Économie
Exploitation minière dans la commune au Nord :Chasse à l’homme et actes de vandalisme à Namissiguima
Publié le mardi 20 janvier 2015 | L`Observateur Paalga
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Après la mise en feu du matériel de la société minière True Gold par une population en colère le 14 janvier dernier, des échauffourées ont été constatées dans les villages de Ramatoulaye et à Namissiguima le vendredi 16 janvier 2015. Cette fois- ci ce sont les biens des fils de la commune ayant des accointances avec la société minière True Gold qui ont été détruits par les frondeurs.
Les habitants de la commune de Namissiguima n’entendent pas surseoir à leur désir de voir le départ de la société minière True Gold de leur zone. Sans regret et légitimant au contraire son acte du mercredi 14 janvier dernier à Nogo, un groupe de jeunes a organisé ce vendredi 16 janvier 2015, une randonnée de destruction des biens des personnes qui, pour eux, sont de connivence avec la société minière. Au cours de cette «chasse aux sorcières », les frondeurs ont terrassé une partie du mur de la cour de l’ancien maire Abdoulaye Ouédraogo, chargé de mission à l’Université de Ouahigouya et membre du comité de liaison et de suivi, une structure devant servir d’interface entre la société minière et la population. Un des frères du Cheick de Ramatoulaye, El hadj Bonafo Maïga, a eu son véhicule incendié pour, semble-t-il, avoir acquis ce bien grâce à True Gold. Pourchassé à travers la ville, un des contractuels de la société minière ne doit la vie sauve qu’à sa maîtrise de sa moto. Ses détracteurs à défaut de lui faire la peau s’en sont pris à sa demeure qu’ils ont mise à sac avant d’incendier sa moto grosse cylindrée. Trois autres contractuels ont également eu leurs domiciles saccagés. Ces derniers sont accusés de ne pas se plier à l’ultimatum sommant les ressortissants de la commune de se retirer des activités de la société minière et de narguer les contestataires. Rencontrés au cours de la soirée du vendredi 16 janvier 2015, un groupe de jeunes soi-disant des meneurs de la lutte pour le départ de la société minière avec la bénédiction des autorités coutumières et religieuses affirment ne plus vouloir d’un quelconque dialogue à l’heure actuelle. L’objectif de son action présentement est de contraindre True Gold à se retirer de la zone. Il dénonce le mépris de ladite société à l’endroit de la population locale et le non-respect de ses engagements.
Le déguerpissement du village de Ramatoulaye démenti
« Dans un premier temps, un bureau d’études commis pour les études environnementales avait fait savoir que le village de Ramoutalaye, lieu de pèlerinage musulman, serait déguerpi avec les travaux de la mine. Cette information a mis la population en colère. Le P-DG de True Gold est venu précipitamment s’entretenir avec le Cheick sans manquer de qualifier le responsable du bureau d’études d’alcoolique racontant des faussetés. Il a assuré que Ramatoulaye ne serait en aucun cas touché par les travaux de la mine. A notre grande surprise, le site de la fosse portant le nom de Rambo, village de la commune de Titao, situé à 11km de Namissiguima se retrouve à quelques mètres de la préfecture et à 300 m de l’école primaire de Ramatoulaye. Ce revirement de la situation nous a intrigués. C’est pourquoi nous avons exigé que True Gold nous fournisse des explications avant de commencer les travaux sur ce site. Sans donner suite à notre requête, les miniers ont déployé les machines sur les lieux au cours du mois de novembre 2014 pour entamer les travaux. Nous avons été obligés d’intervenir pour les en empêcher», explique un des leaders du groupe, refusant de décliner son identité. «Il faut vous contenter des explications que nous vous donnons. Vous avez eu de la chance, si vous étiez là au moment de notre mouvement, on vous aurait pris à partie. Consigne avait été donnée de régler les comptes à toute personne étrangère qui tenterait de s’ingérer dans cette affaire » entonne tout le groupe quand nous insistons sur la question des identités de nos interlocuteurs. Interdiction nous a aussi été intimée d’enregistrer les propos. «On ne vous fait pas entièrement confiance, qu’est-ce qui prouve que vous n’êtes pas des espions qui s’attribuent le titre de journalistes ?» nous balance-t-on à la figure, les regards méfiants. «Si nous en sommes arrivés à cette situation de violence, c’est compte tenu du fait que True Gold refuse de se soumettre au dialogue tout en persistant à continuer les travaux», insiste le président des jeunes de la commune. Il s’empresse de nous brandir leur plate forme revendicative adressée à la société minière depuis le 14 novembre 2014. Les auteurs du document revendiquent le respect du délai de trois ans accordé par la mine pour l’exploitation artisanale de l’or sur le site de Nami dans le village de Sologom, l’abandon des travaux d’exploitation sur le site de Rambo afin d’éviter certaines nuisances pesant sur la santé et la tranquillité de la population, le bitumage de la route principale reliant Namissiguima à Ouahigouya afin de minimiser les effets de la poussière, l’amélioration du taux de recrutement de la population de la localité, l’instauration d’un cadre de dialogue participatif avant d’entreprendre un travail ou des activités quelconques sur le territoire de la commune, la mise à disposition d’une copie de la convention signée entre la société minière et l’Etat, la participation des jeunes, à travers leurs représentants, au comité de suivi et de liaison. «Quand nous avons transmis notre cahier de doléances à la société minière, elle a tardé à réagir. C’est suite à notre premier mouvement pour arrêter les travaux que nous avons reçu une réponse datée du 1er décembre 2014 par l’intermédiaire de l’actuel ministre de l’Energie et des Mines», nous apprennent les jeunes. Concernant le respect du délai de trois ans pour l’exploitation artisanale sur le site de Nami, True Gold montre son incapacité à revenir sur la question. Toute chose qui irrite les orpailleurs. «Il était convenu de commun accord que les orpailleurs pouvaient exercer des activités sur ce site pendant trois ans .Curieusement deux mois après la signature de l’accord, on est venu nous dire de quitter les lieux contre des dédommagements. Ils ont refusé de prendre en compte tous nos investissements. Les compensations ont concerné uniquement les frais d’implantation des hangars. La majorité des jeunes de cette localité n’ont pour activité que l’exploitation artisanale de l’or, et si on vient à leur fermer les portes de tous les sites, sans leur proposer une forme de compensation, on les jette dans la misère et le désœuvrement. Comprenez notre révolte ! » enrage un qui se réclame responsable de zone du site de Nami. Dans ses réponses aux revendications des jeunes, concernant l’arrêt des travaux sur la fosse de Rambo située entre Namissiguima et Ramatoulaye, voici les explications de la mine : « Les différents sites sont liés et lorsqu’on élimine un des gisements, le projet Karma n’est plus économiquement rentable. L’abandon de l’exploitation de la fosse de Rambo signifiera l’abandon du projet Karma ». Et de fournir des explications techniques pour dire qu’il n’y aura pas de nuisance. Selon la mine, l’exploitation de cette fosse n’exige pas l’usage d’un matériel lourd pouvant provoquer des dégâts. Jusqu’en septembre 2015, l’excavation de la fosse à une profondeur de 50 m se fera sans dynamitage. Cette opération pourrait intervenir à partir de mars 2016, mais est conçue de sorte à éviter les vibrations. Ces descriptions ne semblent pas convaincre les protestataires qui croient dur comme fer que les travaux vont impacter les activités à l’école, à la préfecture, au centre de santé et de promotion sociale, menées à une petite distance de la fosse. On a beau vouloir les convaincre que les travaux sur un site de la mine n’ont pas d’impact sur des activités qui se tiennent à une distance de 300 m, les frondeurs n’y croient pas. Autres informations capitales, True Gold dit avoir embauché 39 ressortissants de la localité et payé 170 millions de francs de salaires pour la main-d’œuvre locale en 2014. Les impôts qu’elle a reversés à la commune de Namissiguima s’élèvent à 26 millions de FCFA courant 2013-2014. Elle révèle avoir réalisé 200 millions de chiffre d’affaires en 2014 avec des fournisseurs locaux. Ses détracteurs balayent ces retombées du revers de la main. Des 39 personnes embauchées, à entendre les jeunes, 4 disposent de contrats signés en bonne et due forme avec la société minière pour des travaux de moindre importance. Les 35 restants seraient des journaliers se contentant de 2 500 F CFA par jour de travail effectif. « Si vous comparez les activités par rapport au gain des travailleurs, vous vous rendrez compte que c’est de l’esclavage. Les 29 millions d’impôts dont il est question, on ne sait pas à qui ils ont été reversés ni à quoi cette somme a servi », rétorque le président du mouvement des jeunes de Namissiguima. Les laissés-pour-compte expriment leur inquiétude par rapport au ravitaillement en eau potable dans la zone. « Information nous a été donnée qu’à un certain moment, tous les points d’eau installés dans la commune seront contaminés par des produits toxiques de la mine. Cette dernière aurait creusé des puits qu’elle a soumis à des traitements. En temps opportun, les habitants de la commune seront desservis à partir de ces puits à l’aide de camions-citernes», rapportent nos interlocuteurs. «Qu’est- ce qui nous garantit que la mine tiendra cette promesse ? Pourra-t-elle réellement satisfaire les besoins d’environ 15 000 habitants ?» réagissent-t-ils, sceptiques.
On ne veut plus du dialogue
La jeunesse de Namissiguima insiste pour retracer les démarches qu’elle a entreprises pour instaurer un cadre de dialogue avec True Gold. Toujours avec l’aval des autorités coutumières et religieuses, elle a adressé des lettres au préfet de Namissiguima, au Haut-Commissaire de la province du Yatenga, au Gouverneur de la région du Nord, au ministre des Mines et de l’Energie et au Premier ministre. Une délégation composée de toutes les couches a été reçue par l’actuel ministre des Mines et de l’Energie au cours du mois de décembre. Ce dernier leur aurait permis de prendre toutes les dispositions utiles pour instaurer un cadre d’échanges avant toute poursuite des activités. Jusqu’ à présent, rien ! Venu le 03 janvier 2014, le ministre de l’Administration territoriale et de la Sécurité, Auguste Denise Barry, à en croire les jeunes de Namissiguima, a dit avoir effectué le déplacement pour saluer le Cheick et demander ses bénédictions. A leur grande surprise, se désolent les indécrottables, le ministre, après son passage, aurait déclaré sur les ondes qu’un consensus a été trouvé entre la population et la société minière et que les travaux pouvaient reprendre. C’est cette sortie qui aurait provoqué le courroux de la population, soldée par la mise à feu du matériel sur ses installations à Nogo. La menace de prendre à partie le gouverneur le mercredi 14 janvier, le refus du Cheick de le recevoir le vendredi 19 montrent à souhait selon les dires des jeunes, que la population de Namissiguina n’a plus confiance ni aux autorités administratives ni à la société minière et, par conséquent, ne veut plus entendre parler du dialogue. Le mot d’ordre, c’est faire partir True Gold à tout prix. Le roi du Yatenga, Naaba Kiiba s’est invité dans la négociation en se rendant chez le guide spirituel de Ramatoulaye le 14 janvier. Il aurait informé avoir été sollicité par la société minière pour démentir la rumeur selon laquelle l’excavation de la carrière de Rambo va s’étendre sous la mosquée de Ramatoulaye où serait entassée une forte quantité du métal précieux. Devant le Cheick, une genèse de la situation a été faite au roi par le représentant des jeunes de Ramatoulaye. Naaba Kiiba aurait promis de transmettre toutes les récriminations à ses mandataires. Ce mouvement de jeunes tient à faire répandre ce message qu’il a imprimé sur une planche : «Bien sûr que la terre appartient à l’Etat, mais c’est la population qui forme l’Etat». Au moment où nous nous apprêtons à rebrousser chemin, des voix menaçantes résonnent à nos tympans «Hey ! Vous les journalistes ! Le jour où vous apprendrez qu’un Blanc de la société minière est venu ici, ne cherchez pas à savoir le sort que nous allons lui réserver. On ne voudra pas vous voir ici ce jour- là. Au cas où vous insisterez à venir, ce sera à vos risques et périls». Du côté de la société minière, on se refuse à tout commentaire pour le moment. Un communiqué diffusé sur les ondes des radios locales annonce la suspension des travaux depuis la mise à feu de ses installations à Nogo.
Emery Albert Ouédraogo
Encadré
Le lancement officiel des activités de construction de la mine de Karama dans la commune de Namissiguima par la société minière True Gold aujourd’hui rejetée par la population de la localité s’est effectué le 22 mai 2014. Ce projet aurifère compte cinq gisements à savoir Goulanga I et II, Kao, Rambo, Nami s’étalant sur une superficie de 85 km2. Prévus pour durer 9 ans, les travaux de la construction de la mine nécessitent la mobilisation de 83 050 000 000 de FCFA en termes d’investissements. Durant la période d’exploitation, l’Etat tirera profit d’environ 121 milliards en termes de royalties, de redevances, d’impôts, de dividendes et taxes diverses. Depuis la date du lancement officiel des travaux, les retombées pour la commune de Namissiguima sont estimées à un milliard et demi de francs à en croire le P-DG de True Gold, Dwayne Melrose. Il a cité, entre autres, la réfection d’écoles de logements de maîtres et de centres de santé et de promotion sociale (CSPS), la réalisation de forages, la réfection de la route Ouahigouya- Namissiguima et celle de Titao à Ramatoulaye, la mise en terre d’environ 1000 plants, la construction du barrage de Lougriwéogo. Dans son allocution ce jour-là, l’ancien maire Abdoulaye Ouédraogo a salué la mise en place du comité de suivi et de liaison. Une structure, à l’entendre, qui a travaillé à renouer la confiance entre la mine et la population et à taire les informations malveillantes. Actuellement ledit comité est fortement décrié. Selon ses pourfendeurs, il est une coquille vide regroupant des individus travaillant pour les intérêts de la mine plutôt que de la population. C’est ce qui expliquerait que certains de ses membres à l’image de l’ancien maire Abdoulaye Ouédraogo ont eu leurs biens détruits par les manifestants.
EAO
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