Société
Rapport d’étape sur le crash du vol ah 5017 d’air Algérie : le mystère serait-il volontairement entretenu ?
Publié le mardi 23 septembre 2014 | Le Pays
© AFP par DR
Des débris de l`avion du vol AH 5017 d`Air Algérie qui s`est écrasé au Mali dans la nuit du 23 au 24 juillet 2014 |
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Saura-t-on jamais la vérité ? C’est la question qu’on ne peut s’empêcher de se poser au lendemain de la présentation du rapport d’étape dans l’enquête sur le crash du vol AH 5017 d’Air Algérie, dans la nuit du 24 juillet 2014. En effet, le moins que l’on puisse dire au regard des résultats du rapport d’étape, c’est qu’on n’a pas vraiment avancé dans l’enquête. La seule certitude à ce jour est que l’avion a brutalement perdu de l’altitude, mais ne s’est désintégré qu’au contact du sol. Cela était déjà plus ou moins connu, il y a déjà deux mois. L’essentiel de ce qui est attendu sur ce crash, reste un mystère. Pourquoi l’avion s’est-il écrasé ? Officiellement, les enquêteurs n’en savent pas plus. Du moins pour le moment, puisqu’ils ont indiqué qu’aucune piste n’est à écarter jusque-là.
Il n’est plus évident que les mauvaises conditions météorologiques soient la raison recherchée
Même la thèse des mauvaises conditions météorologiques, qui semblait tenir jusque-là le haut du pavé en termes d’hypothèses, n’est plus aujourd’hui si solide que cela. Le rapport révèle en effet que s’il est bien clair que le ciel n’était pas radieux cette nuit-là, il n’en demeure pas moins qu’il n’était pas non plus si mauvais que cela. En d’autres termes, pour les enquêteurs, l’orage dont il a beaucoup été question dans les premières heures du crash, n’était pas si violent qu’on a voulu le faire croire. Cela dit, même si l’hypothèse du crash provoqué par l’orage n’est pas définitivement écartée ou à écarter, il n’est plus évident que les mauvaises conditions météorologiques soient la raison recherchée. Pour ce qui est de la piste de l’attentat aussi, les enquêteurs disent ne pas disposer à ce jour d’éléments pour la confirmer ou l’infirmer. Autant dire que le mystère reste entier. Deux mois après la survenue de ce drame, les parents des victimes et l’opinion en sont quelque peu à la case départ, en ce qui concerne les circonstances du crash.
Cette situation est, bien entendu, de nature à alimenter les suspicions de toutes sortes. En effet, ils sont de plus en plus nombreux à se demander si le mystère ne serait pas sciemment entretenu pour des motifs qui s’apparenteraient à des raisons d’Etat. Il faut bien avouer que des faits et non des moindres, avaient déjà semé le doute et contribué à alimenter les suspicions. Ainsi en est-il de la gestion des premiers moments qui ont suivi la disparition de l’avion. Les familles des victimes se sont retrouvées dans un suspens insoutenable, en ce qui concerne le sort de l’avion disparu des écrans radars. On a eu l’impression que cette gestion a été une question purement militaire. Même le volet communication n’y a pas échappé. Par exemple, les circonstances de la découverte de l’épave de l’avion ne sont pas encore claires, rien que pour ce qui est de l’identité des personnes qui ont donné l’alerte. Et certains médias ont eu toute la peine du monde à avoir des informations. Aurait-on voulu éviter que quelque information dérangeante soit divulguée, que quelque secret différent des thèses officiellement servies soit percé et mis à nu ? Cela n’est pas à exclure dans l’absolu.
En tout cas, les zones d’ombre sont nombreuses dans la gestion de cette affaire. Et ce n’est pas ce qui est dit de la deuxième boîte noire qui convaincra du contraire. En effet, on a été quelque peu surpris lorsqu’il a été annoncé que la deuxième boîte noire, celle qui contient les conversations des pilotes, est endommagée et qu’on ne peut pas, a priori, en attendre grand-chose. L’importance de cette pièce pour les enquêtes est pourtant des plus cruciales. Il est tout de même désespérant qu’une boîte noire d’un avion, que les experts disent en principe si bien protégée, soit incapable de livrer sa vérité. Cette situation laisse d’autant plus perplexe que c’est la boîte noire qu’on pourrait qualifier de la plus importante, celle qui est témoin de ce qui est dit dans le cockpit et perçue comme la pièce principale nécessaire à la manifestation de la vérité dans ce cas de figure, qui est dite inexploitable.
Les raisons d’être sceptique sur la manifestation de la vérité ne manquent pas
La présence de militaires français dans l’avion qui a crashé apporte également plus ou moins de l’eau au moulin de ceux qui pensent que l’avion aurait été la cible de terroristes, de tirs des islamistes. En effet, il est notoire que le Nord-Mali est une zone instable aujourd’hui et que les islamistes qui l’écument ont des armes de haute portée. Il est également un secret de Polichinelle que Ouagadougou abrite des groupes rebelles maliens, surtout aux logiques pas toujours recommandables et aux connexions douteuses. On en vient à se convaincre qu’il n’est pas exclu que grâce à quelque informateur depuis Ouagadougou, des terroristes tapis quelque part au Nord-Mali, aient eu vent de l’embarquement de militaires français dans ce vol AH 5017 et aient décidé d’abattre ce Mc Douglass pour se venger de la France pour l’intervention militaire. Les islamistes, on s’en souvient, avaient du reste promis de faire payer à la France et à ses alliés, leur engagement dans le Nord-Mali. En tout cas, l’hypothèse selon laquelle l’avion peut avoir été abattu est loin d’être dénuée de sens, même si on peut aussi s’interroger sur les auteurs de ce tir éventuel. Au demeurant, les parents des victimes, également, n’écartent pas non plus cette hypothèse et on se rappelle d’ailleurs que c’est Me Alidou Ouédraogo qui a levé le lièvre à ce titre, au cours d’une de ses sorties dans la presse.
Comme on le voit donc, il y a beaucoup de questionnements et les raisons d’être sceptique sur la manifestation de la vérité ne manquent pas. Mais il faut espérer que le Bureau d’Enquête et d’Analyse (BEA) en charge de faire la lumière sur les circonstances de ce crash, trouvera le moyen de parvenir à des réponses satisfaisantes et surtout convaincantes. Au demeurant, les enquêtes judiciaires ouvertes au Burkina, au Mali et en France, devront contribuer, elles aussi, à lever ne serait-ce qu’un coin du voile encore si épais, qui couvre les circonstances de ce drame. Cela pourra contribuer un tant soit peu au deuil des familles dont l’immense désarroi est pleinement justifié.
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