Afrique
Sommet cedeao à Abuja : défis et espoirs d’une région tourmentée
Publié le mardi 16 decembre 2014 | L`Observateur Paalga
© Autre presse par Présidence CI
Cérémonie d`ouverture du 46ème Sommet ordinaire de la CEDEAO Lundi 15 décembre 2014. Abuja (Nigeria). Cérémonie d`ouverture du 46ème Sommet ordinaire de la Communauté Economique des Etats de l`Afrique de l`Ouest (CEDEAO) |
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Abuja, la capitale du Nigeria, a abrité, le lundi 15 décembre 2014, la 46e session ordinaire de la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement des pays de la CEDEAO, qui se sont penchés sur les défis majeurs de la sous-région et sur les actions déjà réalisées au sein de la Communauté. On retiendra de ce sommet, entre autres, la remise officielle du rapport sur le Tarif extérieur commun (TEC) qui entre en vigueur le 1er janvier 2015, l’appel lancé aux autorités du Burkina à respecter la charte de la transition et la reconduction de John Mahama Dramani du Ghana comme président de l’institution sous-régionale.
Dimanche 14 décembre 2014. Nous quittons Ouagadougou à bord de l’avion présidentiel pour Abuja où le nouveau locataire de Kosyam doit prendre part à la 46e session ordinaire des chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO. En moins de deux heures de vol, nous voici à l’aéroport international de la capitale fédérale du Nigeria. Sur le tarmac, l’ambassadeur du Burkina, Firmin P. N’Do, le président de la Commission de la CEDEAO, Kadré Désiré Ouédraogo, le ministre nigérian des Sciences et de la Technologie, Abdu Bulama, et d’autres officiels venus accueillir Michel Kafando.
Après les salamalecs protocolaires, le cortège de la délégation burkinabè s’ébranle pour l’hôtel Hilton, un cadre chic et enchanteur, où Goodluck Ebele Jonathan loge ses hôtes venus pour le sommet. Tous les dirigeants des 15 pays de la CEDEAO n’étaient pas au rendez-vous mais la majorité d’entre eux y étaient, à savoir John Mahama Dramani du Ghana, Alassane Ouattara de la Côte d’Ivoire, Ibrahim Boubacar Keita du Mali, Mahamadou Issoufou du Niger, Dr Yayi Boni du Bénin, Faure Gnassingbé du Togo, José Mario Vaz de la Guinée-Bissau ; les autres présidents se sont fait représenter surtout par leur chef de la diplomatie.
Dans le programme officiel, la rencontre devait s’ouvrir à 10h soit 9h (TU), heure de Ouagadougou. Mais un membre de notre délégation, habitué aux sommets des chefs d’Etat, nous avait prévenu : au Nigeria, on respecte très rarement les horaires de l’agenda du jour de ces genres de rencontre. Ce fut effectivement le cas, car c’est peu avant 11 heures que la cérémonie d’ouverture, initialement prévue pour 10 heures, a débuté avec quatre interventions : celles de Goodluck Jonathan, John Dramani, président en exercice de la CEDEAO, Kadré Désiré Ouédraogo et Ibn Chambas, représentant spécial du secrétaire général de l’ONU en Afrique de l’Ouest.
Ebola, terrorisme, paix et développement sur la table
Actualité de la sous-région ouest-africaine oblige, l’épidémie à virus Ebola qui menace les populations de la CEDEAO, objet du reste d’un sommet extraordinaire le 6 novembre dernier à Accra, a été évoquée. Les intervenants se sont réjouis de la mobilisation des Etats et du soutien des partenaires qui ont abouti à la constitution d’un Fonds régional de solidarité et à la mise en place de mécanismes de coordination des actions à mener au niveau pays.
En plus d’Ebola, le terrorisme et l’extrémisme constituent un autre défi majeur auxquels les Etats doivent faire face, en l’occurrence le Nigeria avec Boko Haram, le Mali et le Niger avec AQMI et autres groupes terroristes. Tous ces problèmes sont une menace pour la paix ainsi que la stabilité et, partant, freinent le développement de nos pays.
Cela dit, malgré les nombreuses difficultés, l’espoir est permis dans l’espace CEDEAO : en effet, l’économie de la sous-région ouest-africaine connaît une forte croissance de l’ordre de 6,6% à en croire Kadré Désiré Ouédraogo ; les projets initiés dans l’espace CEDEAO se concrétisent tels que les postes frontaliers juxtaposés et le tarif extérieur (TEC), qui entre en vigueur le 1er janvier 2015, et dont le rapport a été officiellement remis aux chefs d’Etat et de gouvernement à l’ouverture du sommet. Pour le président de la Commission de la CEDEAO, Kadré Désiré Ouédraogo, malgré donc les difficultés liées au terrorisme, aux crises sociopolitiques et à l’épidémie à virus Ebola, notre communauté ouest-africaine reste dynamique sur le plan économique. L’ex-Premier ministre du Burkina a par ailleurs indiqué que la question de la libre circulation des personnes et des biens connaîtrait une amélioration avec la carte d’identité biométrique prévue pour 2016 et qui va régler les problèmes de carte de séjour. Au regard des actions réalisées et de celles en cours, Kadré estime qu’il y a des motifs de satisfaction dans notre sous-région.
Le Burkina à l’honneur
Tout comme au sommet de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) tenue à Dakar le 29 et 30 novembre dernier, le Burkina Faso était encore à l’honneur lors de cette rencontre d’Abuja : l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, qui a balayé Blaise Compaoré, a été saluée comme une victoire du peuple burkinabè, et tous les acteurs politiques, militaires et les activistes de la société civile ont été félicités pour leur maturité politique, laquelle a permis de mettre en place les organes de transition. Goodluck Jonathan, John Dramani et Kadré Désiré Ouédraogo ont une fois de plus félicité le président Kafando tout en lui souhaitant plein succès et ont affirmé leur disponibilité à tout mettre en œuvre pour aider notre pays à réussir sa transition.
Du reste, dès les premières heures de la crise, ont-ils rappelé, la CEDEAO était du côté des Burkinabè pour marquer le sens de solidarité des Etats afin de trouver une solution. C’est dans ce cadre que Macky Sall du Sénégal, désigné président du Groupe de contact international pour le Burkina, John Dramani du Ghana et Faure Gnassingbé du Togo ont séjourné à Ouagadougou pour des échanges avec tous les acteurs. Michel Kafando a confié plus tard à la presse qu’en privé tous les chefs d’Etat ont réaffirmé leur engagement à soutenir le peuple burkinabè pour le succès de la transition. En mi-janvier du reste, une délégation de présidents de la sous-région viendra à Ouagadougou pour échanger avec les autorités en vue d’arrêter un chronogramme consensuel de la transition.
Le sommet a pris fin après le huis clos de quatre heures des dirigeants qui a accouché d’une déclaration finale dans laquelle on pourrait retenir, en ce qui concerne notre pays, l’appel lancé par la conférence des chefs d’Etat de la CEDEAO aux autorités burkinabè afin qu’elles respectent la charte de la transition, protègent les leaders politiques et prônent une gouvernance inclusive.
Adama Ouédraogo Damiss
Envoyé spécial à Abuja
Coulisses
Cortège présidentiel, on s’en fout
Au Nigeria, on s’en fout éperdument des cortèges officiels. L’occasion nous a été donnée de le constater à Abuja. De l’aéroport à l’hôtel Hilton, des taximens et des particuliers ont tenté à maintes reprises de forcer le passage pour se faufiler parmi les véhicules de la délégation burkinabè malgré la présence des éléments de la sécurité. Dans un pays où Boko Haram sévit par des enlèvements et des attentas suicides, on a froid au dos de voir un tel spectacle inimaginable chez nous au Faso.
1er tête-à-tête entre Kafando et ADO
Le président ivoirien, Alassane Ouattara, a accordé une audience à son homologue burkinabè avant l’ouverture de la conférence. A sa sortie, le président Kafando a déclaré que depuis sa prise de fonction, il n’avait pas eu l’occasion d’échanger avec le chef de l’Etat ivoirien pour réaffirmer l’amitié et la fraternité entre les deux pays mais aussi la compréhension des problèmes mutuels.
Le petit cours d’histoire du président
Dès son arrivée à Abuja, a peine s’est-il installé que le chef de l’Etat est allé à l’ambassade du Burkina rencontrer les Burkinabè du Nigeria. Lors de ce face-à face, un jeune fonctionnaire a demandé au président d’ouvrir le dossier Sankara afin que la lumière soit faite sur cet assassinat. Le successeur de Blaise Compaoré a expliqué que, dans nos traditions africaines, on permet aux familles de faire le deuil en cas de décès d’un des leurs. Or pour Thomas Sankara, on n’a aucune certitude que l’ex-chef d’Etat repose au cimentière de Dagnoen. «Permettre donc à la famille Sankara de savoir s’il y est effectivement ne saurait être assujetti à une décision de justice. C’est pourquoi, cette affaire a été prise en main par le gouvernement et désormais les investigations peuvent se mener», a-t-il indiqué. Toutefois, il a tenu à faire un petit cours d’histoire sur les circonstances dans lesquelles le colonel Yorian Gabriel Somé, le commandant Fidèle Guébré et le lieutenant-colonel Nézien Badembié ont été exécutés. Pour Kafando, ce sont des drames qui se sont noués entre militaires sous un Etat d’exception. « S’il faut faire connaître toute la vérité sur l’affaire Sankara, il ne faudrait pas oublier les autres crimes de sang. Il appartient maintenant à la justice de faire son travail », a-t-il ajouté en substance.
Les Burkinabè du Nigeria
Notre confrère Ali Kabré, qui a officié dans une radio FM à Ouaga avant d’être correspondant de RFI et aujourd’hui consultant indépendant, est le secrétaire général de l’Association des ressortissants burkinabè au Nigeria. A la rencontre avec Michel Kafando, il a énuméré les difficultés auxquelles sont confrontés nos compatriotes au pays de Goodluck (problèmes de documents administratifs surtout et de tracasseries des forces de sécurité au niveau des commerçants) et a demandé au chef de l’Etat de faire en sorte que la construction du consulat général de Lagos soit une réalité. Le numéro 1 du Faso dit avoir pris bonne note et promit d’inscrire la doléance dans l’agenda afin que le prochain président puisse prendre à bras-le-corps le problème au cas où une solution n’y serait pas trouvée pendant cette transition.
Cet échange avec la communauté burkinabè a également permis aux fonctionnaires internationaux de notre pays basés à Abuja, principalement à la CEDEAO, de proposer leurs services aux nouvelles autorités, notamment dans les questions comme l’intégration de la jeunesse dans le développement et le placement des cadres burkinabè dans les institutions internationales.
A.O.D
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