Mettre à la disposition des décideurs politiques des Etats de l’espace communautaire CEDEAO des données techniques fiables et alarmantes sur la dangerosité des produits du tabac pour les inciter à prendre des mesures fiscales fortes et communes taxant spécifiquement ces produits. C’est à cette fin que chercheurs et représentants des Etats de la communauté ont animé à Ouagadougou du 26 au 28 novembre 2012, une conférence régionale.
Initiée par le Consortium pour la recherche économique et sociale (CRES) basé à Dakar au Sénégal, la rencontre a été celle de partage des profils-pays et de la synthèse régionale sur la fiscalité des produits du tabac dans la région CEDEAO.
Après avoir salué, à la cérémonie d’ouverture de la conférence, la participation effective des quinze Etats membres de la CEDEAO qui a associé l’UEMOA, Paul Nikièma, directeur général des impôts représentant le ministre de l’Economie et des finances du Burkina, a invité les participants à mettre à la disposition du Conseil des ministres de la CEDEAO un projet pertinent de nouvelle directive sur la fiscalité du tabac. « Il est question à travers cette conférence, de travailler à décourager les consommateurs du tabac en jouant sur la fiscalité », a-t-il indiqué. Et de rassurer, à la cérémonie de clôture, que les conclusions des travaux « seront examinées avec la plus grande attention pour l’intérêt de nos Etats respectifs ».
Pour le Pr Abdoulaye Diagne, Directeur exécutif du CRES, par ailleurs professeur titulaire à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, cette conférence a permis la mise en place d’un réseau qui a élaboré des données techniques à soumettre aux Etats membres de la région ouest-africaine. Il a appelé au développement de ce réseau, à sa cohésion et à la mise en œuvre en son sein, d’activités « qui permettront à la lutte contre le tabagisme de remporter des succès ». « Nous continuerons de nous engager » aux côtés des deux organisations (CEDEAO et UEMOA) et aux côtés des Etats membres de chacune d’elle, a-t-il indiqué, avant de préciser que « le moyen le plus efficace contre la réduction de la consommation du tabac est la taxation, c’est-à-dire l’augmentation significative et régulière de ses prix pour dissuader les fumeurs et les futurs fumeurs ».
Le représentant du président de la commission de la CEDEAO Salifou Tiemtoré, a indiqué que « la lutte contre le tabagisme est un combat qui mérite d’être rendu public » en y impliquant, comme le soutient Robert Geneau du Centre de recherche pour le développement international (CRDI) basé à Ottawa au Canada, plusieurs acteurs dont la société civile, les Etats, les Organisations inter-gouvernementales (OIG). « La CEDEAO sera toujours aux côtés des acteurs institutionnels évoluant dans la société civile, des acteurs agissant au niveau des institutions de recherche, des acteurs étatiques », a promis M. Tiemtoré. Mais avant, rassure le représentant de la CEDEAO : « soyez rassurés que les recommandations qui ont été formulées ici, notamment sur les amendements des textes communautaires sur la fiscalité du tabac ne resteront pas dans les tiroirs ». Et de préciser, « nous allons travailler ensemble de manière à aboutir à des législations communautaires qui soient en phase avec les besoins exprimés par nos chercheurs et populations, en adéquation avec nos politiques de santé, nos politiques de développement ».
Le tabac sème la mort !
Les conférenciers justifient la prise de mesures de taxation particulièrement fortes sur les produits du tabac par les effets éminemment mortels de ceux-ci. En tout cas, le Pr Diagne est catégorique sur les effets dévastateurs du tabac. Pour l’éminent économiste en effet, non seulement « il n’ya aucun avantage qu’un pays tire fondamentalement du tabac », mais aussi et surtout « le tabac tue ; il tue plus que le sida et le paludisme ». Et de poursuivre, « nos Etats doivent prendre des mesures fiscales fortes tenant compte de la spécificité du tabac, parce que le tabac sème la mort ». « Le tabagisme est le prochain fléau qui guette l’Afrique », a-t-il par ailleurs indiqué. Il importe donc, semble dire le Pr, de prendre dès à présent, des mesures de dissuasion adéquates en vue de permettre à nos Etats de disposer de ressources humaines saines et productrices. « Avec la taxation des produits du tabac, les recettes fiscales vont augmenter ; mieux, cela permettra aux Etats de réduire les sommes allouées aux soins de santé dus au tabagisme », a-t-il ajouté.
En attendant l’adoption de mesures appropriées par les instances compétentes de la CEDEAO et de l’UEMOA, les participants envisagent de faire bien comprendre la spécificité du tabac par les administrations fiscales des Etats membres. Le souhait de voir se tenir à l’issue de la présente conférence, une réunion des ministres de la Santé et ceux des Finances de ces espaces communautaires, a également été émis.