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Alexis Lourgo, DG de la SBIF
Publié le jeudi 20 novembre 2014  |  Sidwaya
Alexis
© Autre presse par DR
Alexis Lourgo, directeur général de la Société Burkinabé d’intermédiation financière (SBIF)




Alexis Lourgo est le directeur général de la Société burkinabè d'intermédiation financière. L'expert financier livre ses analyses sur la crise politique au Burkina, près de 3 semaines après l'insurrection populaire qui a poussé Blaise Compaoré à la démission. S'il se félicite de la nomination d'un président civil, M. Lourgo soutient que cette crise n'a pas eu de conséquences notables sur le marché financier régional.

Sidwaya (S.) : Comment la Bourse régionale des valeurs mobilières de l’UEMOA, réagit-elle à la situation au Burkina?

Alexis Lourgo (A.L.) : La crise politique au Burkina Faso n’a pas eu de conséquences notables sur le marché financier de l’UEMOA dans son ensemble. Nous n’avons constaté aucune baisse significative des cours des titres à la BRVM.
Sur les 37 sociétés cotées à la BRVM, il n’y a que deux sociétés qui sont burkinabè (Bank Of Africa - Burkina et l'ONATEL). Les titres de ces deux entreprises n’ont pas connu de variations négatives significatives que l’on pourrait lier à la crise politique survenue au Burkina.
Il faut noter que pour leurs placements financiers, les investisseurs ne tiennent pas seulement compte de la situation économique et politique du Burkina mais aussi et surtout des fondamentaux, des résultats financiers et des perspectives financières des sociétés cotées.
En somme, il n’y a pas d’inquiétude pour ce qui concerne la réaction du marché financier en général et de la BRVM en particulier à la situation politique actuelle du Burkina.

S. : Pourquoi la crise politique du Burkina a poussé les agences de notation WARA et Standard and Poor à placer sous surveillance négative la note souveraine du pays ?

A.L. : Cette mise sous surveillance négative de la note souveraine du Burkina est normale. Il faut savoir que dans la notation d’un pays, il y’a plusieurs indicateurs ou risques qui sont pris en compte, dont le risque sociopolitique. Il s’est trouvé qu’avec la crise politique de fin octobre 2014, ce risque, ici négatif, a pris une proportion importante.
Les incertitudes sur les futures institutions politiques, les éventuelles sanctions brandies par certaines institutions, le risque de voir le Burkina être mis au ban de la communauté financière internationale, la potentielle dégradation de l’économie nationale, ont naturellement amené les agences de notation à placer sous surveillance négative la note du Burkina. Cette mise sous surveillance négative peut être considérée comme conjoncturelle.
Avec la nomination d’un président de la république par intérim civil et la mise en place des institutions de la transition, cette mise sous surveillance pourrait être levée dans les Wood, toute éventualité devrait pouvoir être assez rapidement maîtrisée.

S. : Les notes de l'ONATEL et de Coris bank ont été dégradées et mises sous surveillance par l'agence WARA. Pourquoi ?

A.L. : L’agence de notation West africa rating agency (WARA) a effectivement mis sous surveillance les notes de Coris Bank et ONATEL. La crise politique a des conséquences négatives sur la vie de ces deux entreprises notées. Dans la note attribuée aux entreprises par les agences de notation, le risque d’instabilité économique, politique et sociale est pris en compte. La probabilité élevée de sa réalisation ou sa réalisation tout simplement entraîne ce type de mise sous surveillance négative. Comme déjà indiquée, cette mise sous surveillance négative est conjoncturelle car elle couvre 90 jours. WARA dispose de 90 jours pour confirmer ou abaisser les notes de ces deux entités. Il faut rappeler que ce ne sont pas les fondamentaux intrinsèques de ces deux entreprises qui sont mis en cause mais ce sont des facteurs exogènes liés à la situation politique qui expliquent cette mise sous surveillance négative. Coris Bank et l’ONATEL sont deux entités financièrement très solides. Si la situation politique évoluait de manière positive, comme c’est le cas, la mise sous-surveillance devrait probablement être réévaluée de manière positive bien avant les 90 jours prévus.

S. : Globalement, la situation actuelle est-elle inquiétante?

A.L. : Non, la situation économique actuelle n’est pas inquiétante. Mais elle nécessite de la vigilance dans son pilotage. Les acteurs économiques ont besoin d’être rassurés et c’est ce que, les autorités essaient de faire. La sécurisation des sites miniers peut être citée comme exemple. Il faut que l’ensemble des acteurs économiques continuent à travailler, l’économie doit continuer à «tourner». Si l’économie ne fonctionne pas comme il se doit, des problèmes de recettes fiscales peuvent par exemple apparaître et partant, des problèmes d’investissements socioéconomiques. Dans une telle éventualité, il faudra assurément faire des choix parmi les dépenses.

S. : Au-delà des dégâts causés qui pourraient s'élever à plusieurs centaines de milliards de FCFA, certains analystes pensent que le risque le plus grave pour l'économie va résider en la confiance des investisseurs et des bailleurs de fonds. Quel commentaire faites-vous et en quoi, cette crise porte-t-elle un sérieux revers à la signature du Burkina auprès des investisseurs et des marchés financiers?


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A.L. : On ne peut pas affirmer à l’heure actuelle que cette crise porte un sérieux revers à la signature du Burkina auprès des investisseurs et des marchés financiers. Par exemple, le Burkina Faso finance son économie via le marché financier local de l’UEMOA, entre autres. A ce niveau et pour le moment, aucun indicateur ne permet d’affirmer que cette crise politique a porté un sérieux revers à la signature du Burkina auprès des investisseurs. Pour ce qui est des bailleurs de fonds, on peut espérer vivement qu’avec la nomination d’un président de la république par intérim civil et la mise en place effective des institutions de la transition, les uns et les autres vont poursuivre voire, pour certains, renforcer et augmenter leurs aides financières au Burkina.

S. : Comment analysez-vous les perspectives économiques du pays ?

A.L. : Les perspectives économiques du Burkina dépendent de plusieurs facteurs parmi lesquels les décisions politiques importantes qui seront prises par les autorités de la transition, la reprise de l’activité économique, les cours du coton, de l’or et du pétrole. Il y a aussi les incertitudes ou du moins les conséquences liées à la maladie à virus Ebola en Afrique de l’Ouest, etc.. Nous savons par exemple que le FMI avait prévu avec les autorités du Burkina, en début d’année, bien avant la crise, des taux de croissance de l’ordre de 6,7% à 6,8% respectivement en 2014 et 2015. Il faudrait tout mettre en œuvre pour atteindre ce niveau de taux de croissance, voire le dépasser.
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