Président du Rassemblement patriotique du Faso (RPF) depuis sa création en 2005, Abraham Nignan est l’un des hommes politiques les plus avisés du Burkina. Se réclamant de l’opposition radicale, son parti n’est jamais allé à une élection depuis sa création car, dit-il, « aller aux élections reviendrait à légitimer le pouvoir de Blaise Compaoré ». Son parti n’ira aux élections, surtout présidentielles, que lorsque le président actuel se sera retiré du pouvoir, a-t-il confié. Selon Abraham Nignan, seul son parti peut sortir le Burkina de la pauvreté. C’est en substance ce qui est ressorti de l’interview qu’il nous a accordée le 28 août dernier.
« Le Pays » : Votre parti existe depuis quand ?
Abraham Nignan : Le parti du Rassemblement patriotique du Faso (RPF) est un parti créé en 2005. C’est un parti de la vraie opposition c’est-à-dire de l’opposition, radicale. Le RPF n’est pas un parti qui légitime le pouvoir en place comme le fait bon nombre de partis mais un parti qui est créé pour la conquête du pouvoir. Je vous assure que seul notre parti est en mesure de sortir les Burkinabè de la pauvreté ambiante dans laquelle ils se trouvent depuis des années.
Et comment vous y prendriez-vous pour combattre la pauvreté ?
Nous avons élaboré un vaste programme que je ne peux pas détailler en quelques minutes. Le moment venu, je vais l’étaler pour que les Burkinabè sachent que nous sommes le seul parti qui peut leur apporter le salut.
Quels moyens disposez-vous pour la mise en œuvre de ce programme ?
Lorsque vous parlez de moyens, je comprends par moyens humains et financiers. En ce qui concerne les moyens humains, nous ne nous inquiétons pas parce que nous en avons assez et de qualité pour l’atteinte de nos objectifs. Nous disposons également de moyens financiers, donc c’est pour vous dire que notre parti est bien organisé et sait ce qu’il veut. Nous sommes présents dans toutes les provinces du Burkina et nous travaillons tous les jours pour l’épanouissement de nos membres et bientôt de tout le peuple burkinabè. Nous ne sommes pas venus à la politique pour avoir une voiture, une maison, encore moins une parcelle. Nous avons décidé de faire la politique pour sauver le peuple burkinabè.
Lorsque vous parlez de l’opposition radicale, doit-on comprendre que votre parti est du chef de file de l’opposition ?
Non, jamais. Nous ne reconnaissons pas le chef de file de l’opposition parce que c’est un mécanisme mis en place par le régime Compaoré pour tromper la vigilance du peuple. Lorsque je dis opposition radicale, c’est pour vous dire que nous ne sommes ni du chef de file de l’opposition, encore moins de la mouvance présidentielle. Le RPF est un parti qui a pour ambition la conquête du pouvoir et je vous assure que si le président actuel ne se présente pas en 2015, je serai le locataire du Palais de Kosyam. Pour le moment, nous avons toujours refusé de participer aux élections présidentielles.
Pourquoi ?
Nous avons refusé de prendre part aux élections depuis la création de notre parti parce que nous ne voulons pas légitimer le pouvoir de Blaise Compaoré. Toutes les élections qui se sont déroulées ici au Faso n’ont été que des élections truquées. Nous irons aux élections lorsqu’elles seront transparentes et bien organisées.
Allez-vous prendre part aux élections couplées à venir ?
Le RPF a demandé le report des élections couplées, législatives et municipales, parce qu’elles ne seront pas transparentes. J’ai toujours dit que le moment choisi pour les inscriptions n’est pas une date idéale parce que c’est une période où nos parents sont aux champs. Et au moment des votes, également prévu pour le mois de décembre, nos parents seront là à collecter leurs récoltes. Au vu de cela, nous avons demandé le report des élections en février ou mars 2013 pour permettre à tous les citoyens de pouvoir voter. Le constat que je fais est que nous n’avons pas été écoutés.
Quelles appréciations faites-vous de l’enrôlement biométrique des électeurs ?
L’enrôlement biométrique n’aboutira à rien du tout. Ils ont parlé de fichier fiable mais je suis sûr que ce fichier sera trafiqué par le pouvoir en place.
La sous-région est marquée actuellement par la crise au Mali. Une crise à laquelle on peine à trouver une solution. Quelles propositions faites-vous pour que le Mali puisse sortir de la crise dans laquelle il est plongé ?
La seule proposition que je fais, est que la CEDEAO laisse les Maliens gérer leur crise parce qu’elle est en train de l’aggraver. Je pense que les gens auraient dû laisser le capitaine Sanogo aller jusqu’au bout de ses idées parce que c’est le seul qui pouvait sortir le Mali de sa crise actuelle.
Donc, vous n’approuvez pas la médiation de Blaise Compaoré ?
Je crois que la médiation de Blaise Compaoré au Mali sera sa dernière médiation. C’est la crise malienne qui va l’emporter s’il n’y prend garde. Aucune de ses médiations en Afrique n’a jamais abouti. La preuve est qu’en Guinée, en Côte d’Ivoire, et même au Togo, pays dans lesquels il a assuré la médiation, il y a toujours des problèmes. Ce que nous craignons actuellement, c’est qu’il apporte des problèmes au peuple burkinabè à travers ses médiations qui n’arrangent que lui seul.