Politique
Nana Thibault, président du rassemblement démocratique populaire : « J’avais dit à Blaise Compaoré de faire attention à son entourage »
Publié le mardi 6 janvier 2015 | Le Quotidien
© aOuaga.com par G.S
UEMOA : 20 ans au service de l`intégration économique Lundi 20 octobre 2014. Ouagadougou. Salle des banquets de Ouaga 2000. Les chefs d`Etat et de gouvernement des pays membres de l`Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) se sont retrouvés pour célébrer le 20e anniversaire de l`organisation commune placé sous le thème "UEMOA, 20 ans, les voies d`un développement solidaire". Photo : Blaise Compaoré, président du Faso |
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Dans l’interview qu’il nous a accordée, le 3 janvier 2014, Nana Thibault, président du Rassemblement démocratique populaire donne sa lecture de l’insurrection populaire intervenue au Burkina et du fonctionnement des organes de la transition. Selon lui, les émoluments des membres du Conseil national de transition sont exorbitants et sont une insulte au peuple burkinabè et surtout aux martyrs. Celui qui a dirigé le Mouvement des jeunes patriotiques suggère au gouvernement de s’attaquer à l’épineuse question des frais de scolarité et de promouvoir le dialogue pour une paix véritable au Burkina.
Le Quotidien : Nous sommes aujourd’hui, le 3 janvier 2014, date commémorative de l’insurrection populaire de 1966. Comment avez-vous vécu celle de cette année ?
Nana Thibault, président du RDP : Je voudrais profiter de vos colonnes pour rendre hommage à l’ensemble de la jeunesse du Burkina. A travers son courage et sa détermination, elle a pu chasser Blaise Compaoré du pouvoir, après 27 ans de règne. L’insurrection populaire a pu ramener le peuple burkinabè dans sa dignité. La jeunesse et le peuple burkinabè n’avaient plus confiance au pouvoir de la 4e République.
Je voudrais aussi rendre un grand hommage à tous ceux qui sont tombés lors de l’insurrection populaire. Que la terre du Burkina leur soit légère. Pour revenir à votre question, nous avons suivi de bout en bout ce qui s’est passé. Avant que l’insurrection populaire n’arrive, Nana Thibault a été de ceux qui ont toujours tiré sur la sonnette d’alarme. J’ai toujours prévenu le président Blaise Compaoré. Je lui avais surtout dit de faire attention à son entourage car c’est lui qui allait lui créer des problèmes. Dans votre parution du 23 mars 2014, j’avais dit au président qu’organiser un référendum était inopportune en ce sens qu’il y a des priorités dans l’éducation, la santé, etc. il y a toujours des écoles sous paillotes, des dispensaires qui ne disposent pas de produits de première nécessité. Pour moi, la modification de l’article 37 était simplement du gâchis. Mais je tiens à dire que je ne condamne pas le président du Faso parce que chez nous, il n’y a pas de bon roi. C’est son entourage qui le façonne. Je voudrais aussi dire, en toute sincérité, que le Burkina a bel et bien échappé à une guerre civile. Elle était prévisible dans la mesure où j’avais dit, en 2002, que Blaise Compaoré finira comme Mobutou, roi du Zaïre (Ndlr : Dans une lettre ouverte en date du 17 juillet 2002, parue dans un quotidien de la place, Nana Thibault invitait Blaise Compaoré à faire attention à son entourage, car ces hommes et femmes qui s’adossent à lui pour s’enrichir malhonnêtement le lâcheront tôt ou tard et témoigneront à charge contre lui comme dans le film ‘’ Mobutu ’’, roi du Zaïre). C’est exactement ce qui s’est passé. Si aujourd’hui, Blaise Compaoré a quitté précipitamment, c’est grâce aux prières des toutes les confessions religieuses. Je remercie le président Blaise Compaoré pour n’avoir pas fait une résistance qui ne servirait à rien que de mettre le pays à feu et à sang.
Vous soutenez avoir prévenu le président du Faso. Pourtant votre parti était membre du Front républicain. Ne cautionniez-vous pas l’idée de l’organisation du référendum en vue de la modification de l’article 37 ?
Même en tant que membre du Front républicain, j’avais clairement soutenu ma position, celle de ne pas modifier l’article 37.
Vous ne pouvez quand même me dire qu’au sein du CDP, tout le monde était d’accord avec le projet de référendum. Il y a des gens qui étaient au CDP et qui ne cautionnaient pas la démarche des premiers dirigeants. J’étais au Front républicain parce que les Hermann Yaméogo ( nldr : président de l’UNDD) et Assimi Kouanda ( secrétaire exécutif national du CDP) ont soutenu qu’il s’agissait d’un cadre de dialogue. En tant qu’homme de dialogue, j’y suis allé. Ce n’était pas pour soutenir la modification de l’article 37.
Après l’insurrection populaire, des organes de transition ont été mis en place. Comment appréciez-vous l’action de la transition ?
Il y a des gens qui sont venus dans la transition comme un cheveu dans la soupe. Beaucoup de ceux qui sont au-devant de la transition sont en train de faillir à leur mission. Depuis l’insurrection populaire, beaucoup de gens se posent la question à savoir où se trouve Nana Thibault. J’ai pris tout le temps d’observer. Le choix de membres au sein du Conseil national de transition a été une mascarade. Des partis politiques du Front républicain ont été convoqués au siège du RDBF à l’Espace or. Quand nous sommes allés, ce sont des éléments de Ram Ouédraogo et de Hermann Yaméogo qui nous ont informés de la mise en place du CNT. Ce jour-là, j’ai dit que nous ne voulons pas aller au CNT pour de l’argent mais pour dire la vérité et ramener la justice dans notre pays. Je ne savais pas qu’il y avait des gens qui avaient des échos qu’en allant au CNT, ils allaient avoir beaucoup d’argent. J’ai appris que les membres du CNT touchent jusqu’à 1 million 400 mille ? C’est un échec. Cela m’étonne encore plus parce que c’est Cherif Sy qui est à la tête de la structure. Nous avons milité ensemble pour défendre les idéaux de Thomas Sankara. Comment peut-il accepter en venant au CNT que les membres empochent de telle somme d’argent au détriment du peuple burkinabè ? L’erreur que le CNT a commise est impardonnable. Je propose que les premiers salaires des dirigeants de la transition soient reversés aux familles des martyrs. C’est une manière de reconnaissance aux familles parce que c’est leurs enfants qui sont tombés pour la Nation burkinabè. Pour moi, c’est un geste symbolique.
En dehors de l’émolument des membres du CNT, comment jugez-vous les autres actions du CNT ?
Je salue par exemple, à sa juste valeur, la levée de la suspension du CDP et de l’ADF-RDA.
Quels sont vos vœux pour cette année 2015 ?
Je souhaite la paix, un développement durable pour le Burkina. Que l’année 2015 soit une année de prospérité, de santé, de longévité, d’amour.
Je demande aux hommes politiques de ne pas défendre leurs intérêts personnels mais ceux du peuple burkinabè. J’avais omis de demander au président Michel Kafando de promouvoir le dialogue. Il faut qu’il évite les effets d’annonce. J’aurai voulu qu’il annonce dans un premier temps la baisse des prix des frais de scolarité. Le changement est intervenu grâce à la jeunesse. Combien de jeunes sont obligés de quitter les bancs parce que leurs parents n’arrivent pas à payer les frais de scolarité ? 1
Interview réalisée par RHO
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