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L’Observateur N° 8271 du 10/12/2012

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Elections couplées du 2 décembre : premières leçons d’un scrutin inédit
Publié le mardi 11 decembre 2012   |  L’Observateur


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© Autre presse par DR
Le CDP, l’UPC et l’ADF-RDA forment le trio de tête dans 12 régions


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Raté !Confiant à l’impressionnant plateau technologique mis à sa disposition, le président de la CENI, Barthélemy Kéré, nous avait promis et «Repromis» les résultats provisoires des élections couplées au plus tard cinq jours après leur tenue. C’est-à-dire à la date limite du vendredi 7 décembre dernier 2012.

Mais à échéance, seuls les chiffres des législatives étaient disponibles : une première cuvée livrée le jeudi 6, laquelle sera complétée le lendemain par les données de la circonscription du Kadiogo et celles de la liste nationale.

Quant aux résultats provisoires des municipales, ils nous ont été déversés le samedi 8. Donc hors deadline. Passe que, pour une raison ou une autre, Me Kéré et son équipe n’aient pas pu tenir dans le délai qu’ils ont eux-mêmes fixé. Mais on ne sait vraiment pas quel usage faire de ces chiffres, et c`est là que le bât blesse.

Puisque pour des élections locales, la CENI s’est contentée de proclamer dans la généralité. En lieu et place de la répartition des sièges par circonscription électorale, elle a balancé des résultats à l’échelle nationale. Si bien qu’il est impossible aux citoyens de savoir sous quelle bannière politique ils seront administrés les cinq années à venir. Quand on annonce, par exemple, 12 340 sièges pour le CDP, 1746 pour l’ADF/RDA et 1615 pour l’UPC, à quoi tout cela renvoie-t-il ? A rien. Rien ne permet de savoir le nombre de mairies conquises par chacun des concurrents et encore moins lesquelles.

Défaillances technologiques ou lenteur humaine ?

En attendant le bilan général de l’organisation de ce double scrutin, le moins qu’on puisse dire, c’est que côté timing, c’est pari raté pour la CENI. Nonobstant le système de traitement de données assisté par satellite. Même si, à la décharge de la Commission, ne l’oublions pas, c’est la première fois que notre pays pratique l’expérience d’élections couplées. Une circonstance atténuante, s’il en est.

N’empêche, ces contretemps sont d’autant préjudiciables à la crédibilité et à la transparence des votes qu’ils nourrissent toutes sortes de suspicions.

Par exemple, l’UPC, qui redoutait déjà des manœuvres frauduleuses visant à « voler sa victoire dans le Kadiogo », est désormais catégorique : la proclamation des résultats du Kadiogo, vingt-quatre après ceux des autres provinces, confirme ses appréhensions. Le parti de Zéphirin Diabré a alors appelé à l’annulation pure et simple et à la reprise du scrutin dans cette circonscription où il estime avoir battu le CDP.

En attendant l’issue de sa requête auprès du Conseil constitutionnel, juridiction en charge de la proclamation des résultats définitifs, quels constats peut-on d’ores et déjà faire de ce scrutin inédit ? Plusieurs ! Les uns réjouissants, les autres surprenants et d’autres encore affligeants.

Les plus heureux d’abord.

Avec près de 77% de taux de participation aux législatives (contre 56,40% en 2007) et 75,30% aux municipales (contre 49,12% en 2006), c’est la démocratie burkinabé qui sort, un brin, grandie de ces élections apaisées. On peut alors affirmer que les électeurs reprennent goût à la cuisine électorale, que les Burkinabé, longtemps blasés de la politique, se sont réconciliés avec les politiques.

Ce regain d’intérêt pour la chose électorale (comparé à la présidentielle de 2010 qui a mobilisé 54,90% des inscrits) est d’abord et surtout lié aux enjeux locaux dont ces consultations étaient porteuses. Le citoyen se sent d’abord concerné par les questions qui affectent son environnement immédiat avant celles qui touchent le territoire national. Il est résident d’une commune d’abord, et habitant d’un pays ensuite. Il est concitoyen d’un maire avant d’être le compatriote d’un président. Cette logique des proximités géographiques influe sur la participation des électeurs selon la nature des votes.

Cette envolée des suffrages est aussi sans conteste un effet induit de l’introduction de la biométrie dans le processus d’enrôlement des électeurs. Innovation majeure et rempart somme toute fiable contre la fraude en amont, l’usage des caractéristiques physiques dans le contrôle de l’identité des votants a apporté son pesant de crédibilité au fichier électoral. Un supplément de fiabilité qui a convaincu plus d’un que sa voix pourrait véritablement compter.

Les constats surprenants ensuite.

Sous réserve de contrôle approfondi du Conseil constitutionnel, avec 70 et 12 340 sièges, respectivement aux législatives et aux municipales, le CDP arrive en tête de cette course aux voix. Mais le véritable vainqueur de cette compétition reste indéniablement l’UPC.

Créé il y a à peine deux ans, ce parti a réalisé la prouesse électorale en arrachant 19 et 1615 strapontins dans ce double scrutin. Ce qui fait d’elle la première force de l’opposition et la deuxième de l’ensemble de la classe politique si on en juge à l’aune de la représentativité à l’Assemblée nationale. Pour un coup d’essai, Zeph. - ainsi qu’on nomme le président de l’UPC - a réussi un coup de maître. Rien de surprenant pour qui se rappelle le patient et formidable travail de fourmi et de maillage du territoire abattu par les UPCistes. Au point que certains se demandaient si l’enfant de Gombousgou n’en faisait pas trop dans ses ambitions politiques. Hier on l’observait, un tantinet amusé, planter ses premiers cactus, aujourd’hui on le regarde, admiratif, récolter les fruits de son labeur. Il va de la politique comme de l’agriculture : on ne moissonne que ce qu’on a semé.

On dira peut-être que le mode de scrutin (la proportionnelle au plus fort reste) y est pour quelque chose dans cette percée fulgurante de l’UPC. C’est vrai. Ç’aurait été la proportionnelle à la plus forte moyenne ou le scrutin majoritaire, que les résultats auraient été autres. N’empêche, tous les partis n’ont pas su tirer profit de cette règle de calcul a priori favorable aux petites formations. Et même le «grand» CDP a bénéficié peu ou prou des avantages de la proportionnelle au plus fort reste.

Les constats affligeants pour terminer.

Avec 70 sièges sur 127, le CDP s’en sort avec une majorité de 55,11%. Mais rapporté à la législature de 2007-2012, où il représentait 65,76% de l’Hémicycle (73 sur 111), il y a net recul. Aussi bien en chiffres relatifs qu’en chiffres absolus.

L’époque du Tuk-guili semble révolue. Le mégaparti sort de ces législatives comme d’une cure d’amaigrissement.

Certes la crise sociopolitique et militaire du premier semestre de 2011 est passée par là. Mais il s’agit là aussi de l’expression de l’usure du pouvoir auquel s’ajoutent les effets réactionnels de la confection « arbitraire et impopulaire » des listes de candidature par le SEN du parti. Sans oublier les répercussions de la mise à l’écart de certains hiérarques du parti lors du dernier congrès du CDP.

Même constat de régression à l’UNIR/PS qui, malgré sa constance dans l’absolu (04 sièges comme en 2007), n’en subit pas moins au soir du 2 décembre dernier, un recul en terme de représentativité (3,6% contre 3,14% cette année). De même que l’UPR de Toussaint Abel Coulibaly dont le nombre de députés passe de 5/111 à 4/127.

Pire, il y a ceux pour qui la proclamation des résultats, même provisoires, vaut messe de requiem. Parmi ces grands brûlés du 2 décembre, il y a le PAREN de Laurent Bado, le FFS de Norbert Tiendrébéogo et le PDP du défunt professeur Ki-Zerbo, tous défenestrés de l’Assemblée nationale. Et dans une moindre mesure le PDS/METBA qui est parvenu à sauver l’honneur avec un siège grâce à la donne personnelle de son président, Arba Diallo, dans la province du Séno.

De self-made-men politiques à l’instar de ce dernier, ce double scrutin en a révélé. Véritable brasseurs d’électeurs, ces derniers s’ouvrent les portes du Parlement à la force du poignet et à la sueur du front. A la différence de ces élus qui doivent leur salut à la machine électorale du parti.

Sont de la trempe de ceux qui gagnent toujours en solitaire : Théodore Salfo Ouédraogo, Dima de Boussouma (RDS), Louis Armand Ouali (UPC), Nicolas Dah (UPC) et Dieudonné Sawadogo (ODT).

Des hommes comme eux, il y en a certainement dans d’autres milieux de la vie nationale. Pour autant faut-il instituer la candidature indépendante aux municipales et aux législatives comme le réclament bien de notabilités de la société civile ?

La Rédaction

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