Société
Père René Belemsida Guirma : « Je suis venu au Burkina pour interpeller l’église et l’Etat »
Publié le samedi 10 janvier 2015 | Le Pays
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Père René Belemsida Guirma : « je suis venu au burkina pour interpeller l’église et l’état » |
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L’homme qui était l’invité de la rédaction, le 30 décembre 2014, sort un peu de l’ordinaire, puisqu’il est un serviteur de Dieu. Ordonné prêtre en 1958, il est le frère de Mgr Constantin Guirma, l’évêque fondateur de l’Eglise de Kaya et l’un des fils des premières familles de Ouagadougou. Présent à Ouagadougou pour ses vacances, il a accepté de se prononcer sur certains sujets, notamment les révolutions de 1966 et de 2014, la transition actuelle en cours et bien d’autres sujets. Lui, c’est le père René Bélemsida Guirma.
« Le Pays » : Vous avez un parcours impressionnant. Quels souvenirs radieux et mauvais en gardez-vous ?
Réné Bélemsida Guirma : Ce que je garde comme mauvais souvenir, c’est la manière dont j’ai regardé l’Eglise. J’ai vu qu’il fallait des gens réfléchis, très cultivés pour pouvoir diriger le pays. Etant donné que c’était dans les années 1960, donc la période des indépendances où il y avait beaucoup à faire pour que notre pays devienne vraiment un Etat moderne.
Ce que je garde comme bon souvenir, c’est que depuis longtemps, j’étais un assoiffé de philosophie. J’avais envie de connaître, d’étudier à fond la philosophie pour pouvoir voir la vie et comprendre la société. Et j’ai été ravi parce que dans le milieu dominicain, j’ai pu rencontrer un professeur de philosophie, père Yves Jolif (un Dominicain), qui m’a bien formé en philosophie logique, en dialectique, et je suis devenu un perpétuel étudiant. C’était quelqu’un qui avait voulu entreprendre de grandes thèses à la manière de Heiddeger, mais c’était peine perdue parce que ce que Heiddeger voulait faire était impossible. Mais il m’a formé à pouvoir comprendre la vie, comprendre ce que c’est que la dialectique, la manière de suivre la vie et d’être à jour du point de vue philosophique et scientifique. Cela m’a vraiment permis de comprendre et de pouvoir donner, par exemple, mon point de vue sur ce qui se passe dans mon pays, notamment la Révolution des 30 et 31 octobre derniers au Burkina.
En quelle année avez-vous pris la soutane ?
J’ai pris la robe dominicaine en 1964 et je suis entré au noviciat, à Angers (France), pour ensuite faire mes études dominicaines puis universitaires. Mais j’ai pris la soutane en 1950 et j’étais à Koumi comme séminariste. C’était une année après la mort de Monseigneur (Mgr) Joanny Thévenoud que j’ai bien connu et dont j’ai beaucoup suivi les instructions.
Que retenez-vous des grands moments de l’histoire du Burkina Faso ?
A l’heure actuelle, si on fait une analyse de la transition avec les deux personnalités (Kafando-Zida) qui la composent, en plus un des hommes politiques dont Diabré, je dirai que Mgr Joanny Thévenoud a dû sourire de là où il se trouve. Parce qu’en quittant Kayes au Mali pour Ouagadougou en 1903, à cheval, le seul lettré qu’il avait rencontré dans la ville de Ouagadougou était l’imam de la Cour impériale de Oubhiri. Nous étions au lendemain de la conférence de Berlin (en 1885) où des propos racistes étaient tenus à l’endroit des Noirs. Et l’intention de l’homme de Dieu était de travailler pour que ce pays dont il a admiré la civilisation du « Burkindlim », puisse avoir un jour une Eglise catholique culturellement incarnée, c’est-à-dire une Eglise catholique majeure avec sa chrétienté, ses prêtres, ses religieux, ses évêques et archevêques. Il voulait que le pays ait des cadres qui puissent être le matériau humain capable de construire un véritable Etat moderne et démocratique. Je peux dire qu’en 1956, après sa mort, et en 1966, c’était chose faite pour l’Eglise catholique. On avait notre archevêque, un clergé et des religieux, et surtout le premier chef d’Etat, en la personne de Maurice Yaméogo sorti de l’unique institut secondaire ayant existé jusqu’en 1950 dans la région. Il a d’ailleurs été formé au séminaire.
« L’armée a toujours tenu le pouvoir »
Mais comme disent les Ecritures Saintes : « Malheur au peuple dont l’esclave devient roi ! ». Si les lettrés, au lieu d’être des hommes intègres et utiles à leur pays, deviennent plutôt des parvenus, remplacent plutôt les colons et vivent en despotes, il y a problème. C’est ce qui est arrivé à Maurice Yaméogo. Celui-ci n’a pas été un chef d’Etat démocratique, il a viré au despotisme, si fait que le peuple s’est révolté 5 ans après. L’année 1966 a été la première révolution de notre pays. Joseph Ouédraogo qui était un démocrate, a pu mener avec Joseph Ki Zerbo la Révolution de 1966 qui a destitué le premier président qui fut un despote au lieu d’être un homme d’Etat.
Quand je regarde la Révolution de 1966 et celle de 2014, je fais une symétrie qui montre, surtout pour quelqu’un qui a étudié l’anthropologie culturelle, la raison pour laquelle cela a pu arriver. Et comme vous avez pu l’entendre, certains considèrent le Burkina comme un exemple qu’il faut imiter. Pour d’autres, ce qui s’est passé n’est pas à répéter parce que la civilisation du « Burkidlim » est tout à fait spéciale. A mon avis, les deux Révolutions se ressemblent.
Parlant de la révolution de 1966, il faut noter qu’elle a d’abord été une revendication sociale. A l’époque, la France commençait à quitter les pays colonisés et voulait imposer l’austérité. C’est ainsi qu’elle diminuait les aides qu’elle octroyait à nos Etats et il fallait donc resserrer les budgets, diminuer les salaires, etc. Toute chose que Maurice Yaméogo et son ministre Denis Yaméogo décident alors de faire. Mais Maurice Yaméogo faisait subir l’austérité aux autres tout en s’y soustrayant lui-même. Le plus grand scandale aura été la répudiation de sa femme au détriment d’une jeune fille venue de Côte d’Ivoire, suivie de ses vacances de noces qu’il s’est gracieusement offertes à Rio (Brésil). Chose que les gens n’ont pas digérée. Ils ont exigé qu’il renonce à sa réforme d’austérité en ne touchant ni aux salaires, ni aux acquis sociaux. Mais Maurice Yaméogo refuse et injurie la foule. Ce fut alors la révolte, surtout entre le 31 décembre 1965 et le 1er janvier 1966. Le 2 janvier, il y eut un raz-de-marée demandant à Maurice Yaméogo de revenir sur ses décisions. Mais il n’a pas voulu écouter. La grogne s’accentue et les gens, en colère, demandent son départ. Sentant la pression qui montait, il ordonne de tirer sur la foule. Chose que les soldats refusent. C’est ainsi qu’il est parti. Les manifestants ont alors demandé à l’armée de prendre le pouvoir. C’était une véritable Révolution parce que la population était sortie pour son « Burkindlim » qui est la Charte. Le peuple a conquis son « Burkindlim », la charte de civilisation des Mossé, fondée par Naaba Oubri vers 1050-1150. La civilisation du « Burkindlim » a rayonné et a été adoptée pratiquement par les royaumes frères.
Qu’est-ce que le Burkindlim selon vous ?
Le « Burkindim » consiste à donner la liberté à tout citoyen ayant la carte d’identité, c’est-à-dire les scarifications faciales, le droit et la dignité de vivre libre, et cette loi est au-dessus du Mogho-Naaba. Il y a, dans le « Burkindlim », des valeurs de respect de la vie humaine, de la personne. Aucun citoyen de la civilisation ne doit être réduit à l’esclavage. Lorsque vous voyez deux « Burkimba » se saluer, ils donnent le spectacle de deux nobles qui se saluent et se vénèrent. Ils esquissent ce qu’on appelle le « pantissé » qu’on fait devant le roi. Parce que, justement, ils ont du respect l’un pour l’autre. C’est cela le « Burkindlim ». Par conséquent, le peuple a, en 1966, conquis ce « Burkindlim ». Mais voilà que Sangoulé Lamizana, poussé par les Officiers, avait aussi pratiquement confisqué le « Burkindlim » du peuple voltaïque. L’armée a toujours tenu le pouvoir et jusqu’au président actuel, Michel Kafando, ce sont des militaires qui ont régné, souvent en despotes débonnaires comme Lamizana. Ensuite vint Saye Zerbo qui renversa Lamizana. Il a été conseillé par Frédéric Guirma de convoquer des états-généraux, en vue d’établir une Charte devant permettre de voir comment limiter les mandats présidentiels et organiser un Etat de droit idéologiquement neutre. Mais Saye Zerbo a été débordé par ses officiers, et la motivation de son coup d’Etat qui devait venir au secours de l’Etat qui s’ébranlait, n’était plus recevable, puisque c’est l’armée qui était devenue le justicier pour redresser la situation. Il avait commencé à gouverner et à imposer un régime militaire. Quand Saye Zerbo s’est rendu compte qu’il fallait faire marche-arrière, il a appelé Frédéric Guirma pour sauver la situation. Le lendemain, il a été renversé parce que, dans l’armée, il y avait des officiers acquis à d’autres idéologies et qui commençaient à avoir des relations avec des groupes idéologiques. C’est à ce moment que les Thomas Sankara, Blaise Compaoré et ceux qui espéraient prendre le pouvoir, sont entrés en scène. Les Sankara et autres avaient acquis le soutien du Parti socialiste français. Et c’est à ce moment qu’on a eu le premier coup d’Etat sanglant, contrairement à celui perpétré contre Lamizana. Dans la masse silencieuse, les gens n’étaient pas contents. Les croyants priaient pour le changement du régime parce qu’ils voyaient que ce dernier était en train de détruire leur « Burkindlim ». Avec les « à bas les mamans pourries !», «A bas les papas pourris !» et l’athéisme qui commençaient à être enseignés dans les écoles, les choses devenaient inquiétantes. Thomas Sankara a commis des erreurs. D’abord, il y a eu la guerre contre le Mali qui a été douloureuse pour nous. Il n’aurait pas dû la déclarer, parce que nous n’étions pas suffisamment armés. Aux époques de Saye Zerbo et de Lamizana, on avait essayé de régler la question. Quand ils ont été en Amérique pour demander les armes, les Américains ont, tout en regardant la carte, fait comprendre qu’ils avaient raison, mais que c’est la France qui était contre nous.
« Les révolutions de 1966 et de 2014 sont les vraies révolutions »
Aussi, la France avait donné l’ordre de ne pas vendre des armes aux Voltaïques, parce qu’ils étaient fougueux et capables de dévorer leurs voisins. Voilà pourquoi nous n’avons pas eu les armes. Il aurait fallu régler le problème de façon diplomatique, en lieu et place de la guerre. Nous avons fait la guerre, et si Félix Houphouët-Boigny n’était pas intervenu, cela aurait été un vrai désastre. La deuxième faute de Thomas Sankara a été, au grand bonheur des progressistes internationaux, d’avoir injurié François Mitterrand qui était venu au Burkina. Son discours qu’il avait préparé pour, au finish, le ranger dans sa poche et répondre à Mitterrand, en le ridiculisant, est comparable à celui de Lumumba. Ce dernier a commis la même erreur dans les années 1960 quand il s’est, dans son discours, insurgé contre le Roi belge. Certes, les Africains avaient des raisons de le détester, mais en diplomatie, si on n’est pas fort, il ne faut pas se comporter comme le petit chat qui provoque le tigre. Après son discours, on disait en Amérique que Lumumba devait partir. Voilà comment on a planifié son assassinat. Sankara aussi a commis cette faute. Ne nous faisons pas d’illusions l’Occident a suffisamment d’influences pour changer les régimes en Afrique. Après Thomas Sankara, ce fut le tour de Blaise Compaoré de prendre le pouvoir. Il a aussi viré au despotisme qui a conduit à la Révolution des 30 et 31 octobre 2014.
S’agit-il, selon vous, d’une révolution ou d’une insurrection ?
Ça c’est une Révolution ; c’est la vraie Révolution. Les révolutions de 1966 et de 2014 sont les vraies révolutions, les autres ne sont que des coups d’Etat. En 1966, c’est le peuple qui s’était levé et avait marché pour exiger le départ de Maurice Yaméogo. C’est la même chose qui s’est produite en 2014. Il y a donc une symétrie.
Certains disent qu’il s’agit d’une insurrection populaire et non d’une Révolution. Qu’en dites-vous ?
Je vais vous prouver qu’il s’agit d’une révolution, même si une révolution ressemble à une insurrection. Ce que j’ai remarqué, c’est qu’en 1966, les gens étaient moins préparés qu’en 2014. Les Joseph Ouédraogo et compagnie avaient bien préparé le peuple, ils ont marché et réussi, c’est connu. Mais je n’ai pas trouvé en 1966 autant de cadres de la trempe des Zéphirin Diabré. Pour ce qui s’est passé en 2014, tout a commencé avec la modification de l’article 37 qui devait permettre à Blaise Compaoré de rester au pouvoir. Ainsi, on cherchait des subterfuges avec le référendum et le Sénat. Or, l’article 37 se trouve dans la Constitution. La population, ainsi que les évêques ayant senti venir le danger, se sont prononcés contre la modification dudit article… J’avais écrit dans un journal de la place au sujet de l’article, en soutenant que les évêques, en disant à tout moment que l’Eglise ne doit pas faire la politique, se campent souvent dans un absentéisme où leur présence est sollicitée. Au lieu de protester mollement, j’avais dit qu’il fallait crier contre le projet de modification de l’article 37. Les évêques, comme on l’a dit depuis l’histoire de l’Eglise, sont les sentinelles de la cité. Pour ce faire, ils devaient crier haro contre la modification, parce que ceux qui ont écrit l’article 37 l’ont fait dans un esprit de charte. Avec un régime despote qui manipule les Constitutions pour toujours sauver sa mise, il fallait distinguer la charte de la Constitution.
« Le fait d’avoir une Constitution et d’organiser des élections ne garantit pas la liberté d’un peuple »
Concrètement, qu’auriez-vous voulu que les Evêques fassent ?
Les Evêques devaient savoir que la question de l’article 37 n’est pas seulement une question de Constitution, mais se place plutôt sur le plan de ce que Rousseau a appelé « le Contrat social ». Les Evêques devaient partir des principes essentiels de la doctrine sociale de l’Eglise qui affirme l’Homme, la personne humaine, la famille et les sociétés, et qui, par conséquent, prônent la protection de cette civilisation à travers la mise en place de bonnes chartes et de bonnes Constitutions. Ils devaient donc montrer comment arriver à cela, au lieu de protester mollement comme ils l’ont fait avec des sermons moralisateurs qui n’ont pas eu beaucoup de pertinence.
Malgré tout, Blaise Compaoré, avant sa chute, a affirmé sur une chaîne internationale que l’Eglise n’est pas une institution de l’Etat et que par conséquent, elle ne pouvait pas l’empêcher de modifier l’article 37
Mais voilà qu’il est parti ! Un despote peut affirmer ce qu’il veut. Ce que Blaise Compaoré a affirmé n’est pas recevable parce qu’il se met au-dessus du peuple, alors que dans les pays démocratiques, à l’image de l’Angleterre, des lois sont promulguées et ces lois sont au-dessus de tous, même du roi. A ce niveau, c’est le contrat social qui prévaut, et non la volonté d’un individu qui veut tout commander. Qui a donné ce pouvoir à Blaise ? Personne ! C’est l’arme de l’Etat qu’il a acquise à travers le coup d’Etat. Blaise Compaoré est un « Tansob-bila », à l’image de ce qui existe dans la civilisation du « Burkindlim » où on a les « Tansob-bii » qui sont les officiers impériaux et qui commandent l’infanterie impériale. Les « Tansoba » et les « Tansob-bii » ne doivent jamais briguer la seigneurie. Leur rôle est de rester des soldats et non d’être des gouvernants. Même dans les démocraties modernes, l’armée est la Grande muette. Aux Etats-Unis, les soldats ne doivent pas se promener avec leur uniforme dans la rue, parce que leur place est au front et non dans un fauteuil présidentiel. Donc, que ce soit du point de vue du « Burkindlim » républicain démocratique et moderne que du point de vue du « Burkindlim » traditionnel, nos soldats étaient dans l’erreur. Blaise a pris le pouvoir avec la complicité de l’armée et à travers l’arme de l’Etat qui devait assurer la sécurité et l’ordre, il a confisqué le « Burkindlim » du peuple. Dans ces conditions, le peuple burkinabè devient esclave et non un peuple libre. C’est pour cela qu’au-delà de la Constitution, les gens devraient disposer d’une Charte qui soit au-dessus du roi et ne doit pas être changée, car elle assure la dignité et la valeur de la personne. Dans le contexte américain, la Charte qui a été faite par les pères de la nation, dispose de chapitres qu’on ne peut pas changer et qui restent intangibles, parce qu’ils définissent la personne humaine selon la conception qu’ils ont de l’Homme. Mais leur handicap est que leur conception de l’Homme affirme la prééminence de l’individu au détriment de la famille et de la société. C’est pourquoi les lobbies des armes arrivent toujours à défendre la vente des armes. Et c’est pourquoi les autorités n’arrivent pas à réguler ce secteur pour défendre la sécurité des citoyens. Cette conception de l’Homme étant individualiste, les autorités n’arrivent pas non plus à avoir des lois sociales dignes de ce nom. Donc, du point de vue de la civilisation, nous sommes mieux par rapport à eux, car nous avons une meilleure conception de la personne humaine et de la vie en société. Mais, ce que je voudrais dire, c’est qu’ils ont une Charte qui ne change pas, de même que les Français et les Anglais. Mais à notre niveau, nous parlons seulement de Constitution alors que le fait d’avoir une Constitution et d’organiser des élections ne garantit pas la liberté d’un peuple, et c’est ce qui se passe dans tous les pays d’Afrique. La distinction entre la Charte et la Constitution est donc essentielle, et l’Eglise doit intervenir parce que ce sont des états généraux qui doivent élaborer la Charte et non des partis politiques. On met en place des états généraux et on y vient en tant que citoyen, pour voir comment organiser la société et non pour conquérir le pouvoir.
« En 1966, la revendication était d’abord d’ordre social ; on ne pensait pas faire partir le chef de l’Etat. Mais quand il s’est entêté, on lui a dit finalement de s’en aller »
C’est dans cette Charte que l’on définit la laïcité qui doit, d’ailleurs, être positive, et on essaie ensuite de déterminer comment chacun peut apporter ses valeurs de foi, pour que cette Charte qui sera établie soit hospitalière et bienveillante pour tous. La laïcité est l’arbre à palabres sous lequel tout Homme amène ses valeurs pour qu’on en discute. Ce qui diffère de la laïcité française qui veut imposer une certaine non- foi en disant qu’on ne peut pas prouver que Dieu existe. Mais personne ne peut prouver, non plus, que Dieu n’existe pas !
Vous avez tantôt parlé de similitudes entre la révolution du 3 janvier 1966 et ce qui s’est passé les 30 et 31 octobre 2014. Quelles sont ces similitudes ?
En 1966, la revendication était d’abord d’ordre social et on ne pensait pas faire partir le chef de l’Etat. Mais quand il s’est entêté, on lui a dit, finalement, de s’en aller. C’est ce qui s’est passé dans le cas de Blaise Compaoré. On lui a d’abord demandé de ne pas modifier l’article 37, de rester jusqu’à la fin de son mandat et de sortir par la grande porte. Il a refusé parce qu’il avait aménagé des stratégies pour rester au pouvoir. Mais le peuple, conscient de cela, a fini par lui dire de partir. La particularité de ce qui s’est passé en 2014, c’est le fait que des leaders comme Zéphirin Diabré, ont compris le principe de la Charte et de la loi fondamentale qui doit être immuable. C’est ce qui concerne la gestion du pouvoir et la division des pouvoirs, et lorsqu’on perd cela, on devient esclave. Ces leaders ont compris cet aspect des choses et ont fini par dire au Président de partir. Mais, je voudrais dire aussi que ce qui est arrivé aurait pu être plus sanglant, car nul ne sait ce qui s’est passé réellement au sein de l’armée. Blaise Compaoré avait des partisans dans l’armée, et si cette armée s’était divisée, on aurait eu le scénario de la République Centrafricaine. Les bruits des armes auraient pu retentir et à ce moment, l’Occident allait intervenir. Mais cela n’a pas été le cas car, premièrement, au Burkina, il y a eu le peuple, la base, qui a tenu et est resté soudé autour de Zéphirin Diabré. Il y a eu Yacouba Isaac Zida qui s’est retrouvé en face de Blaise Compaoré. Ce dernier, par son « Burkindlim», donc son intégrité, avait la sympathie de ses Hommes. Par conséquent, il avait un certain pouvoir dans l’armée, mais il faisait quand même face à des militaires acquis à la cause de Blaise.
Qui sont ces militaires ?
Il s’agit de Gilbert Diendéré et de Honoré Nabéré Traoré. Donc Zida, par son intégrité, a pu être, à un moment donné, en danger face à ces deux-là, puisqu’il aurait pu être tué pour la bonne marche de la répression ! Mais quand on lui a demandé de tirer sur la foule, il a répondu que les soldats ne sont pas tombés du ciel ; ils sont, comme on le dit en mooré, des « Teng-biissi », c’est-à-dire des fils du pays. C’est à ce moment que le « Tensob-bila » qui s’était égaré et qui avait confisqué le « Burkindlim » du peuple, a rejoint le peuple et par sa décision, il a donné un dénouement à la crise. Isaac Zida a pu faire éviter le bain de sang, en redevenant un soldat digne de ce nom. Je parlais tantôt de la troïka Kafando, Zida et Zéphirin… C’est vrai qu’on a dit que l’Homme de l’année c’est le peuple burkinabè. Mais moi, je dirais que l’Homme de notre nation, il est pluriel, et c’est le trio Kafando, Zida et Diabré. Kafando est un civil qui a évolué dans la diplomatie et qui, par conséquent, a été bien formé pour diriger la transition. Donc, Kafando, c’est le « Burkindlim » restitué par le soldat au peuple. Zida, c’est le soldat devenu Burkinabè et qui a compris que son rôle, c’est de défendre ceux sur qui on lui avait demandé de tirer. Diabré, c’est l’homme intègre qui sait ce que c’est que la Charte, la loi fondamentale et ce qui doit protéger le peuple.
Il a compris ce qu’est un Etat de droit véritablement neutre et il a su conscientiser le peuple. Ils ont donc su maîtriser la situation, mais en ce qui concerne le déroulement de la transition, je dirais que leur rôle n’est pas encore terminé. Michel Kafando disait à un représentant de l’Union africaine (UA), qu’il fallait intégrer la limitation des mandats dans les lois de tous les pays africains. On lui a répondu que cela n’était pas possible, parce que chaque pays a sa Constitution et ses réalités. Je dis cela parce que Michel Kafando, en agissant ainsi, a compris l’importance de la limitation des mandats. Mais je crois qu’au-delà, il faudrait plutôt rechercher un moyen de protéger le pouvoir contre l’accaparement d’un seul individu. Zéphirin Diabré, lui, à l’entendre, semble favorable à la limitation des mandats à deux. C’est donc en ce sens que je dis que ces personnes sont emblématiques pour la transition et qu’elles doivent continuer de jouer leur rôle pour l’aboutissement de la transition.
Justement, que pensez-vous de l’attelage Zida-Kafando ?
En voyant Yacouba Isaac Zida à la Primature, vous pensez certainement que c’est toujours l’armée qui est au pouvoir. Je ne vois pas les choses de cette manière.
Mais vous disiez tantôt que la place des « Tansob-bii », de l’armée est dans les casernes ?
Nous sommes dans une période de transition et le travail de la transition n’est pas encore terminé. La question de la survie de notre Nation n’est pas d’avoir seulement une Constitution et des élections. Il faut consolider la Charte et la manière d’y arriver reste à trouver.
« Il faudrait plutôt rechercher un moyen de protéger le pouvoir contre l’accaparement d’un seul individu»
Et si, par extraordinaire, après la transition, Yacouba Isaac Zida décidait de rester dans la sphère politique, cela ne vous dérangerait pas ?
Il est dit dans la Charte que ceux qui gèrent la transition se tiendront à l’écart pour que des élections soient crédibles. Donc, nous sommes obligés de faire confiance au processus de la transition et nous devons faire confiance à nous-mêmes. Les personnalités emblématiques comme les évêques et les chefs coutumiers ont aussi un rôle à jouer. N’avez-vous pas remarqué qu’à un moment donné, les autorités religieuses, politiques et militaires se sont retrouvées à la cour impériale ? C’est l’ébauche des états généraux et cela représente ce qui reste quand un pays commence à s’effondrer. Pour consolider ces acquis et l’esprit de la Charte, certains ont proposé de transformer les ruines de l’Assemblée nationale en musée. A côté de cela, pour moi, Sa Majesté, Naaba Baongo et ses homologues de Ouahigouya, Fada, Tenkodogo… et les principautés de toutes les ethnies doivent, sous le patronage de la République, initier une décoration avec trois distinctions que sont le « Burkindlim », « Burkindi » et « Burkina ». Il s’agira d’abord de la distinction « Burkindlim Kafando », qui représentera la Charte que le peuple a retrouvée au cours de cette transition. Ensuite, la distinction « Burkindi Zida ». Yacouba Isaac Zida a joué un grand rôle en nous évitant un bain de sang et nous avons amorcé cette transition grâce à son « Burkindi » car, en tant que militaire, il a retrouvé son statut normal. Enfin, la distinction « Burkina Diabré », l’Homme intègre qui a donné l’exemple à tous ceux qui ont lutté pour que notre pays soit un Etat de droit idéologiquement neutre.
« La chance de notre pays, c’est d’avoir eu, dans le passé, la civilisation du «Burkindlim»
Qu’est-ce qui, selon vous, a changé du point de vue politique et du point de vue des valeurs morales de la Haute-Volta au Burkina Faso d’aujourd’hui ?
Je reste convaincu que Mgr Thevenou, en voyant ce qui s’est passé récemment, a le sourire aux lèvres, lui qui, à son arrivée, a voulu faire du Burkina un Etat de droit idéologiquement neutre. Si l’Eglise avait joué son rôle d’accompagnatrice, et si elle avait cultivé les vrais cadres du pays, on n’aurait pas évolué de la sorte, mais on aurait plutôt été un bel exemple de démocratie. Mais cela n’a pas été le cas, car le peuple n’a pas été suffisamment conscientisé. Ceux qui avaient la force et les moyens de le faire, c’est-à-dire les évêques, ne l’ont pas fait. Le passage de la Haute-Volta au Burkina Faso a été suivi d’une idéologie qui a été abandonnée à un moment donné. Lorsque les évêques de la Haute-Volta se sont retrouvés devant le Pape Jean Paul II, ce dernier leur avait posé des questions sur la Nation. L’un deux a défendu le régime du Conseil national de la Révolution (CNR). D’ailleurs, ce même CNR se glorifiait d’avoir l’évêque auxiliaire comme son aumônier. Mais le CNR avait des accointances avec le Nicaragua et les pays de l’Est. Donc, le Pape, qui est originaire de Pologne, savait ce qu’étaient ces types de régimes. Alors, quand l’évêque a défendu le régime du CNR, en disant que Sankara était un nationaliste, le Pape lui a répondu ironiquement : « C’est pour cela qu’il nationalise les terres ». C’est une idéologie marxiste, et quand on nationalise tout, le peuple, à un moment donné, devient le prolétaire. En outre, à l’école, l’enseignement tendait vers l’athéisme. Ces aspects ont constitué une régression par rapport à ce qui se passait dans la Haute-Volta qui, aussi, n’a pas pu faire son envol dans la lignée des principes essentiels de la doctrine sociale de l’Eglise qui devrait faire du pays un Etat de droit idéologiquement neutre.
Mais sur le plan des valeurs morales, qu’est-ce qui a changé ?
De plus en plus, on n’arrive pas à cerner la jeunesse. D’ailleurs, cela ne dépend pas tellement des institutions. A l’heure actuelle, avec l’avènement de l’Internet, c’est difficile. J’ai suivi récemment ce qui s’est passé en France, où les enfants sont traumatisés par l’utilisation de l’internet avec l’accès à la pornographie et autres. La chance que notre pays a, c’est d’avoir eu, dans le passé, la civilisation du « Burkindlim » qui a profondément formaté les gens, en les amenant à garder certaines valeurs.
Quels jugements portez-vous sur la gouvernance politique d’aujourd’hui en Afrique ?
Mon jugement sur la gouvernance africaine est négatif. Lorsque Charles De Gaulle a donné l’indépendance aux Etats africains, il a dit ceci : « Je ne leur donne pas l’indépendance ; je leur donne la personnalité internationale ». Parce que, pour lui, les Africains ne disposaient pas de ressources humaines capables de gouverner et de mettre en place des Etats-nations indépendants. Il s’attendait à ce qu’ils se chamaillent pour enfin revenir vers l’Occident. C’est dire que la métropole n’a pas concédé aux pays africains le transfert technologique et les bases de la démocratie. C’est ainsi qu’on est parti, à la base, avec des despotes. Actuellement, les Etats francophones qui donnent des exemples en matière de démocratie sont le Sénégal et le Bénin. Pour les autres, tant qu’ils ne parviendront pas au statut d’Etat idéologiquement neutre, la gouvernance sera toujours marquée par la corruption.
Que pensez-vous des chefs d’Etats qui tripatouillent leur Constitution pour se maintenir au pouvoir ?
Il faut des révolutions pour les faire partir. Ce sont des gens qui maintiennent leur peuple dans l’esclavage, et cela n’est pas acceptable. Dans chaque pays, ce qu’il aurait fallu, c’est de mettre en place des états généraux afin de bien bâtir l’Etat. Frédéric Guirma, en 1990, l’a proposé, mais cela a été refusé. Le Bénin l’a fait et l’a adapté à sa manière, en l’appelant « conférence nationale ». Mais la conférence nationale diffère des états généraux. Les états généraux permettent de mettre en place une charte. Et pour cela, comme je l’ai déjà dit, les autorités religieuses et traditionnelles ont un rôle à jouer, car il s’agit de sauvegarder la dignité humaine.
« L’Eglise, au niveau universel comme au niveau national, est malade »
Quel regard portez-vous sur la vie pastorale au Burkina ?
Le Pape, actuellement, est en train d’œuvrer pour la purification de l’Eglise. Il combat, entre autres, le carriérisme qui est le fait de courir, au sein du clergé, vers les distinctions au lieu de voir la fonction du prêtre comme un sacerdoce. Depuis Abidjan, quand j’entends les laïcs parler des prêtres, cela me fait honte et me décourage. Parce que les prêtres n’ont pas la spiritualité et la moralité qui sèyent pour leurs fonctions. Ce sont les laïcs, dans ces conditions, qui prennent le relais pour sonner l’alerte. L’Eglise, au niveau universel, comme au niveau national, est malade. Elle est divisée par de grands problèmes de civilisations, de dogmes et de morale. Au Synode dernier, on a assisté à la division entre deux cardinaux sur la question du mariage et des divorcés remariés. Cela m’a amené à me poser la question de savoir si c’est l’Eglise qui doit s’adapter au monde ou si c’est le monde, créé à l’image de Dieu, qui doit se convertir à la parole de Dieu. Cette question a tout son sens, et c’est pour cela que je crois que les Evêques doivent veiller sur ce que les civilisations occidentales nous apportent, telles que la question du genre et ses implications. Au Burkina, le fait que le Cardinal se soit permis de condamner et de démentir un Evêque et une religieuse qui n’est pas sur sa juridiction, est un délit. Aucun Pape, depuis le Pape Pie XII, n’a donné le pouvoir à un Evêque que ce soit, de condamner un fidèle qui n’est pas sous sa juridiction. Mais, si cela est arrivé, c’est la preuve que notre Eglise est malade.
A quoi vous vous consacrez actuellement ?
Je suis venu au Burkina pour interpeller l’Eglise et l’Etat. Il y a eu des apparitions et des messages au Burkina. C’étaient des apparitions de la Vierge et de son fils que Mgr Guirma a reconnues à travers la voyante qui était une petite fille inculte. Des signes sont donc apparus avec des guérisons miraculeuses. L’année dernière, le 9 juillet et le 15 août, il y a eu « la danse du soleil » dans la cour de Mgr Guirma et une femme a été guérie du SIDA, une autre de la drépanocytose… Ce sont là des signes que le Ciel donne. Thomas Sankara a reçu ces messages, mais il n’en a pas tenu compte et il est mort. Quatre jours avant son décès, la scène de sa mort lui avait été montrée par la voyante. Quand Thomas Sankara s’est rendu à Yagma, le Seigneur lui avait demandé de gouverner avec justice et modération. Pour ma part, j’émets certaines hypothèses sur le décès de Sankara. D’abord, parce qu’il est venu au pouvoir avec un groupe révolutionnaire marxiste. Et ce groupe, par sa nature, a dû le sanctionner, avec la rivalité qu’il y avait entre lui et Blaise Compaoré. Ensuite, je me demande si la mort de Thomas Sankara n’aurait pas été du fait de la malédiction de Naaba Oubri ? En effet, ce dernier, quand il consacrait le rite de la civilisation du « Burkindlim », disait que Ouagadougou en était le sanctuaire. Par conséquent, celui qui entrera dans la ville pour prendre le pouvoir par le sang, verra sa tombe piétinée aussi. Et, avant l’arrivée du Blanc, il n’y a eu qu’un seul coup d’Etat avec le prince Boukary Koutou. Ce dernier a forcé le collège impérial à le choisir et a été chassé par la suite avec l’arrivée des Français.
« Quand les hommes emblématiques parlent n’importe comment, ils peuvent créer des nuisances terribles »
C’est qu’il est important de prendre en compte les messages du Ciel. Le Seigneur a dit qu’actuellement, il s’est penché sur le monde et que, seule la civilisation du « Burkindlim » lui a plu chez les Noirs. Il est venu donc pour demander l’hospitalité dans le cœur de l’Homme intègre. Le Seigneur voudrait donc que l’on fasse des aménagements à Yagma pour le monde entier, car il a choisi ce pays pauvre pour établir sa présence et pour déverser ses grâces de la dernière minute. Il veut donc interpeller les grandes civilisations, notamment, les Etats-Unis et la France qui ne reconnaissent plus le Dieu créateur et qui deviennent de plus en plus païennes. C’est donc ces messages que le Seigneur a véhiculés à travers les apparitions et que le Cardinal n’a pas voulu percevoir. C’est ainsi qu’il a persécuté Mgr Constantin Guirma et la messagère. Je suis donc obligé de relever cela, car il n’a pas le droit de le faire. Je ferai donc un dossier pour le Pape et j’interpellerai l’Eglise et l’Etat. Car le fait d’avoir livré Mgr Constantin Guirma et la religieuse de la sorte, est une erreur, vu que les gens considèrent le Cardinal de Ouagadougou comme une référence. Ces deux fidèles ont été calomniés et ont subi la diffamation. Dans cette diffamation, justement, l’Etat est impliqué par le biais d’un commissaire, le sieur Simon Coulibaly, qui a reçu des journalistes français et a calomnié la religieuse en disant que ses mœurs étaient légères. Quand les hommes emblématiques parlent n’importe comment, ils peuvent créer des nuisances terribles. Nous devons donc le relever pour que cela soit un examen de conscience pour le pays. Au fond, si on veut juger l’Eglise et l’Etat, il suffit de regarder le « Burkindlim » et le « Burkindi » de chacun. En cela, vous verrez si le pays se porte bien ou pas.
PROPOS recueillis par la rédaction et retranscrits par Colette DRABO et Adama SIGUE
ENCADRE
Qui est le Père Réné Belemsida Guirma ?
Réné Belemsida Guirma, aujourd’hui âgé de plus de 80 ans, a été ordonné prêtre en 1958. De 1958 à 1964, il a été un prêtre séculier. Il a intégré le Petit séminaire de Pabré en 1963 en tant que professeur. Là-bas, il eut comme élèves les archevêques Rouamba et Philippe Ouédraogo (NDLR : actuel cardinal). Après cette expérience, l’homme intégra l’Ordre des Dominicains qui est un Ordre particulier de spécialisation en théologie. Réné Belemsida Guirma va ensuite poursuivre ses études universitaires à Lyon, à la faculté catholique où il passa son habilitation au Doctorat en Théologie. Dans le même temps, il suivait des cours pour obtenir son Doctorat en anthropologie culturelle. Afin de parfaire sa formation, l’homme de Dieu a également mené des études sur Marx et Hegel à l’université de Vincennes.
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