Société
Le professeur Karifa Bayo, président de l’université de Ouagadougou: « Nous voulons zéro kiosque au sein de l’Université »
Publié le samedi 16 aout 2014 | Le Quotidien
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Après réception du communiqué de la présidence de l’Université de Ouagadougou exigeant le départ sans condition des commerçants du site du campus, communiqué daté du 31 juillet 2014, nous avons jugé utile de rencontrer son premier responsable, le Pr Karifa Bayo, pour en savoir plus. Rencontré dans son bureau, le jeudi 14 août 2014, il est revenu en long et en large sur ce qui est à l’origine de leur séparation.
Le Quotidien : Nous avons bien pris connaissance de votre communiqué, mais qu’en est-il exactement, et pourquoi avoir attendu maintenant pour prendre une telle décision ?
Professeur Karifa Bayo: Nous avons attendu tout ce temps avant de prendre cette décision parce que les gens en ont maintenant marre. Nous sommes tout le temps interpellés, malheureusement quand je suis arrivé aux affaires, j’ai eu l’ignorance de croire qu’on pouvait organiser ce secteur. Nous avons dit surtout à ceux qui y étaient autorisés et qui n’étaient pas à jour, qu’on pouvait ignorer rapidement les anciennes dettes, mais qu’ils avaient jusqu’au 1er janvier 2013 pour se mettre à jour. Si vous devrez vérifier, sur 103 commerçants qui se disent être autorisés, il n’y a que 19 qui sont à jour et deux fois plus que ce nombre sont sans autorisation. Aujourd’hui, nous pensons que le campus, pour toutes les raisons que nous avons évoquées ne peut pas se confondre à une rue marchande. Même les écoles primaires ne sont pas ainsi organisées, où chacun vient insérer son kiosque, sans compter les marchands ambulants. Vous pouvez vérifier par vous-mêmes pour vous rendre compte qu’il y a même des gens qui viennent griller des « bourmassa » au campus, sans oublier les vendeurs de chaussures, de documents, installés partout. Tout cela, pour vous dire qu’il y a du tout sur le campus. Ça commence à ressembler à Zabre Daaga et bientôt, pourquoi pas, nous aurons des vendeuses de tomates. Soyons sérieux. Je pense que l’Université n’est pas faite pour ça.
Des commerçants que nous avons rencontrés hier (mercredi 13 août 2014) contredisent très peu la décision mais pensent qu’il est nécessaire de réorienter votre décision pour leur permettre de toujours tirer leur pitance quotidienne. Qu’en dites-vous ?
La mission première de l’Université n’est pas d’héberger des commerçants. Vous pouvez vérifier dans tous les documents, nulle part ailleurs il n’a été fait mention de cela. En examinant le contrat que je leur ai donné, il est dit que le préavis est fixé pour un mois. Allez aussi vérifier, vous verrez que nulle part au monde, l’Université n’est un lieu où tout le monde rentre comme il veut et pourtant, il y a un impact sur l’électricité, la sécurité, pour ne citer que cela. Leur avez-vous demandé combien ils paient ? Il y en a qui paient 1000 F CFA, d’autres 1500 F CFA et n’ont d’ailleurs aucune autorisation. Les concepteurs de cette situation pensaient que ce secteur pouvait constituer des recettes pour l’Université, mais malheureusement quand on fait le constat aujourd’hui, ça n’apporte rien à l’Université. Au contraire c’est même très déficitaire pour l’Université, surtout en termes d’hygiène, d’insécurité, d’insalubrité. C’est pratiquement la poubelle de tout le monde.
Que diriez-vous à ceux qui trouvent que le délai est trop bref ?
Mais c’est simple, qu’ils vérifient le contrat que je leur ai remis, ils verront qu’ils ont un contrat d’un mois. Celui-ci stipule qu’ils peuvent s’installer et que lorsque nous aurons besoin de notre espace, nous le récupérerons. Vous aurez constaté qu’aujourd’hui, l’Université, en termes d’investissement, n’a même plus d’espace. Nous avons, au jour d’aujourd’hui, plus de 200 à 300 kiosques. L’Université n’est pas faite pour cela. Ils ne peuvent pas juger le délai bref, s’ils se réfèrent au contrat.
Quelques étudiants que nous avons approchés, le même jour, ne partagent pas tout à fait votre décision. A les entendre, les raisons évoquées ne tiennent pas. Que leur répondez-vous ?
C’est leur droit, nous sommes en démocratie. Est-ce que l’étudiant vient à l’Université pour apprendre ou pour savoir s’il y a des kiosques ou pas? Les gens ont des raisons subjectives qu’ils n’osent pas évoquer. Le quartier contient plus de kiosques pour ceux qui aimeraient manger. Il suffit de jeter un coup d’œil vers le mur, juste en face du boulevard Charles De Gaulle, vous avez du mal même à percevoir le mur parce qu’il y a tellement de kiosques qui s’y trouvent. Les kiosques accompagnent t- ils les amphis, les laboratoires ? Donc, je ne comprends pas cette réaction.
Un dernier mot, président
Il va falloir que nous soyons conscients aujourd’hui de ce fait. Du côté de ceux qui dirigent l’Université, il n’y a aucun doute, tous sont presqu’unanimes, ils réclament zéro kiosque sur l’ensemble du campus. Dans les plateformes revendicatives de certains syndicats, le constat est bien établi. Personne ne supporte encore les kiosques sur le campus. Nous avons sondé les gens et il est vrai que si on est dans un organe statutaire, les raisons personnelles et subjectives ne peuvent pas prendre les devants. Les gens à ce niveau parlent intelligemment, ils s’expriment aisément et pour ce qui est de cet espace, ils jugent que trop c’est trop. Ce site est devenu un lieu où tout le monde entre. Faites donc un tour, bien que nous soyons en vacances, le campus est animé par les commerçants plus que Rood-Wooko. Ça ne va pas. C’est gens doivent aussi comprendre que leurs enfants qui viennent à l’école ont besoin d’une certaine sérénité pour travailler. Même en zone non lotie, on ne s’installe pas de la sorte. Cela me fera pratiquement deux ans que je suis en fonction, je peux vous signifier que je n’ai jamais signé une autorisation de mes propres mains, pourtant tous les jours, en venant, je vois des kiosques qu’on installe. En zone non lotie, on s’adresse quand même au chef de la localité, mais ici, c’est une institution qui appartient à l’Etat et, en dehors d’autorisation dûment signée, on ne peut pas s’installer et si on le faisait aussi, on doit savoir qu’il y a les conditions de départ. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’on leur a demandé de ne pas faire du définitif et l’Université devient un territoire hors la loi, ça sera inquiétant pour notre pays. Nous sommes donc tous convaincus qu’on ne peut pas organiser ce secteur, car ils ont un mode de vie contraire à ce que nous attendons. J’espère au moins que les commerçants auront un comportement civique, comme cela est tellement chanté au Burkina et que d’ici là chacun trouvera autre destination.
Par Toudassida Hermann
KABORE et Shaida BADO
(Stagiaire)
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