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Accusations d’abus sexuels contre l’AMISOM : les dénégations de l’Union africaine
Publié le mardi 9 septembre 2014  |  Union africaine
Nkosazana
© AFP par THOS ROBINSON
Nkosazana Dlamini-Zuma, présidente de la Commission de l`Union africaine (UA)




L'UA réitère sa politique de tolérance zéro en matière de mauvaise conduite et
d'abus sexuels dans ses opérations de soutien de la paix.


La Commission de l'Union africaine (UA) a pris connaissance avec préoccupation du rapport intitulé "Le pouvoir que ces hommes ont sur nous: exploitation et abus sexuels commis par les forces de l'Union africaine en Somalie", publié, ce jour, par Human Rights Watch (HRW). La Commission prend note des allégations qui y sont contenues. Celles-ci feront l'objet d'une enquête minutieuse, et des mesures appropriées seront prises si elles s’avèrent fondées, dans le cadre des mécanismes mis en place par l'UA pour prévenir et réprimer les actes de mauvaise conduite et d'abus sexuels dans ses opérations de soutien à la paix, conformément à la politique de «tolérance zéro» de l'Union en cette matière.

Dans le même temps, la Commission voudrait insister sur le fait que ces allégations ne sauraient entacher la réputation de la Mission de l'UA en Somalie (AMISOM), pas plus qu'elles ne correspondent à la culture organisationnelle et au mode de gestion de la Mission, qui est présentement l'une des plus importantes opérations de soutien à la paix dans le monde. Aussi la description faite de la Mission et les conclusions abusives tirées des allégations formulées contre elle, telles que les résume le titre du rapport de HRW, portent-elles atteinte aux sacrifices consentis et aux acquis obtenus par l'AMISOM et les pays contributeurs de troupes et de personnels de police, ainsi qu'à leur engagement désintéressé aux côtés du peuple et du Gouvernement somaliens, en vue de parvenir durablement à la paix, à la sécurité, à la stabilité et à la réconciliation en Somalie. Rien qu’en 2014, l'AMISOM a repris plus de 14 nouvelles localités au groupe terroriste Al-Shaabab, qui est affilié à Al-Qaeda, et a ouvert d'importants axes routiers pour faciliter l’acheminement de l'assistance humanitaire dans des régions restées longtemps inaccessibles aux agences de secours.

La Commission relève avec une profonde préoccupation le caractère déséquilibré et incomplet du rapport de HRW, ainsi que les inexactitudes qui y sont contenues. À cet égard, la Commission voudrait mettre en relief les éléments ci-après:

i. Premièrement, le rapport de HRW se fonde sur un nombre limité de cas pour tirer une conclusion globale. Il affirme avoir recensé 21 cas présumés d'exploitation sexuelle et de viol. Il indique, en outre, que la plupart de ces actes ont été commis par un seul soldat. La généralisation abusive contenue dans le rapport jure avec le professionnalisme avec lequel l'écrasante majorité du personnel en uniforme de l'AMISOM a continué à s'acquitter de ses responsabilités.

ii. Deuxièmement, et de façon contradictoire, HRW conclut péremptoirement à la culpabilité de l'AMISOM, tout en admettant ne pas avoir enquêté de manière exhaustive sur l'ampleur et la réalité des faits allégués. Par ailleurs, il eût été souhaitable que HRW présentât, ne fût-ce que sous le sceau de la confidentialité, les faits et éléments de preuve importants en sa possession à la direction de la Commission de l'UA et à celle de l'AMISOM, qui auraient ainsi pu diligenter une enquête approfondie. L'AMISOM a fait une requête en ce sens dans une lettre en date du 3 juin 2014 adressée à HRW, qui aurait pu saisir l'opportunité offerte par la rencontre organisée avec la Commission le 5 septembre 2014 pour y répondre positivement. En faisant le choix de ne pas interagir de manière constructive avec l'AMISOM et la Commission de l'UA sur la divulgation d'éléments de preuve qui attesteraient la commission d'actes répréhensibles, et ce malgré la bonne disposition de l'UA, HRW compromet l'esprit de coopération qu'appellent la prévention et la répression efficaces de tels actes.

iii. Troisièmement, le rapport de HRW souffre d'une absence de cohérence dans sa relation des efforts de l'UA visant à prévenir et à réprimer les actes allégués d’exploitation et d'abus sexuels sur le théâtre d'opération de la Mission. D'une part, le rapport affirme que la direction de l'AMISOM n’a pas prêté l’attention requise aux allégations d'abus sexuels. De l'autre, il fait état des mesures prises en vue de lutter contre de tels actes, citant à cet égard le déploiement, par l'Ouganda, d'une Cour martiale divisionnaire en Somalie pour traiter les allégations d’exploitation et d'abus sexuels. Le rapport de HRW fait également référence à l'apparition d'un soldat ougandais devant une Cour martiale de son pays pour une infraction sexuelle commise alors qu'il était en service en Somalie.

La Commission note avec regret l'inexactitude de certaines des affirmations contenues dans le rapport de HRW. Par exemple, le rapport affirme que l'ensemble du personnel de l'AMISOM, y compris les Somaliens recrutés localement, sont à l'abri de poursuites pour les actes criminels commis en leur qualité officielle et qu’à ce titre, aucune sanction n'est prise contre les auteurs présumés de viol, ainsi que d’exploitation et d'abus sexuels. À cet égard, l’UA tient à souligner que l’immunité n'est conférée que pour les matières civiles impliquant le personnel de l'AMISOM, y compris celui recruté localement. La Commission rejette vivement l'insinuation selon laquelle les personnes soupçonnées d'implication dans des actes de viols et d'exploitation et d'abus sexuels bénéficient d’une protection officielle pour ces crimes. Le rapport de HRW passe délibérément sous silence les outils et mécanismes importants que constituent l’Accord sur le statut de la Mission signé entre la Commission de l'UA et le Gouvernement somalien et les Protocoles d'accord conclus entre l'UA et les pays contributeurs de troupes et de personnels de police, lesquels contiennent des dispositions qui traitent des questions relatives à des violations éventuelles.

Le rapport élaboré en 2012 par un Groupe d'experts indépendants sur la situation des droits de l'homme en Somalie, constitué par le Conseil des Droits de l'Homme des Nations unies à Genève, s'écarte et de l'évaluation et des conclusions du rapport de HRW s'agissant du respect par l'AMISOM de la Politique des Nations unies de diligence raisonnable en matière de droits de l’homme. De manière plus précise, le rapport des experts note que «l'organisation de façon régulière, à l'intention des forces de l'AMISOM, de séances de formation sur le droit humanitaire et les droits de l’homme a donné des résultats positifs, y compris en ce qui concerne la prévention de la violence sexuelle liée aux conflits» (A/HRC/21/61, 13 août 2012, paragraphe 20).

La Commission souhaite saisir cette occasion pour, à nouveau, appeler l'attention sur l’existence de mécanismes internes mis en place pour prévenir et réduire l'exploitation et les abus sexuels au sein de l'AMISOM et dans d'autres opérations de soutien à la paix de l'UA, ainsi que pour en sanctionner les auteurs. Au titre des mesures de prévention, il importe de mentionner la formation qui précède le déploiement de l'ensemble du personnel en uniforme de l'AMISOM sur le théâtre d'opération de la Mission. Ce dispositif robuste de formation porte, entre autres, sur l’exploitation et les abus sexuels, la violence basée sur le genre, les obligations découlant du droit international humanitaire, ainsi que du droit international relatif aux droits de l'homme et aux réfugiés. Il inclut également les Règles d’engagement militaire de l'AMISOM et les Règles d'utilisation des armes à feu par la police en ce qui concerne les femmes, les enfants et autres groupes vulnérables. Cette formation est dispensée en collaboration avec les Nation unies.

Les autres mesures préventives incluent: la publication de la Directive du Commandant de la Force sur la conduite des opérations militaires, des formations de rappel dispensées sur le théâtre d'opération et portant sur les mêmes sujets et/ou des développements récents y relatifs; la désignation, au sein des différents contingents nationaux, de points focaux chargés du genre; le développement d'une capacité en matière de bonne conduite et de discipline au sein de la Division des Opérations de Soutien à la Paix du Département Paix et Sécurité de la Commission; et le renforcement de l'Unité de l'AMISOM chargée des Droits de l'Homme, de la Protection et du Genre.

L'AMISOM a aussi mis en place des mécanismes de réponse à travers l'institution d'une Commission d'enquête, aussi bien au niveau des contingents que de son État-major, et la création d'une Commission disciplinaire, en particulier dans les zones où il y a des cas présumés d’harcèlement sexuel commis par le personnel tant national qu'international de l’AMISOM.

Ces mécanismes sont en cours de consolidation pour assurer une plus grande efficacité et responsabilisation. À cet égard, la Commission se félicite de certaines des recommandations de HRW, qui s'inscrivent dans le droit fil des efforts que déploie l'UA pour renforcer les mécanismes existants. Dans ce contexte, une attention toute particulière sera prêtée à l'introduction en Somalie, par chacun des pays contributeurs de troupes et de personnels de police, d’une Cour martiale divisionnaire, à la finalisation du document-cadre sur l’exploitation et les abus sexuels et au renforcement du partage de l'information sur les poursuites pénales entre les pays contributeurs de troupes et de personnels police, d'une part, et la Commission de l'UA, de l'autre.

La Commission réitère sa gratitude à tous les pays contributeurs de troupes et de personnels de police, ainsi qu’au personnel civil et à la direction de l’AMISOM, pour les sacrifices considérables consentis et leur engagement indéfectible à œuvrer, aux côtés du Gouvernement et d'autres parties prenantes en Somalie, à la promotion durable de la paix, de la sécurité, de la stabilité et de la réconciliation dans ce pays.

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