passer les congés. Son frère n’a pas été épargné », précise-t-il. Après cela, poursuit le témoin, ce sont les concessions qui feront les frais de la furie du groupe d’hommes. Les maisons et les greniers sont vidés de leur contenu avant d’être incendiés. Les deux autres concessions jouxtant celle de Sambo Bandé ont également suivi les mêmes supplices à la différence que les occupants ont pu s’échapper à temps pour se refugier à la brigade de gendarmerie ou ont préféré quitter la localité. Seul le bétail (bœufs, moutons et chèvres estimés à 300 têtes) et la volaille (poulets et pintades) appartenant à Sambo Bancé ont été épargnés. « Les corps des victimes sont restés sur les lieux du drame jusqu’au mardi 1er janvier aux environs de 17 heures. Ce n’est qu’après que les services de la mairie, accompagnés de la gendarmerie et des personnes de bonne volonté ont pu inhumer les 6 corps (NDLR : de la famille Bandé) dans une fosse commune. Quant au 7e, il a été enterré un peu plus loin », indique notre témoin. Mais la chasse à l’homme a continué dans la commune de Zabré et les villages environnants. Dans la bande des fuyards, Alidou Bandé, le beau-frère de Sambo Bandé a dû son salut à la proximité de la gendarmerie. « J’étais assis dans le marché, entre-temps, je voyais des gens en grand nombre se diriger vers moi. J’ai abandonné ma moto pour me réfugier à la gendarmerie. Ils ont brûlé ma monture sur-le-champ devant les gendarmes. Mon domicile a été pillé. J’avais 350 000F CFA, 4 vélos, une moto, du mil et du maïs dans ma maison. Ils ont tout brûlé », relate-t-il, le cœur encore meurtri. Bilan : une dizaine de villages (Bangou, Sangou, Zoulma, Yarkou-peulh, Yorgo, Bagansé, Bècazourma, Wanda, Mangagou, Gassougou, Youga…) ont été vidés des familles peulhs.

Les déplacés conduits sur deux sites

Un couvre-feu a été instauré dans la commune le même jour dans la nuit du 31 décembre 2012 au 1er janvier 2013, pour ramener la situation au calme, selon le lieutenant-colonel, commandant du 31e Régiment d’infanterie commando de Tenkodogo, Moussa Diarra. Quant aux déplacés, ils ont été conduits sur deux sites d’accueil à savoir, le village de Youga situé à 35 kilomètres de Zabré et à Tenkodogo. Mais à Zabré déjà, l’élan de solidarité se manifestait à travers la coordination des femmes de la commune Zabré, avec le soutien des services de l’Action sociale de la localité. « Nous avons fait un communiqué sur une radio locale de la place afin que les femmes apportent leur soutien en nourriture, en vêtements, en couverture et en argent aux personnes déplacées », nous confie la secrétaire générale de l’association, Mariam Zinsoni. Selon le Directeur régional de l’action sociale et de la solidarité nationale (DRASSN) du Centre-Est, Abdoul Mamadou Bassaoulet, les premiers déplacés sont arrivés à Tenkodogo le 1er janvier dans la matinée. Composés de 149 personnes dont 41 nourrissons, 9 personnes âgées, 32 élèves et 76 femmes, ils ont été pris en charge par le Comité national de secours d’urgence (CONASUR) à travers des aides alimentaires et de matériels utilitaires (tentes, nattes, couvertures…). Un second groupe est venu gonfler le nombre de déplacés le lendemain. Toutefois, l’on note des portés disparus. Assana Diallo, mère d’un enfant, dit n’avoir plus de contact avec son mari. Germaine Bandé, la cinquantaine bien sonnée, confie également que ses 2 garçons et ses 5 filles manquent à l’appel. Dans nos recherches, aucune structure sanitaire de la ville n’a enregistré de patients relatifs au drame de Zabré. Lorsque nous quittions Zabré le mercredi 2 janvier aux environs de 18 heures, le couvre-feu décrété par les forces de défense et de sécurité avait été levé. Toutefois, des patrouilles continuaient à travers la commune. Au moment où nous bouclions cet article, nous apprenions qu’un 3e site se trouverait à Zébila, un village frontalier au Ghana. Le gouverneur de la région du Centre-Est, Allahidi Diallo, se serait rendu (jeudi 3 janvier) sur les lieux pour convaincre les déplacés de rejoindre leurs villages respectifs, compte tenu de l’accalmie qui règne actuellement.

Paténéma Oumar OUEDRAOGO
Bougnan NAON

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