Le cordonnier est souvent mal chaussé, dit-on. Autrement dit, l’homme qui informe, forme, éduque et égaie ses concitoyens, semble être le salarié sous-payé dans le privé comme dans le public. Même s’il préfère évoquer la situation que vivent ses semblables en cachant la sienne, il faut avouer que le journaliste burkinabè est un homme qui rase les murs. Il vit dans le silence une crise salariale qui ne semble pas toucher tous les salariés de la même façon. Dans le privé où des médias nouveaux comme les journaux en ligne ont fait leur apparition, aux côtés des radios privées, avoir un salaire de 100 000 mille francs est un luxe. Et le fameux "gombo" de 5000 à 10 000 FCFA qui permettait à certains de joindre les deux bouts est devenu rare. En ce qui concerne les médias publics, les salaires de base restent dérisoires. Les quelques indemnités qui meublent ce salaire se comptent aussi du bout des doigts. Bien que le chef du gouvernement ait décidé d’accorder une indemnité de logement à tous les agents de la fonction publique, il demeure un flou incompréhensible chez les journalistes. En lieu et place d’une indemnité de logement, nombreux sont ceux qui ont du mal à retrouver la fameuse indemnité sur leur bulletin. C’est plutôt une indemnité spécifique qui est servie. Les spécialistes des finances avancent qu’on ne peut pas cumuler indemnité spécifique et indemnité de logement. Mais au fait, les journalistes sont-ils différents des agents de la santé ou de l’éducation nationale qui bénéficient déjà de ces deux types d’indemnités ? Il y a problème. Le journaliste ne doit pas être un mendiant larmoyant qui, dans sa tâche, ne connaît aucune heure fixe de début de service, de pause ou de descente. C’est l’homme qui travaille en continu et qui rentre tous les jours tard, malgré les risques non couverts par les indemnités. C’est l’homme sans vie sociale, sans distraction, sans week-end, etc. S’il est reconnu que les professionnels de la plume, du micro et de la caméra sont utiles à la société burkinabè, il importe que les responsables des médias s’interrogent sur la précarité qu’ils vivent dans le mutisme. Si ailleurs ce sont des stations qui suspendent leurs programmes pour réclamer de meilleures conditions de vie et de travail, au Burkina Faso, les acteurs préfèrent compter sur le dialogue. Mais pour éviter d’étaler la misère des journalistes sur la place publique, il est de bon aloi d’encourager ces hommes et ces femmes à travers un statut particulier qui les mette à l’abri de la tentation. Prévenir vaut toujours mieux que guérir.