La tenue des élections législatives en Guinée Conakry est un casse-tête chinois pour la classe politique. Reportées à plusieurs reprises, elles sont de nouveau fixées au 12 mai 2013. Mais, à peine l’annonce faite par la Commission électorale nationale indépendante (CENI), que l’opposition est montée sur ses grands chevaux. Elle dit n’avoir pas été consultée, ni même ses commissaires au sein de la CENI. Pour elle, il aurait fallu une concertation pour régler les questions en suspens, notamment le choix de l’opérateur chargé des inscriptions sur les listes électorales. Ces griefs de l’opposition indiquent qu’une date a été certes fixée, mais qu’elle n’est pas consensuelle. Et l’on doute fort de la tenue à bonne date de ces législatives. Faut-il le souligner, la Guinée a trop tergiversé sur l’organisation de ces législatives et ne devrait plus continuer à jouer au canard boiteux. Certes, ces législatives constituent à n’en pas douter un enjeu majeur, car chaque camp souhaite contrôler le Parlement. Mais cela ne devrait nullement amener les acteurs politiques à sacrifier l’intérêt général sur l’autel des intérêts personnels et partisans. Le comportement de la classe politique guinéenne est plus que décevant. A travers cet embrouillamini, elle montre à la face du monde son incapacité à tenir une élection équitable, apaisée et transparente. Or, ces législatives devraient parachever le processus électoral enclenché il y a déjà deux ans, et qui a permis à l’opposant historique d’accéder aux plus hautes cimes du pouvoir. A dire vrai, cet introuvable consensus sur l’organisation des législatives discrédite la classe politique guinéenne et l’on se demande si le président Condé en est conscient. Accueilli par certains comme le libérateur, l’enfant terrible de Boké se révèle aujourd’hui être un mauvais élève de la démocratie. S’il tient au peu de crédit qui lui reste, il doit œuvrer à ce que ces législatives se tiennent avant le prochain scrutin présidentiel. Car il serait moins glorieux, sinon anti-démocratique, qu’il termine son mandat sans une Assemblée nationale capable de contrôler l’action gouvernementale, de consentir l’impôt et de voter des lois. Le Conseil national de transition (CNT) mis en place à cet effet ne peut, de façon légitime, jouer ce rôle car n’étant pas élu par le peuple. Le ciel politique guinéen est trop chargé de nuages qui produisent plus d’effets négatifs que positifs. Grandes sont les passions et les méfiances. Peut-on, dans un tel contexte, œuvrer à l’enracinement et à la consolidation de la démocratie ? Il faut en tout cas permettre enfin au peuple guinéen qui a longtemps souffert le martyre sous Lansana Conté, de respirer l’air de la démocratie, la vraie. Les manifestations contre les préfets, notamment celui de Guéckédou qui, selon ses adversaires, exige l’adhésion de tous les fonctionnaires de la ville au Rassemblement du peuple de Guinée (RPG), le parti présidentiel, est l’illustration parfaite que la Guinée n’a pas grandi sur le plan de la démocratie. Il est donc temps que chacun, pouvoir comme opposition, mette de l’eau dans son vin. Dans tous les cas, chacun sera responsable devant l’histoire.